En France, 650 à 700.000 personnes sont bègues. Soit une personne sur 100. "On est nombreux à en souffrir et pourtant on nous regarde toujours aussi mal", déplore Cédric, bègue depuis qu'il 4 ans. "C'est une honte pour nous. Rendez-vous compte, je n'ai même pas choisi les prénoms de mes propres enfants en fonction de mes goûts ! J'en ai pris deux que je savais parfaitement prononcer". En nous livrant cette poignante confidence, Cédric cherche aussi à "réveiller les non-bègues" et à "leur ouvrir les yeux" sur ce problème d'élocution.
>> A l'occasion de la Journée mondiale du bégaiement, jeudi 22 octobre, Europe 1 vous apporte quelques précisions sur ce trouble souvent méconnu :
Pourquoi bégaie-t-on ? Le bégaiement se manifeste de plusieurs manières : soit par des répétitions de syllabes (Lo-lo-lo-lo), soit par des blocages (l'impossibilité de prononcer une syllabe) ou encore par des prolongations de syllabes (Loooooooo…). Le plus souvent, le bégaiement survient pendant la petite enfance (entre 3 et 6 ans) même si les causes sont encore mal connues. "Des chercheurs ont trouvé des gènes responsables du bégaiement", assure Laurent Lagarde, de l'Association Parole-Bégaiement. "D'autres scientifiques auraient trouvé des différences au niveau du cerveau qui seraient responsables du bégaiement". Quelques hypothèses donc mais encore beaucoup de mystères autour de ce trouble.
Quelques conseils pour mieux appréhender le bégaiement. "Dès que des parents ont un doute sur l'élocution de leur enfant, il faut aller rapidement voir un orthophoniste", conseille Laurent Lagarde, lui-même bègue depuis qu'il a 5 ans. "Souvent, le problème peut être bénin et rapidement résolu". Autre chose à avoir en tête, toute pression, toute tension peut renforcer le bégaiement. "Il faut absolument que l'entourage, la famille ne cache le bégaiement", assure Laurent Lagarde, qui a créé un blog qui regorge de conseils sur la maladie. "C'est souvent une honte pour les personnes qui sont atteintes de bégaiement. Il ne faut pas en plus que cela soit un tabou". Dernier conseil, misez sur les réseaux sociaux. "Cela m'a énormément aidé", confie Cédric, 49 ans, qui "a eu l'impression jusqu'à ses 35 ans d'être un peu seul à souffrir de bégaiement".
Comment soigner le bégaiement ? Première chose essentielle à avoir en tête à ce stade, il n'existe pas encore de médicament pour traiter le bégaiement. La méthode la plus connue pour affronter ce trouble de l'élocution reste l'orthophonie. "Les thérapies orthophonistes vont travailler sur les peurs (comme par exemple la phobie du téléphone pour les bègues, ndlr) et sur la parole elle-même", explique Laurent Lagarde. "Cela va permettre à la personne de ne pas changer sa parole mais à sortir progressivement du bégaiement". Il existe ensuite les thérapies cognitives et comportementales qui vont, grâce à des jeux de rôle, déconstruire les fausses croyances des bègues comme l'impossibilité de prendre la parole en public ou le jugement des autres.
Pour soigner le bégaiement, d'autres personnes vont préférer suivre des psychothérapies plus profondes. Il existe aussi la possibilité de faire des séances de sophrologie ou de relaxation.
Comment doit-on réagir face à un bègue ? "Lorsque vous êtes face à une personne qui bégaie, évitez de froncer les sourcils ou de grimacer, cela ne va pas la mettre en confiance et la stresser davantage", avertit Laurent Lagarde. "Il faut être vraiment dans l'écoute et prendre soin de ne pas couper la parole". Prenez aussi soin de montrer l'exemple de votre côté. "Il est important que la personne qu'on a en face de nous s'exprime aussi calmement", poursuit Cédric. "Parlez-nous tranquillement, pour qu'on puisse avoir le temps de s'insérer dans la discussion". Laurent Lagarde a un dernier message à nous adresser : "évitez de finir nos phrases, très peu de personnes aiment cela. On n'est pas des enfants !"