La création d'un parquet national antiterroriste ne figure plus dans le projet de réforme de la justice présenté vendredi, le gouvernement ayant décidé de "prolonger" sa "réflexion", a annoncé la garde des Sceaux Nicole Belloubet
Lors de l'examen du projet de loi, le Conseil d'Etat "a fait valoir un certain nombre d'observations" et mis en avant "une certaine rigidité" d'un parquet exclusivement dédié à l'antiterrorisme, a déclaré Nicole Belloubet lors d'un point de presse après la présentation de son projet de réforme de la justice en Conseil des ministres. "De ce fait, nous avons préféré prolonger la réflexion sur ce parquet avant de la dessiner de manière définitive", a-t-elle dit.
Des observations du Conseil d'État. Le Conseil d'État, dans son avis qui a été révélé par le site Dalloz Actualité, s'inquiète du "risque d'isolement des magistrats affectés à ce parquet avec l'inconvénient de perdre la perception des liens entre la petite délinquance et le terrorisme, en particulier dans les parcours de radicalisation". De plus, le Conseil d'État met en avant la "rigidité inutile pour adapter les effectifs de magistrats affectés à la lutte antiterroriste aux variations de l'activité terroriste".
Un deuxième parquet spécialisé. Nicole Belloubet a annoncé en décembre la création de ce parquet, alors présenté comme une "véritable force de frappe judiciaire", dans une France sous constante menace djihadiste. Actuellement, le parquet de Paris est compétent au niveau national pour tous les dossiers terroristes. Ce nouveau parquet national serait le deuxième spécialisé après la création en 2013 du parquet national financier (PNF), né du scandale des comptes cachés de l'ex-ministre Jérôme Cahuzac. "Avec la création d'un parquet national antiterroriste, le parquet de Paris se verrait dégagé de ce contentieux lourd et spécifique", expliquait alors la ministre.
Critiques. Ce projet avait été largement critiqué. "Le système actuel fonctionne bien", estimait en février Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire). "Il n'y a aucune raison valable de le remettre en cause". Le procureur général de Paris, Catherine Champrenault, avait indiqué qu'elle y était "défavorable". "Une des règles de management en général, c'est de changer ce qui ne marche pas. J'ai le sentiment que cela marche plutôt bien. Aujourd'hui, quand il y a un attentat, nous avons la possibilité de mutualiser nos moyens, en vases communicants, la possibilité de piocher dans le vivier du parquet de Paris, de mobiliser rapidement 60 magistrats. Notre fonctionnement permet la souplesse", avait-elle expliqué en décembre.