"On a été manipulés, escroqués", clament, dans les colonnes du Parisien jeudi, trois des treize anciens salariés du géant du tabac Philip Morris qui ont saisi les prud'hommes et déposé une plainte au pénal pour "contrat illicite". Ils reprochent au géant américain de leur avoir fait vendre la "cigarette du futur" iQos en toute illégalité.
Un contrat trompeur. Un an plus tôt, plusieurs particuliers qui cherchent à arrondir leurs fins de mois sont recrutés par l'agence de marketing CPM. Leur CDD de trois mois, payé au Smic mentionne seulement qu'ils doivent "présenter, accompagner les utilisateurs […] d’un produit issu des nouvelles technologies, […] respecter scrupuleusement le secret le plus absolu à l’égard des tiers pour toute information recueillie à l’occasion de leurs fonctions", selon le contrat consulté par le quotidien.
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— IQOS Support UK (@iqos_support_uk) 6 juillet 2017
Une publicité "totalement illégale". En réalité, ils sont chargés de faire de la publicité, "totalement illégale" puisque la direction générale de la santé interdit toute promotion du tabac, de la cigarette développée par Philip Morris, iQos, censée être moins nocive. Lors de leur entretien d'embauche, le produit est présenté comme un "outil révolutionnaire", racontent les trois anciens salariés au Parisien.
"Consommer" et non "fumer". Dix jours plus tard, c'est un représentant du cigarettier Philip Morris qui s'occupe de leur formation. "Ils nous ont expliqué que la cigarette était amenée à disparaître et qu'ils bossaient depuis 15 ans sur cette alternative révolutionnaire", rapporte l'un des participants, précisant qu'on leur demande de dire "consommer" et non "fumer". Chacun repart avec 20 iQos et un budget de 45 euros par mois pour inviter de futurs clients à boire un verre.
Une mission contraire à leurs valeurs. Il leur est alors demandé d'activer leur réseau pour faire la promotion de cette cigarette, démonstration à l'appui ; une demande difficile pour ces trentenaires non fumeurs. Et l'agence ne les lâche pas d'une semelle pour les motiver aux résultats. Chaque jour, ils doivent envoyer leurs chiffres de ventes.
Et lorsqu'on leur demande de démarcher des clients directement dans les bureaux de tabac, les trois parisiens décident d'exercer leur droit de retrait. L'agence qui les emploie veut alors rompre leur contrat. Deux des trois amis contactent l'avocat qui les représente désormais et parviennent à se faire payer jusqu'à la fin de leur contrat. "Aujourd'hui, on veut réparation, on nous a rendus complices d’une escroquerie malgré nous", assurent-ils.
Des plaintes pour "contrat illicite". Les treize plaignants attaquent l'agence CPM et Philip Morris. Ils ont saisi la justice prud'homale pour "contrat illicite" et demandent 115.000 euros de dommages et intérêts pour chacun. De leur côté, l'agence assure que "les contrats de travail établis pour nos salariés sont tous conformes au cadre légal", rapporte Le Parisien, tandis que Philip Morris se justifie en confirmant que "les faits communiqués à ce stade ne correspondent pas à nos pratiques. Le contrat passé entre Philip Morris France et son partenaire concerne uniquement la commercialisation de l’appareil électronique iQos".