Tariq Ramadan accusé de viols : ce que disent les plaignantes, ce qu'il répond

Tariq Ramadan est accusé par au moins quatre femmes (photo d'illustration).
Tariq Ramadan est accusé par au moins quatre femmes (photo d'illustration). © MEHDI FEDOUACH / AFP
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avec Salomé Legrand , modifié à
L'islamologue, désormais accusé de viols par au moins trois femmes en France et une en Suisse, opère un changement dans sa ligne de défense en reconnaissant une relation qu'il dit consentie.

 

Son traitement médical n'est toujours pas jugé "incompatible" avec la détention provisoire. Une nouvelle expertise médicale, déposée mercredi chez les juges d'instruction, conclut que Tariq Ramadan souffre bien d'une sclérose en plaques mais peut bénéficier de son traitement en prison. Écroué en février après sa mise en examen pour deux viols présumés, l'islamologue reste donc au centre pénitentiaire de Fleury-Mérogis, dans l'Essonne. En parallèle, les accusations contre lui se multiplient et sa ligne de défense semble entamer une évolution. Europe 1 fait le point.

  • La plainte déposée par Henda Ayari

Ce que dit la plaignante. Henda Ayari accuse Tariq Ramadan de l'avoir violée dans un hôtel Parisien, en 2012. Elle est la première à avoir porté plainte contre lui, en octobre dernier. Ancienne salafiste devenue militante féministe, la quadragénaire affirme que les faits se sont déroulés sous la contrainte, après une conférence animée par l'intellectuel. Elle a été auditionnée par les enquêteurs, mais aucune confrontation n'a pour l'instant été organisée. Sur Europe 1, elle s'est dit "prête" à s'expliquer face à celui qu'elle accuse.  

Ce que répond Tariq Ramadan. L'islamologue nie les faits et a déposé plainte pour "dénonciation calomnieuse" à l'encontre de Henda Ayari. D'après son avocat, Me Emmanuel Marsigny, plusieurs éléments déjà recueillis par les enquêteurs fragilisent le récit de la plaignante : dans la chambre d'hôtel qu'elle décrit, que les enquêteurs ont pu retrouver, "l'agencement, qui n'a pas changé depuis 2012, ne correspond pas" aux faits décrits. Une amie qui l'a hébergée au lendemain de l'agression présumée se souvient en outre d'une femme "épanouie" et non choquée.

  • La plainte déposée par Christelle*

Ce que dit la plaignante. Une deuxième femme, handicapée à la jambe, accuse également Tariq Ramadan de l'avoir violée dans un hôtel, à Lyon en 2009. Le mode opératoire qu'elle décrit est proche de celui évoqué par Henda Ayari. Les faits, "d'une grande brutalité", se seraient également déroulés en marge d'une conférence de l'intellectuel. Devant les enquêteurs, Christelle a évoqué une cicatrice sur l'aine de Tariq Ramadan, indécelable sans un contact rapproché. Pour ces faits, le parquet a retenu le chef de viol sur personne vulnérable.

Ce que répond Tariq Ramadan. Confronté à cette femme, il a reconnu avoir flirté avec elle par le biais des réseaux sociaux, mais dit ne l'avoir rencontrée que brièvement dans le hall de l'hôtel lyonnais qu'elle évoque. Me Emmanuel Marsigny explique quant à lui avoir fourni aux enquêteurs une photo prise le jour des faits présumés, remettant en cause la version de Christelle. "Alors qu'elle prétend avoir été séquestrée dans la chambre d'hôtel pendant que M. Ramadan faisait une conférence, il semblerait en fait qu'elle soit assise au quatrième rang", explique l'avocat. Europe 1 a pu consulter cette photo et constater qu'une femme pouvant ressembler à Christelle se trouvait bien dans la salle, sans pouvoir affirmer qu'il s'agit de la plaignante. Me Eric Morain, son avocat, répond quant à lui que "ce n'est évidemment pas elle" et précise qu'elle "portait le foulard à l'époque, ce qui n'est pas le cas sur la photo"

A noter également que les enquêteurs n'ont pour l'instant pas pu trouver de témoins se souvenant avoir vu Christelle les vêtements déchirés et le visage tuméfié dans le bus qu'elle affirme avoir pris après son agression.

  • La plainte déposée par Marie*

Ce que dit la plaignante. Mère de famille, quadragénaire, elle accuse l'islamologue de viols, de violences, de menaces et de chantage. Les faits remonteraient aux années 2013 et 2014, mais sa plainte n'a été déposée que début mars dernier. Contrairement aux deux premières plaignantes, Marie, ancienne escort-girl, rapporte des faits répétés, qui se seraient produits dans différents hôtels dont elle a conservé les notes et numéros de chambre. Des captures d'écran des messages qu'elle attribue à Tariq Ramadan, un enregistrement sonore ressemblant à une liste d'instructions sexuelles qu'il lui aurait donnée et une photo prise dans un lit ont été fournis aux enquêteurs.

Ce que répond Tariq Ramadan. Selon les informations d'Europe 1, Tariq Ramadan, marié et qui nie toute relation sexuelle avec les deux premières plaignantes, reconnaît en avoir entretenu une avec cette troisième. "Mais ça n'est pas celle qu'elle décrit", explique l'avocat de l'islamologue, Emmanuel Marsigny. Une robe que Marie dit tachée du sperme de Tariq Ramadan doit prochainement être expertisée dans ce volet du dossier.

  • La plainte déposée en Suisse

Ce que dit la plaignante. Une Suissesse d'une cinquantaine d'années demande à la justice helvétique de poursuivre le prédicateur pour l'avoir violée et retenue contre son gré pendant plusieurs heures à Genève en 2008, toujours dans une chambre d'hôtel. "J'ai eu peur de mourir, j'étais terrifiée et paralysée", raconte-t-elle dans son témoignage, publié par La Tribune de Genève. La multiplication des actions en justice contre l'islamologue l'aurait poussée à porter plainte à son tour, la semaine dernière.

Ce que répond Tariq Ramadan. Le défenseur français de l'intellectuel ne s'est pas encore exprimé sur cette plainte. Interrogé par La Tribune de Genève, Yaël Hayat, l'une des avocates de Tariq Ramadan en Suisse, a dit ne pas être au courant de cette affaire.

Une plainte aux Etats-Unis selon Libération

Début mars, le journal affirmait qu'une plainte avait également été déposée contre Tariq Ramadan outre-Atlantique, cette fois pour "agression sexuelle". Le quotidien fait le récit d'une rencontre dans un hôtel, au cours de laquelle le théologien aurait "placé son pénis dévêtu" contre la poitrine d'une Américaine de confession musulmane. Une enquête serait en cours aux Etats-Unis.

*Prénoms d'emprunt