Le président Macron a dévoilé samedi une série de mesures pour lutter contre les violences faites aux femmes. Il a notamment annoncé la simplification du dépôt de plainte pour les victimes ou encore l'allongement du délai de prescription pour les victimes mineures. Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des Magistrats, interrogée dimanche sur Europe 1, a une vision toute autre de ces mesures.
Des mesures d'accompagnement difficiles à mettre en place. "La justice viendra aux femmes et non l'inverse", a déclaré Emmanuel Macron. Il a par exemple annoncé la création d'une plateforme de dépôt de plainte en ligne ou encore des formations pour les personnels médicaux. "Si c'est pour accompagner les personnes à déposer plainte, c'est une bonne chose, mais je me demande comment matériellement ça peut se mettre en place", s'interroge Virginie Duval. "J'ai peur que ce soit encore une mesure d'affichage qui va susciter des espoirs mais qui sera forcément synonyme de déception."
Allonger le délai de prescription pour les victimes mineures. Le président a par ailleurs confirmé son souhait de voir allonger de 10 ans (de 20 à 30 ans) après la majorité de la victime. Une mesure qui pourrait, au lieu de les aider, créer une grande frustration pour les victimes. "Si on peut déposer plainte plus de 40 ans après les faits, on va se heurter au problème de la preuve", explique Virginie Duval.
"Car la seule parole de la victime ne suffit pas à condamner la personne mise en cause, [l'accusation] doit être corroborée par d'autres éléments. Donc plutôt que d'allonger la prescription, on ferait mieux d'aider les victimes à parler dès le début", estime la magistrate. "Parce qu'on va susciter un espoir qui sera forcément déçu, puisque la personne qui aura déposé plainte ne sera pas reconnue comme victime par la justice sans preuve." La magistrate craint également une multiplication des acquittements ou des non-lieux.
Quel âge pour la présomption de non-consentement. Emmanuel Macron s'est auusi dit favorable à limiter l'âge du consentement à 15 ans, comme la majorité sexuelle. Au-dessous d'un certain âge, il existera une présomption irréfragable de non-consentement. "Jusqu'à présent, on est sur la notion d'atteinte sexuelle et c'est au procureur de prouver que le mis en cause a exercé une contrainte, une menace ou une violence. Dans ce cas, il y a agression sexuelle ou viol.
Mais avec cette nouvelle règle selon laquelle le viol serait automatique en-dessous d'un certain âge, "on changerait le sens de la preuve. Il y aurait une présomption de culpabilité du fait de l'âge de la victime et ce serait à la personne mise en cause de prouver qu'elle n'était pas un agresseur." Partant de ce constat, la patronne de l'Union syndicale des Magistrats estime qu'"il n'y a pas à intervenir juridiquement là-dessus. C'est un vrai choix de société."
"En revanche, il faudrait voir si la personne mise en cause peut retourner la preuve. Peut-on montrer que la jeune fille a accepté et consenti ? Cela risque de modifier considérablement les principes du droit. Si un jeune de 18 ans a une relation avec une jeune fille de 14 ans et 11 mois, cela pourrait entraîner une condamnation pour viol ou agression sexuelle",a conclu Virginie Duval.