Une bonne partie du monde judiciaire est en colère contre la réforme de la justice, présentée vendredi en Conseil des ministres. Ce projet controversé, porté par la garde des Sceaux Nicole Belloubet, recoupe de nombreux domaines. À commencer par la réorganisation territoriale, qui cristallise la majeure partie des tensions.
Une justice de proximité en danger ? Le gouvernement veut en effet fusionner les tribunaux d'instance et de grande instance pour gagner en efficacité. Mais les personnels craignent que les tribunaux d'instance, lieux de proximité où sont jugées les affaires civiles comme le surendettement ou les loyers impayés, ne soient, à terme, supprimés. "On ressent un grand désarroi. Si on a choisi de travailler dans un tribunal d'instance, c'est pour être en contact avec le justiciable. On n'a pas de grands procès médiatiques, on ne fait pas la Une des journaux, mais on est en contact avec des gens démunis, avec des problèmes du quotidien qui, pour eux, sont l'affaire de leur vie", explique au micro d'Europe 1 Patrice, un des fonctionnaires du greffe du tribunal d'instance de Nice.
Et même si le gouvernement martèle qu'aucun tribunal ne sera supprimé, les professionnels redoutent une déshumanisation des procédures. "On ne va pas dire que l'on a un rôle social, mais on n'en est pas loin. À Nice, on a mis en place un service d'accueil pour les tutelles des majeures : les gens viennent au secrétariat commun pour se confier, ce que l'on aura plus au niveau des grandes juridictions", argue encore Patrice.
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Lutter contre l'embouteillage judiciaire... Pour désengorger les tribunaux, le gouvernement prévoit aussi des modes alternatifs de règlement des différends. Par exemple, le recalcul d'une pension alimentaire sera confié, à titre expérimental, à des organismes d'État comme la CAF, et non plus aux juges. Pour désengorger les cours d'assises, le gouvernement souhaite aussi l'expérimentation d'un nouveau tribunal : le tribunal criminel départemental.
… et la surpopulation carcérale. Le texte s'attaque aussi à une refonte totale du système des peines. Objectif : faire face à la surpopulation carcérale avec la fin des détentions courtes, mais l'application des peines de prison de plus d'un an et la multiplication des alternatives en milieu ouvert.