Les agressions contre les pompiers s'envolent : "Ils voulaient nous tuer"

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Lionel Gougelot, édité par R.Da. , modifié à
Le nombre de sapeurs-pompiers ayant déclaré avoir été agressés a augmenté de 17% en 2016, selon le rapport de l’Observatoire national de la délinquance. 
TÉMOIGNAGE

Les agressions contre les pompiers sont de plus en plus nombreuses. Les chiffres de l’Observatoire national de la délinquance que s’est procuré Europe 1 pointent une augmentation de 17% en 2016. Ainsi, l'année dernière, 2.280 sapeurs-pompiers ont été victimes d'une agression contre 1.939 en 2015, selon la même source. Les arrêts de travail ont également bondi de 36,5%, notamment dans les Hauts-de-France où les soldats du feu sont confrontés au quotidien à des situations de plus en plus extrêmes. Avec 366 agressions en 2016, il s'agit de la région la plus touchée par ce phénomène juste derrière la Nouvelle-Aquitaine (406 agressions déclarées). En conséquence, les forces de l'ordre sont amenées, dans certaines zones, à encadrer les interventions. 

"Casser du pompier". Hugues est pompier à Roubaix dans le Nord, il se souvient auprès d'Europe 1 d'une intervention qui a failli mal tourner. Ce soir-là, dans une HLM de la ville, avec trois de ses collègues, il vient au secours d'un jeune homme victime d'un malaise après un jet de lacrymogènes lors d'une intervention de police mouvementée. Mais en quelques secondes, la victime et son frère se transforment en agresseurs. "Ils ont pris un extincteur qu'ils ont trouvé à côté d'eux et nous ont mis des coups. C'était pour casser du pompier, on peut le dire", explique ce sapeur qui décrit ses agresseurs comme "méchants et déterminés". "Je pense qu'ils voulaient nous tuer", ajoute-t-il.

Des délais d'intervention rallongés. Les trois pompiers s'échappent finalement de justesse. Mais les scènes de ce type se multiplient aujourd'hui, comme lors de cette autre nuit où, sur un feu de voiture, un individu pointe une kalachnikov sous l'œil du pompier, l'obligeant à quitter le quartier. Désormais, à Roubaix, toutes les interventions se font avec la boule au ventre. "Maintenant la police vient nous chercher au portail de la caserne avant l'intervention. On ne quitte plus la caserne avant l'arrivée de la police, donc les délais d'intervention sont rallongés. Les gens doivent attendre quinze à vingt minutes à cause de l'insécurité. C'est inconcevable d'en arriver là", relève Hugues. "On n'a pas fait pompier pour être agressé. On est là pour sauver des gens, et là on se retrouve pris pour cibles et victimes".

De nombreuses démissions. Une situation qui crée un profond malaise chez les soldats du feu, jusqu'à nourrir des crises de vocation. "La direction a embauché un psychologue du travail, il est là à plein temps parce qu'il y a du boulot. Il y a une véritable souffrance au travail, et il y en a plein qui démissionnent parce qu'ils sont dégoûtés d'être pompiers", déplore Hugues, toujours auprès d'Europe 1. À chaque agression une plainte est déposée, et bien que la justice se montre de plus en plus sévère avec ce type de cas, le pompier assure que l'insécurité persiste.