"Je regardais distraitement mon fil Twitter quand la purée chauffait. Nous allions passer à table. Les enfants patientaient devant un dessin animé. Et puis j’ai vu l’annonce de la fusillade à Charlie Hebdo. Nous avons fini de déjeuner dans la bonne humeur (…) Puis c'était l’heure du goûter. Il a fallu étaler le beurre et le chocolat. Je les ai regardés danser et chanter. Entre deux mondes. La naïveté de l’enfance qui colore la journée avec des paillettes et le noir de la barbarie. Et puis le questionnement. Que dois-je leur dire ?"
Comme n'importe quel parent, cette Parisienne, maman de deux enfants, se demandait mercredi sur son blog comment aborder ce drame avec eux tout en les préservant de la barbarie ? Le pédopsychiatre Stéphane Clerget et la psychothérapeute Audrey Akhoun livrent quelques conseils.
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Le dessin de Stéphanie Blake, auteur de livre pour enfants :
Tout dépend de son âge. En dessous de 5 ans, les enfants n'ont pas la capacité de comprendre ce type de drame. Donc, s'ils n'en entendent pas parler, ce n'est pas la peine de leur faire un cours sur le terrorisme ni de les exposer aux images des journaux télévisés.
Utiliser des mots simples. A partir de 6 ans, il est recommandé d'en parler avec eux, surtout s'ils vous posent des questions. Le mieux, c'est d'abord de questionner votre enfant pour savoir ce qu'il a vu, ce qu'il a entendu pour pouvoir rectifier si nécessaire. "Avant de leur en parler, il faut surtout les écouter, leur demander ce qu'ils ont compris, ce qui les inquiète", insiste le pédopsychiatre Stéphane Clerget.
Charlie Hebdo : que dire (ou pas) aux enfants ?par Europe1frEnsuite, vous pouvez expliquer à vos enfants ce qui s'est passé, sans rentrer dans les détails, en utilisant des mots simples. "Vous pouvez d'abord dire à vos enfants qu'il y a des gens fous qui ont commis des actes d'une grande violence", conseille la psychothérapeute Audrey Akhoun. Ensuite, le plus important, "c'est de leur expliquer qu'il y a la police, l'État et que tout est mis en œuvre pour que ces gens qui ont mal agi soient retrouvés et punis en conséquence", ajoute la psychothérapeute.
Les rassurer par des images d'ordre. Comme les enfants imaginent beaucoup de choses et toujours le pire, pour les rassurer, il faut les ramener à du concret. Leur montrer sur le terrain, les policiers devant les magasins ou les lieux publics et leur dire, "ils sont là pour nous protéger et te protéger". En revanche, il ne faut surtout pas leur montrer des images du journal télévisé. "L'image télévisuelle n'a pas de caractère informatif. Cela créé beaucoup d'émotions mais cela n'informe pas", rappelle le pédopsychiatre Stéphane Clerget.
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Le témoignage d'une maman. Sur son blog Parler de ma vie, cette maman de deux enfants raconte comment elle a abordé ce drame avec son fils de 8 ans, mercredi, avant le dîner. "J’ai une boule au ventre, la gorge nouée et les mains moites. Voilà. Je lui ai dit à lui mon 8 ans, si grand. Je lui ai raconté. Il a écouté. Il est resté très concret. 'Il était quelle heure' m’a t-il demandé ? J’ai parlé des dessinateurs qui travaillaient dans un journal, des deux hommes qui en ont tué douze, des 3.000 policiers et des millions de gens indignés qui descendaient de partout dans les rues. Et puis j’ai insisté sur le fait qu’il devait nous parler s'il avait des questions ou des inquiétudes", raconte t-elle. "Il n'a pas semblé inquiet et a repris une activité normale".