Jeudi, Ariane 5 s'élancera dans le ciel guyanais avec à son bord deux satellites de télécommunications. Mais ses jours sont comptés. Les ministres européens de l'Espace ont annoncé mardi leur décision de construire un nouveau lanceur. Exit donc Ariane 5. Et exit aussi Ariane 5ME, projet que soutenait l'Allemagne et qui consistait à améliorer le modèle existant. Et bonjour Ariane 6. Avec une nouvelle version qui sera en vol en 2020, l'Europe veut se donner les moyens de rester dans la course spatiale. Et la concurrence est rude depuis l'arrivée sur le marché de l'Américain Space-X.
Ecoutez le Zoom éco d'Axel de Tarlé sur le sujet :
Pourquoi Ariane 5 est-elle dépassée ? La concurrence est rude quand il s'agit de mettre en orbite des satellites. Et Ariane 5, née en 1995, se fait vieille et s'essouffle. L'arrivée sur le marché de Space-X, entreprise privée, en témoigne bien. Le petit poucet américain, débarqué dans le secteur en 2012 avec un premier lancement réussi, est devenu grand. La raison ? Des prix défiant toute concurrence. Elon Musk, son dirigeant, a révolutionné les méthodes de construction en recyclant des vieilles pièces de la Nasa. Son lanceur, le Falcon 9, met en orbite un petit satellite pour 60 millions d'euros alors qu'Ariane 5 facture le même vol pour… 80 millions.
Même si Ariane 5 affiche 42 vols d'affilée sans anicroches et un carnet de commandes plein pour les trois prochaines années, Space-X lui fait de l'ombre en lui grappillant des parts de marché.
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Safran et Airbus à la manœuvre. Ce sont deux industriels qui ont mis sur la table le projet. Safran et Airbus Defence and Space ont en effet travaillé, depuis 2012, à une nouvelle Ariane 6, conscients que l'Europe risquait de rater le coche et de perdre définitivement sa place dans la cour des grands. Leur projet a été adopté officiellement mardi par les ministres européens de l'Espace. Et pour cause, il est réellement compétitif et proposera des tarifs de lancement proches de ceux de Space-X.
Un décollage d'Ariane 5 :
L'Esa, le dindon de la farce ? Dans la conception d'une nouvelle fusée, l'Agence spatiale européenne (Esa) a raté le coche. Elle aussi avait monté un projet d'Ariane 6. Mis finalement au rencart en juin dernier. Jacques Dordain, le directeur général de l'Esa, interrogé par L'Obs, explique : "Notre projet d'Ariane 6, accepté par les gouvernements en novembre 2012, ne correspondait plus au nouveau marché". L'Esa voulait un gros lanceur. Mais les tarifs envisagés ne permettaient décidément pas de rester dans la course face au concurrent américain.
Ariane 6 sera privatisée. Les institutions publiques en prennent décidément un coup dans ce nouveau projet. Car le Centre national des études spatiales (Cnes) va devoir vendre une partie des actions qu'il possède dans Arianespace, la société qui commercialise les vols de la célèbre fusée. Airbus et à Safran ont exigé de récupérer ces parts puisque leur société va assumer les principaux risques de cette nouvelle aventure. Ce qui consiste à une sorte de privatisation.
Une Ariane 6… en deux modèles. Un débat agitait ces dernières années les spécialistes du secteur. Fallait-il un gros lanceur ou un petit lanceur comme celui de Space X ? Airbus et Safran ont coupé la poire en deux en concevant une Ariane 6 modulable, tout comme l'a été Ariane 4. Une première version aura deux propulseurs pour lancer de petits satellites et une deuxième en aura deux supplémentaires pour pouvoir transporter des satellites plus lourds. Histoire de permettre à Ariane 6 de concurrencer Space-X tout en restant présent sur les gros marchés.
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