Noël Le Graët, invité d'Europe 1 samedi soir. 2:51
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Le président de la Fédération française de football était l'invité exceptionnel d'Europe 1 Sport samedi soir. Face aux auditeurs, il s'est confié sur de nombreux dossiers, passés, en cours ou à venir. Un entretien en longueur où le dirigeant de la FFF redétaille sa vision et évoque les hommes forts du football français.

C'est un entretien exceptionnel qu'a livré Noël Le Graët, le président de la Fédération française de football samedi soir Face aux auditeurs d'Europe 1 Sport. Pendant près d'une heure, l'homme fort du football français, à la tête de la "3F" a évoqué tous les sujets, du racisme dans le football à sa relation avec Labrune et Aulas, en passant par sa propre succession à la tête de la FFF ou l'avenir de Didier Deschamps. Noël Le Graët a répondu à toutes les questions de Lionel Rosso et de nos quatre auditeurs. Morceaux choisis. 

L'affaire PSG-OM, "regrettable mais pas préjudiciable"

Comment commencer l'interview du patron du foot français sans évoquer les vives tensions qui ont animé le PSG-OM du 13 septembre (0-1), marqué par quatorze cartons jaunes et cinq rouges ? "On regrette ce genre d'incidents, bien évidemment. C'est un match finalement qui s'est mal terminé alors que le spectacle n'était pas de mauvaise qualité. C'était serré", a-t-il d'abord commenté sur le match en général. "Vous savez, les joueurs vont de toute façon passer en commission de discipline de la ligue. Ils sont sûrement sanctionnés."

Le président de la Fédération refuse cependant de voir ce match comme une vitrine du foot français. "On ne peut pas le juger au travers d'un match et surtout de gestes comme cela. Je pense que c'est regrettable, mais pas préjudiciable. On oubliera très vite : le PSG va se remettre à marquer des buts et on oubliera."

Le racisme dans le football

Quinze jours après l'avoir dit une première fois, Noël Le Graët l'a réaffirmé sur Europe 1 : "Le football n’est pas raciste". Le président de la FFF s'était exprimé sur le sujet deux jours après le très tendu PSG-OM. "Dans les vestiaires les joueurs s'entendent bien. Il peut y avoir des chamailleries mais entre les blancs et les noirs il n'y a pas de différence. On ne peut pas tout contrôler, notamment les spectateurs. Mais le football n'est pas raciste. Les joueurs sont fiers d'appartenir à un club et en général il n'y a aucun écart entre les joueurs", a-t-il jugé.

"Aucun regret" sur l'arrêt de la Ligue 1 en mars

"Je ne regrette pas cette décision. C'est une très bonne décision, parce que c'est un problème de santé, on n'est pas uniquement dans le football", a redit Noël Le Graët à propos de l'arrêt de la Ligue 1 en mars, à cause de la crise sanitaire liée au coronavirus. "C'est une décision qui a été prise en concertation avec l'État, le Premier ministre et le ministère de la Santé", rappelle le président de la Fédération française de football. "On peut comprendre que certains n'aient pas apprécié, mais je n'ai aucun regret. Je trouve que c'était la meilleure décision à l'époque, et elle n'était pas facile à prendre. Par rapport à la maladie, vous savez, ça m'est égal qu'on rate un match d'une importance capitale". 

Un stade sans spectateurs, "ce n'est pas le même football"

Si le football a repris ses droits à peu près partout, certains regrettent en France le manque de spectateurs autorisés dans les stades, avec des jauges autorisées allant de 1.000 à 5.000 personnes selon les villes. "Il faut tenir compte du Covid, c'est dramatique. Ce n'est pas le même football, qu'on le veuille ou non", opine le Breton, qui a fait partie des rares personnes présentes lors du match France-Croatie. Mais il salue tout de même "l'effort fait en France", alors que "pour le moment, l'UEFA, c'est zéro partout en Europe. Tous les matchs internationaux, quel qu'il soit, il n'y a personne" dans les stades.

