Insérer les lycées professionnels au sein de campus ou de réseaux, revoir la liste des bacs pro et rendre leur intitulé plus compréhensible, remanier les trois années du lycée : avec ces trois axes annoncés lundi, le ministre de l'Éducation entend revaloriser la voie professionnelle à l'école.
Une voie professionnelle qui a mauvaise presse
Après la réforme du bac général et technologique, Jean-Michel Blanquer s'attaque à la voie professionnelle : éternelle mal-aimée du système éducatif français, elle compte quelque 700.000 élèves, qui préparent un bac pro, un CAP ou une mention complémentaire (formation d'un an après le bac pro ou le CAP).
Cette voie a connu plusieurs réformes au fil des ans, avec notamment la création du bac pro il y a 30 ans. Mais elle reste dévalorisée, contrairement à la situation dans d'autres pays comme l'Allemagne ou la Suisse. Très marquée socialement, elle accueille principalement des enfants des milieux les moins favorisés. La réforme, qui s'inspire d'un rapport de la députée LREM Céline Calvez et du chef étoilé Régis Marcon, s'appuie sur trois "leviers".
Premier axe : créer de "véritables campus professionnels"
Un projet régional. Certaines mesures devraient commencer à être introduites à la rentrée 2019, certaines sous la forme d'expérimentations. Il s'agit d'abord de renforcer la création de "véritables campus professionnels", "que nous concevrons avec les régions", a annoncé lundi Jean-Michel Blanquer sur RMC/BFMTV.
Fédérer autour des lycées pro. Ils sont actuellement 78 sur le territoire mais peu existent sous la forme d'un réel campus, avec un ou des lycées pro, un centre de formation des apprentis (CFA), parfois un IUT, un internat, des équipements sportifs et culturels, un incubateur d'entreprises et des lieux de formation continue. Pour les lycées pro situés ailleurs que sur des campus, le ministère souhaite qu'ils fassent partie d'un réseau autour d'un métier, à l'échelle régionale (aéronautique, automobile, etc.) ou nationale (services à la personne par exemple).
Deuxième axe : des formations plus claires
Le deuxième axe de la réforme concerne la carte des formations, qu'il faut revoir, afin de mieux prendre en compte les métiers de demain et réduire les effectifs d'élèves dans les filières qui insèrent mal sur le marché du travail (par exemple le bac pro gestion-administration, 75.000 élèves).
Des intitulés plus clairs. Le ministre veut aussi rendre plus lisible la liste des 80 bacs pro, dont les intitulés sont souvent hermétiques. Ainsi, l'intitulé "Industrie des procédés" laisse perplexe, tandis que "Chaudronnerie" n'évoque en rien les métiers actuels auxquels conduit ce bac. Les bacs pro devraient ainsi être regroupés en familles de métiers (métiers du bois, de bouche, de la relation clients, etc.).
Troisième axe : une spécialisation seulement en Première
Une Seconde plus générale. Enfin, le parcours des élèves lors des trois années de lycée sera revu. La Seconde restera une Seconde pro mais la formation sera moins spécialisée. L'élève suivra lors de cette première année une formation par famille de métiers (par exemple le bâtiment), avant de se spécialiser en Première.
Un "test de positionnement" en fin d'année. Toujours en classe de Seconde, les élèves passeront "un test de positionnement", l'équivalent d'un bilan des acquis pour connaître points forts et points faibles, une évaluation à laquelle seront également soumis les élèves des Secondes générale et technologique, a précisé le ministre lundi matin.
Un "chef d'oeuvre". La classe de Terminale proposera deux modules : un pour les élèves visant l'insertion professionnelle tout de suite après le bac, l'autre pour ceux qui souhaitent poursuivre en études supérieures (un BTS le plus souvent). Tous devront aussi réaliser "un chef d'oeuvre", nom du projet à construire sur les deux dernières années, application concrète de leurs enseignements.
Une durée de CAP modulable. Pour le CAP, une formation actuellement le plus souvent sur deux ans, le ministère de l'Éducation veut qu'elle puisse être modulée sur un, deux ou trois ans, en fonction des besoins de l'élève.
Des réformes complémentaires. Cette "transformation" de la voie pro, selon le terme du ministère, est complémentaire avec la réforme des deux autres bacs (général et technologique) et s'articule aussi avec celle de l'apprentissage, toutes présentées en février. Jean-Michel Blanquer veut d'ailleurs que tous les lycées comptent une unité d'apprentissage, afin de "dépasser l'opposition entre apprentissage et enseignement professionnel scolaire".