Les syndicats de surveillants de prison se disaient mercredi hostiles à l'accès en prison à des téléphones "bridés", évoquée par la garde des Sceaux la veille, alors que l'Observatoire international des prisons appelle au contraire à les "généraliser". Face aux critiques, le ministère de la Justice a assuré mercredi qu'il n'avait "jamais été question" d'autoriser les téléphones portables en prison, s'efforçant d'éteindre une controverse déclenchée par des propos de la Garde des sceaux dans un journal local.
"Un téléphone bridé, ça se débride". "En l'état actuel, c'est suicidaire", a ainsi réagi David Calogine, secrétaire général adjoint de l'UFAP-UNSA, syndicat majoritaire chez les surveillants. Les détenus "ont toujours deux ou trois coups d'avance sur nous. Un téléphone bridé, ça se débride", déclare-t-il, assurant que les portables servent à certains détenus pour "faire leurs petits trafics" depuis les cellules ou "faire pression sur les familles avant les procès." "On a déjà du mal à contrôler les téléphones fixes", dit encore le syndicaliste, également hostile à toute "extension" de ces derniers.
Améliorer plutôt l'accès téléphonique pour les familles. Christopher Dorangeville, secrétaire général de la CGT pénitentiaire, considère lui qu'il "faut améliorer l'accès téléphonique pour les familles, mais pas avec des portables". "On manque de moyens humains, matériels, législatifs. Alors pour résoudre le problème, on légalise. J'ai du mal à croire que ce sera extrêmement efficace. Des téléphones bridés, ça peut se débrider. Est-on sûr que technologiquement ça tient ?", s'interroge-t-il, en rappelant que la France a interdit les fouilles systématiques au parloir.
Un outil pour la prévention du suicide. "L'usage du portable devrait être généralisé", plaide au contraire François Bes, de l'Observatoire international des Prisons (OIP). "L'immense majorité des détenus ne s'en sert que pour garder un lien familial. Cela aide aussi à la prévention du suicide", assure-t-il, en relevant par ailleurs que l'accès aux téléphones fixes en prison est restreint et coûteux.
Seulement des lignes fixes pour Nicole Belloubet. "Il faut donner aux détenus des moyens de communication. Par des portables contrôlés ou des lignes fixes", a déclaré la ministre de la Justice Nicole Belloubet dans un entretien diffusé mardi par La Provence. S'efforçant d'éteindre une controverse déclenchée par ces propos, le ministère de la Justice a assuré mercredi qu'il n'avait "jamais été question" d'autoriser les téléphones portables en prison.
Il n'a "jamais été question d'autoriser les portables", a affirmé le ministère de la Justice, indiquant que Nicole Belloubet était seulement favorable à une "extension" des téléphones fixes, telle qu'expérimentée depuis un an dans la prison de Montmédy en Meuse.
Des téléphones "bridés". Elle a évoqué des suggestions faites par le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, Adeline Hazan, le 17 août au micro de France Inter. Cette dernière recommande d'autoriser en prison des téléphones portables "bridés" qui "ne peuvent atteindre que quelques numéros vérifiés", et dotés d'un accès internet lui aussi restreint. 19.339 téléphones portables et accessoires (puces, chargeurs etc.) ont été découverts en détention au premier semestre 2017, selon l'administration pénitentiaire.