Sur sa succession à la tête de la FFF

Son mandat prenant fin au printemps 2021, Noël Le Graët a aussi commenté les élections à la FFF qui se profilent et la question de sa re-présentation. "Franchement, je n'ai pas pris de décision. Lorsque le plateau électoral sera en place, j'aviserai", a-t-il répondu. Le président a évoqué ses possibles successeurs, comme Marc Keller, son "copain de Strasbourg, remarquable". "Il y en a d'autres et c'est extrêmement large", a-t-il aussi constaté. Quid de Didier Deschamps et Michel Platini, deux anciens footballeurs au profil adapté pour tenir les rênes de la Fédération ? "Didier, il devrait l'être un jour, il est très bon. Je le taquine souvent", a répondu Noël Le Graët, qui juge cependant que ce n'est pas encore le moment pour l'actuel sélectionneur. "Michel Platini, je l'ai un peu perdu de vue. Je ne sais pas s'il en a envie, mais je ne crois pas. Je ne veux pas dire qu'il ne ferait pas un excellent président, ce n'est pas du tout ça. Mais je l'ai un peu perdu de vue et je ne connais pas ses intentions." 

Un "intérêt commun" avec Vincent Labrune

S'il préférait l'option Denisot - "Michel est un ami de longue date" -, Noël Le Graët compte travailler en bonne intelligence avec Vincent Labrune, qui a été élu président de la Ligue de football professionnel (LFP). "Le rôle de la Fédération et de la Ligue, c'est d'avoir une entente cordiale. D'abord d'avoir les mêmes objectifs", souligne-t-il. "Il a été élu (...) C'est normal qu'on ait des relations amicales d'abord, puis ensuite qu'on étudie ensemble les projets dans l'intérêt commun du football. En tout cas, je vais faire les efforts normaux. Je crois qu'on a un intérêt commun, je ne vois pas pourquoi on n'arriverait pas à trouver le même chemin sur des dossiers qui sont parfois difficiles."

"On a besoin" de Nasser Al-Khelaïfi

Quelques jours après les réquisitions du parquet suisse visant Nasser Al-Khelaïfi, le président de la FFF s'est montré prudent, et a tenu à souligner le professionnalisme du président du PSG, inquiété par la justice en tant que président de beIN Médias. "Pour le moment, il faut voir cette affaire avec un recul important (...) ça risque de durer quelque temps", avec "appel et contre-appel", a répondu Noël Le Graët. "On a besoin de lui (...) Il est très présent [dans les instances, ndlr]. Bizarrement, contrairement à ce que pensent beaucoup de personnes, il n'en rate aucune réunion et n'hésite pas à donner son avis. Il accepte la contradiction et il est plutôt plutôt loyal", poursuit le président de la FFF.

Jean-Michel Aulas, "un bon copain" qui "aime bien titiller"

Il le dit sans se forcer, Jean-Michel Aulas "est un bon copain". C'est donc tout naturellement que Noël Le Graët explique qu'il n'en veut aucunement au président de l'Olympique lyonnais, pourtant pas toujours tendre avec lui sur les réseaux sociaux. "D'abord, je ne lis pas tout, sinon vous ne vous en sortez pas. C'est un grand dirigeant. On peut critiquer Aulas pour des prises de position... il aime bien les médias, il aime bien titiller. Ceci dit, tout le monde doit reconnaître le mérite de cet homme qui est en place depuis pas mal d'années, avec un club propriétaire de son stade et les filles qui ont peut-être la meilleure équipe du monde"...

 

"Ses écarts de langage, je n'y fais pas très attention. Il n'y a jamais eu de méchanceté, j'ai du respect pour lui et je suis certain qu'il en a pour moi. Ceci dit, combien de fois je lui ai dit d'arrêter de tweeter, de bavarder tous les jours..."

Didier Deschamps "est remarquable dans sa fonction"

Question récurrente : jusqu'à quand Didier Deschamps sera-t-il le sélectionneur de l'équipe de France de football ? La réponse de Noël Le Graët, une nouvelle fois, n'est pas surprenante : "On est encore loin de 2022, ça paraît tout près comme ça, mais quand on regarde, il y a avant cela des compétitions importantes, avec l'Euro et les qualifications pour le Qatar [où se jouera la Coupe du monde en 2022, ndlr]". "Didier Deschamps est remarquable dans sa fonction, il a réussi des performances exceptionnelles. J'ai confiance en lui, on a une aventure commune depuis 7-8 ans, on s'entend bien. J'ai du respect pour ce qu'il fait et il a une maîtrise totale de son groupe. Les joueurs l'apprécient", a commenté Noël Le Graët. Quid de son successeur, qui pourrait être Zinédine Zidane ? "Il faut toujours laisser le temps au temps. Didier est en place. On parlera de ça plus tard."

