Environ un enfant sur 100.000 qui naît en France est hermaphrodite ou intersexe. Jusqu'à présent, l'état civil ne reconnaissait pas ce genre obligeant à inscrire "sexe masculin" ou "sexe féminin" sur l'acte de naissance. Mais en reconnaissant l'existence d'un "sexe neutre", la décision du tribunal de grande instance de Tours change la donne.
Une réalité biologique. Les personnes hermaphrodites ou "intersexe" naissent avec des organes génitaux non différenciées : leur corps possède les attributs des deux sexes mais atrophiés. Dans le cas tranché par la justice, la personne déclarée de sexe masculin à la naissance est ainsi née, selon son médecin, avec un "vagin rudimentaire" et un "micropénis" mais pas de testicules.
Comme souvent dans ce genre de cas, c'est à l'adolescence que la personne, aujourd'hui âgée de 64 ans, a pris conscience qu'elle n'était pas un homme : sa pilosité et ses muscles ne se sont pas développés.
Une décision qui offre du temps pour décider. Si la personne a décidé d'aller en justice, c'est pour faire partie de la société. Cette décision de justice pourrait ouvrir la voie pour tous les enfants qui naissent ainsi. Actuellement, en effet, lorsque ce genre de naissance survient, tout le monde est démuni : les médecins mais aussi les parents. Dans la majorité des cas malheureusement, l'entourage est pressé de choisir rapidement et arbitrairement le sexe de leur enfant. Une décision qui s'accompagne d'opérations chirurgicales parfois radicales et des traitements hormonaux.
Avec ce précédent et cette reconnaissance administrative, les parents vont disposer d'un peu de temps pour comprendre ce qui arrive à leur enfant, pouvoir en parler avec lui et décider plus sereinement de sa vie à venir. La psychologue Pascale Moulinier estime ainsi que cela va permettre "de ne pas se précipiter chirurgicalement" : "c'est souvent un désarroi pour les parents lorsque l'on vous annonce que votre enfant n'est ni une fille, ni un garçon. Avoir la possibilité de désigner des 'troisième sexe', c'est la possibilité d'envisager l'arrivée d'un enfant qui n'est pas immédiatement normé dans le masculin ou le féminin, d'une manière moins dramatique et plus facile pour ses parents", a-t-elle expliqué sur Europe1.
Le tribunal de grande instance de Tours a ordonné à l'état civil de la mairie de Tours de modifier l'acte de naissance d'une personne intersexuée mais enregistrée comme étant de sexe masculin pour y apposer la mention "sexe neutre", dans un jugement rendu le 20 août 2015. Craignant que "cette requête renvoie à un débat de société générant la reconnaissance d'un troisième genre", le parquet de Tours a fait appel du jugement. L'affaire sera plaidée devant la cour d'appel d'Orléans.