JO 2024 : qu'est-ce que la vidéosurveillance algorithmique et pourquoi suscite-t-elle des inquiétudes ?

L'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique doit se terminer théoriquement le 31 mars 2025.
L'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique doit se terminer théoriquement le 31 mars 2025. © Xosé Bouzas / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP
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Gauthier Delomez avec AFP , modifié à
Le Parlement a définitivement adopté mercredi 12 avril le projet de loi en vue des Jeux olympiques de Paris 2024, qui comprend un important volet sécuritaire et notamment une mesure phare, la vidéosurveillance algorithmique. Europe 1 fait le point sur ce projet et pourquoi il suscite des inquiétudes dans l'opposition.

C'est un article controversé qui va alimenter le débat, à moins d'un an et demi des Jeux olympiques de Paris 2024 (26 juillet-11 août). Le mercredi 12 avril, le Parlement a définitivement adopté, par un ultime vote du Sénat, le texte préparé par le gouvernement en vue de l'événement sportif planétaire. Celui-ci comprend un important volet "protection", dont sa mesure phare, la vidéosurveillance algorithmique. Et c'est cette dernière qui suscite le plus d'inquiétudes. Écologistes et Insoumis ont d'ailleurs annoncé lundi 17 avril un recours devant le Conseil constitutionnel.

Des images conservées jusqu'à 12 mois

Pourquoi autant de crispations ? Pour une partie de l'opposition, cette mesure contrevient au "droit au respect de la vie privée". Concrètement, la vidéosurveillance algorithmique consiste à utiliser des images de caméras et de drones pour nourrir des algorithmes. Ceux-ci alerteraient alors automatiquement les équipes de sécurité, qui visionnent les images en temps réel, d'un événement potentiellement à risque (mouvement de foule, abandon d'un bagage,...).

Les images, qui pourront être analysées au moyen d'algorithmes de sociétés privées, pourront être conservées pendant une durée maximale de 12 mois. Et pour le moment, il n'agit que d'une expérimentation. Elle pourrait débuter dès sa promulgation et concerner la prochaine Coupe du monde de rugby (8 septembre-28 octobre), et doit se terminer théoriquement le 31 mars 2025. La liste des évènements à surveiller sera fixée ultérieurement.

La crainte d'une pérennisation des "caméras augmentées"

L'exécutif et le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, invoquent le besoin de sécuriser les millions de visiteurs, insistent sur les garde-fous et l'absence de reconnaissance faciale. Le Sénat "a multiplié les garde-fous, les contrôles, les garanties", a aussi relevé Agnès Canayer, la rapporteure LR du texte. En outre, celui-ci "intègre toutes les mesures indispensables au bon déroulement des Jeux (...), le tout en assurant le plein respect des droits et libertés de nos concitoyens", a également souligné la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra.

Mais des élus de gauche, des associations comme Amnesty et la Quadrature du net ou le Conseil national des barreaux sont contre. Certains estiment que les Jeux olympiques et paralympiques (28 août-8 septembre) ne serviront que de vitrine pour pérenniser ces "caméras augmentées", et généraliser leur utilisation à la surveillance de toute la population. Pour le communiste Pierre Laurent, "l'état d'exception créé par les Jeux olympiques est utilisé, au total, pour faire passer des lois sécuritaires qui resteront par la suite et qui posent beaucoup de problèmes". L'écologiste Guy Benarroche a lui regretté "une vision sécuritaire débridée et si éloignée des valeurs de l'Olympisme".

D'autres mesures du projet de loi sont d'ores et déjà censées perdurer après les Jeux, comme l'extension du champ des "criblages", la conduite d'enquêtes administratives sur des personnes. Les participants et les personnes accréditées sur les sites de compétition et les fan-zones pourront être visés, mais pas les fans. Le texte entrera en vigueur environ un an après le fiasco de la finale de Ligue des champions au Stade de France.