Mal voyante, ses enfants ont été placés : "Je ne supporte pas la séparation"

  • Copié
Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
Les enfants de Stéphanie, âgés de 17 et 12 ans, ont été placés, en raison de sa malvoyance et de sa supposée déficience intellectuelle. Au micro de Sabine Marin, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Stéphanie confie ne pas supporter la séparation avec ses enfants et raconte son combat pour récupérer leur garde.
TÉMOIGNAGE

Stéphanie est mal voyante depuis sa naissance. Elle raconte que ses enfants, âgés de 12 et 17 ans, ont été placés, notamment en raison de son handicap visuel et de sa supposée déficience intellectuelle. Stéphanie aimerait récupérer la garde de ses enfants, mais dit ne pas être aidée par l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Cela s’ajoute au choc émotionnel causé par le suicide de son père, il y a une trentaine d’années. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Stéphanie confie ne pas supporter la séparation avec ses enfants. 

"Je suis mal voyante de naissance. Enfant, j’ai été placée parce que mon papa est mort en 1985. Ma mère voulait divorcer et mon père ne voulait pas, il s’est jeté du dix-septième étage. Ça a été un choc. Je ne peux pas faire mon deuil parce que je ne suis pas allée à son enterrement. On était proches. Je suis suivie par une psychologue. Elle dit que j’ai un choc émotionnel. Je pense toujours à lui, il est toujours dans mon cœur.

" L’éducatrice a voulu les placer en raison de mon handicap visuel "

J’ai eu deux enfants avec mon ex-compagnon. Je vivais en région parisienne et depuis un an, je vis à Valence avec mon nouveau compagnon. Cela va faire cinq ans qu’Alexis est placé à Villemomble, dans le 93. Joëlle est dans une école spécialisée à Drancy. Alexis a 12 ans et Joëlle a 17 ans. Elle est épileptique depuis sa naissance. Elle a été dans le coma, on a failli la perdre. J’ai l’impression que ma vie est totalement bouleversée. J’ai du mal à me remettre. Mon compagnon me donne de la force. S’il n’était pas là, je ne sais pas ce que je serais.

L’ASE (Aide sociale à l’enfance) nous met des bâtons dans les roues. J’essaye de tout faire pour récupérer mes enfants. Je le vis mal. C’est l’éducatrice qui a voulu les placer en raison de mon handicap visuel. Ils ont fait une expertise et ont dit que j’avais aussi une déficience intellectuelle, je ne sais pas où ils sont allés chercher ça. Ils ont vu que ça ne se passait pas normalement au niveau scolaire et ont dit que, soi-disant, je ne faisais pas assez pour mes enfants.

" Parfois, je vais me cacher pour pleurer "

Au mois de février, Alexis est parti avec le centre dans le Jura. Il a fait un malaise et a été transporté à l’hôpital. Il avait mal à la tête, vomissait et était paralysé. Les médecins redoutaient un AVC. J’ai fait des pieds et des mains pour aller voir mon fils, mais le centre ne voulait pas. Le juge m’a donné l’autorisation. En réanimation, il a été très bien accueilli, j’ai pu poser mes questions. Quand il est passé en médecine pédiatrique, ça a été l’horreur. On a dit que je manipulais mes enfants et que je ne voulais pas voir qu’ils grandissaient. 

Pour une maman, ne pas voir ses enfants, c’est horrible. Je n’ai pas vu mon fils depuis le mois de février et j’en souffre. Parfois, je vais me cacher pour pleurer. Je ne suis pas trop aidée. Le juge ne veut pas nous écouter et moi, je ne connais pas les lois, je ne sais pas comment m’y prendre. En plus, le papa ment et n’ose pas dire les choses. Je me pose des questions. J’ai rencontré quelqu’un de formidable qui me pousse, mais je me demande si je vais avoir droit au bonheur. Je me bats, mais par moments, je me dis que je vais tout arrêter.

J’aimerais récupérer mes enfants. J’essaye d’inscrire ma fille dans une école à Valence. Je suis passée en audience pour Alexis le 22 mai. J’ai l’impression que les audiences ne servent à rien. On ne nous écoute pas. Avec le centre de Joëlle, ça se passe très bien, on a une bonne communication. Mais avec l’ASE et le centre d’Alexis, le dialogue ne passe pas. Je ne sais plus où donner de la tête, je ne dors plus, je fais des cauchemars avec tout ce que j’ai vécu.

J’essaye de me rebâtir après tout ce que j’ai vécu. C’est ce qu’on essaye de faire avec la psychologue. Le traumatisme est là et on ne pourra pas l’enlever comme ça. J’aime beaucoup partager avec mes enfants. Mon plus beau cadeau, c’est de me dire qu’ils sont là et que je les aime. Ça me manque de ne pas les prendre dans mes bras et de ne pas partager plein de choses. Je ne supporte pas la séparation. J’essaye de chercher toutes les solutions possibles."