Les avocats du couple Fillon ont demandé au parquet national financier (PNF) de se dessaisir de l'enquête préliminaire ouverte après les révélations du Canard Enchaîné sur les soupçons d'emploi fictif de l'épouse du candidat LR à l'élection présidentielle, jeudi. "Cette enquête viole les principes les plus fondamentaux du droit constitutionnel", a expliqué Antonin Lévy, conseil de François Fillon. Invité d'Europe 1, jeudi soir, le professeur de droit constitutionnel à Sciences Po Bordeaux Pascal Jan a estimé que cette requête était, en partie, fondée sur des arguments valides.
Atteinte à "l'autonomie des assemblées". "Pour moi, il y a bien atteinte à la séparation des pouvoirs et à l'autonomie des assemblées, ça ne fait pas de doute", a expliqué Pascal Jan. "Ce qui est choquant, c'est de voir la justice s’immiscer dans une relation personnelle entre le parlementaire et son collaborateur et pouvoir juger de la réalité du travail d'un collaborateur", a-t-il poursuivi. "Le parquet enquête pour savoir s'il y a un contrat de travail, alors que par définition, les collaborateurs ne sont payés que s'il y a un contrat de travail. Les services des assemblées contrôlent déjà cette matérialité."
"Le parlementaire ne gère pas les fonds publics". Le parquet financier devrait-il alors se dessaisir de l'enquête, comme le réclament les époux Fillon ? "La question de l'incompétence du parquet, c'est autre chose", souligne Pascal Jan. Le professeur reprend cependant l'un des arguments des avocats du couple : "Le détournement de fond public ne peut pas viser pas un parlementaire, mais une personne dépositaire de l'autorité publique ou d'une mission de service public, c'est l'article 432-15 du code pénal qui le dit." Et d'ajouter : "Le parlementaire ne gère pas les fonds publics. Lorsque ses collaborateurs sont rémunérés, ils sont payés par les services financiers des assemblées parlementaires."
Une histoire "sans fin". "Il y a peut être eu une précipitation de la part du parquet", conclut Pascal Jan. "Mais quand bien même il se dessaisirait, le parquet de Paris serait confronté à la même impossibilité de juger, d'apprécier la qualité du travail du collaborateur. C'est une histoire qui est presque sans fin."