Mickaël, 42 ans, claustrophobe : "mon cerveau me bloque pour tout"

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Grégoire Duhourcau
Mickaël, claustrophobe depuis son divorce, tente de combattre cela grâce à une thérapie par la réalité virtuelle. "Ça va beaucoup mieux, mais ce n'est pas encore guéri", confie-t-il à Olivier Delacroix sur Europe 1.
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Mickaël, 42 ans, est victime de claustrophobie. Que ce soit, le métro, l'ascenseur ou l'avion, il lui est insupportable de se trouver dans un espace clos. S'il l'était "légèrement" avant, cela s'est accentué au moment de son divorce. Il explique à Olivier Delacroix sur Europe 1, comment il tente de combattre sa phobie grâce à une thérapie par la réalité virtuelle.

"Je suis claustrophobe depuis cinq, six ans. Avant, je l'étais légèrement et depuis cinq, six ans ça s'est accentué. [C'est venu] progressivement. Je pense que c'est suite à un divorce. Je me suis retrouvé seul avec mon fils donc je pense que ce sont les différents soucis de la vie qui ont fait que je m'inquiétais beaucoup et que je m'inquiète encore beaucoup.

L'avion c'est terminé. J'espère qu'avec la réalité virtuelle ça va aller mieux. Le métro, [je ne le prends] pratiquement plus du tout. L'ascenseur, à part celui de chez moi, je ne le prends pas. Voitures trois portes, tout ce qui est un petit peu serré, enfermé... Je crains tout ça.

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"Mon cerveau a complètement pris possession de moi et il me bloque pour tout"

Les gens ne comprennent pas ce qu'on a. Ils pensent qu'on plaisante, ils pensent que ça va passer, que c'est du cinéma. Mais quand vous nous voyez dans l'état où on fait la crise, c'est très grave. C'est là où les gens comprennent qu'on ne plaisante pas. C'est la vérité devant eux. On devient vraiment une autre personne, on est pris de manque de respiration, on est ailleurs.

On est en totale crise de panique, c'est vraiment ça. Personne ne peut rien faire, vous avez une peur atroce de mourir, de rester enfermé. Les personnes autour de vous vont vous dire : 'Calmez vous.' C'est encore pire, c'est une phrase à ne pas dire pour nous.

Quand j'ai des réunions de travail, j'ai du mal à rester confiné dans la pièce. Il faut absolument que je sois près de la sortie ou de la fenêtre, dans les centres commerciaux, je monte tout à pieds, dans une voiture, il faut que je sois vraiment ou au volant ou à côté. Mon cerveau a complètement pris possession de moi et il me bloque pour tout.

"Ça va beaucoup mieux mais ce n'est pas encore guéri"

C'est pour cela que je suis en train de suivre une thérapie [avec un médecin qui pratique la réalité virtuelle pour soigner les phobies]. Au départ, on a dix séances. Les cinq premières sont des séances de groupe, entre six et dix personnes. Nous, on était sept. Chacun expose sa phobie et le docteur, le docteur Malbos, nous donne différents moyens de parer aux phobies. Il y a différentes méthodes, différentes choses à faire si une crise vous arrive.

C'est en train de marcher. J'arrive à prendre l'ascenseur un peu mieux, le métro un peu plus. C'est encore dur mais ça va mieux. Là, je suis à mon avant-dernière séance seul. J'ai déjà fait plusieurs fois la réalité virtuelle dans un métro, dans un avion long courrier, petit courrier, dans un ascenseur, dans une pièce fermée... Tout ça, ce sont les situations dans lesquelles je suis plongé et je dois, grâce aux méthodes qui m'ont été données, les appréhender au mieux.

[Ces séances] m'ont aidé, elles m'aident, mais ce n'est pas encore guéri. Au fur et à mesure que les situations vont arriver, je vais devoir appliquer les différentes méthodes qui m'ont été inculquées par le docteur. Le problème, c'est que la situation dans l'avion, je ne peux pas [y être confronté] tous les jours. Donc je verrai sur un vol, pour aller en Corse par exemple, qui est le vol le plus court depuis Marseille (où il habite, ndlr). Par contre, je peux faire l'essai sur le métro, l'ascenseur. Mon entourage a vu que ça allait mieux. Ça va beaucoup mieux, mais ce n'est pas encore guéri. Il paraît qu'il faut du temps."

L'avis du docteur Eric Malbos, psychiatre, chercheur et designer 3D au service de psychiatrie du professeur Lançon à l'hôpital de la Conception de Marseille :

"Il y a différentes causes possibles [aux phobies]. Ça ne remonte pas forcément à l'enfance. Il peut s'agir d'un traumatisme direct. Un accident de voiture, le fait d'avoir vécu une panne d'ascenseur, des turbulences importantes dans un avion, la morsure d'un chien, peuvent suffire, par le traumatisme que [ces situations] provoquent, à créer une phobie. L'autre cause, c'est quand vous êtes témoin d'un incident traumatisant, d'un accident de voiture ou quand vous voyez une personne qui est blessée. La troisième cause possible, c'est le stress. Ce n'est pas un événement précis mais quand à votre travail, quand vous avez des soucis d'argent ou de santé et que ça provoque un stress chronique sur des mois, cela peut aussi déboucher sur une phobie. Enfin, la quatrième cause possible, ce sont les fausses informations. C'est-à-dire quand les parents vont donner de fausses informations à leurs enfants, comme par exemple, 'ne rentre pas trop tard ce soir sinon tu vas te faire violer', 'ne nage pas trop loin sinon tu vas te noyer'. Ces phrases font croire à l'enfant que l'environnement est hostile et peuvent déboucher, une fois adulte, sur la phobie.

[La thérapie par la réalité virtuelle que suit Mickaël], c'est simple. C'est un casque de réalité virtuelle classique que vous mettez sur la tête. [Il est] connecté à un ordinateur qui va lancer les environnements virtuels qui représentent ce que redoutent les patients. Une personne qui a peur des chiens, on va lui montrer un chien en 3D. On ne l'expose jamais d'emblée. On apprend d'abord des techniques de relaxation, de gestion des émotions, des stratégies d'action [au patient] pour qu'il soit prêt. Une fois qu'il est prêt, on l'expose, mais en douceur. C'est précisément l'avantage de la réalité virtuelle, c'est que tout se fait doucement. On commence par un avion vide, sans passagers, qui reste au sol, on commence par une toute petite araignée dans un bocal, on commence par un chien très calme. Comme vous pouvez créer n'importe quel environnement virtuel avec l'ordinateur, vous pouvez traiter toutes les phobies et par exemple, il y a quelques semaines, j'ai traité une phobie des requins."