Il salue le travaille de Corinne Diacre et regrette l'attitude de Bouhaddi

Les Bleues ont également été au menu de l'interview du patron du foot français. L'occasion pour lui de saluer les bons résultats de l'équipe dirigée par Corinne Diacre. "Corinne travaille beaucoup. Elle a pris une équipe avec de fortes personnalités, elle a essayé un certain nombre de jeunes qui poussent, ça a pu contrarier certaines joueuses mais je trouve que les résultats sont plus qu'honorables".

Noël Le Graët a par ailleurs regretté l'attitude de l'expérimentée gardienne des Bleus et de l'OL Sarah Bouhaddi, qui a annoncé ne plus vouloir porter la tunique nationale tant que Corinne Diacre serait sélectionneuse. "J'ai bien cette femme, mais elle s'est punie toute seule parce que le maillot de l'équipe de France, c'est quelque chose. Donc elle a totalement tort", a-t-il estimé. 

Son "rêve" de voir un Algérie-France à Alger

Le patron de la "3F" s'est montré plutôt pessimiste à l'idée de voir un Algérie-France en Algérie. "Ça fait huit ans que je suis à la Fédération, j’ai toujours souhaité aller à Alger. On n’a jamais réussi à trouver un accord. Le président de la Fédération algérienne le souhaitait, mais je ne suis pas certain que l’État algérien le souhaitait vraiment", a-t-il jugé. "C’est un rêve pour moi d’aller jouer en Algérie. Je ne sais pas si sur la durée de mon mandat j’aurais le temps.

Mais c’est une proposition que j’ai faite à plusieurs reprises aux dirigeants algériens", a poursuivi Noël Le Graët, alors que les deux équipes ne se sont affrontées qu'une seule fois, en octobre 2001 au Stade de France. Un match qui avait été interrompu après l'envahissement du terrain par des supporters algériens alors que les Bleus de Zidane, champion du monde et d'Europe en titre menaient 4-1.

Karim Benzema "n'est pas suspendu par la Fédération", mais...

Karim Benzema reviendra-t-il un jour en équipe de France ? "Il n'est pas suspendu par la Fédération, le sélectionneur a tous les droits de former l'équipe qu'il souhaite", a botté en touche Noël Le Graët. "Ceci dit, Didier et lui ont eu peut-être moins d'amitié, d'estime", a-t-il nuancé. "N'oubliez pas aussi qu'il y a toujours un dossier en cours qui dure depuis quatre ans, je trouve que la justice est un peu lente". En tout cas, le président de la FFF salue le niveau de jeu de KB9, "un joueur énorme qui vient de faire une saison tout à fait exemplaire avec le Real. C'est l'un des meilleurs joueurs européens sur la dernier année. J'ai pour lui de l'estime sportive", souligne le Breton, s'en remettant à son sélectionneur. "C'est à lui [Didier Deschamps] de trouver l'équipe complémentaire, l'équipe qu'il sent le mieux, et il a parfaitement bien réussi puisque je vous rappelle qu'on est champion du monde". 

Adrien Rabiot "ne peut pas être puni éternellement"

Invité à commenter le retour très discuté en Bleu d'Adrien Rabiot, le président de la Fédération s'est ensuite voulu apaisant. "On ne peut pas, à 21 ans, être puni éternellement. On ne peut pas le laisser sur la touche tout une vie. C'est un très, très bon joueur, un garçon qui est adorable. Il est charmant et c'est une erreur de jeunesse", a estimé Noël Le Graët, commentant là le refus du joueur de la Juventus d'être réserviste avec l'équipe de France pour la Coupe du monde 2018. "Il aurait dû accepter, bien évidemment. Il était sélectionnable et Didier a choisi le bon moment puisqu'il est actuellement en pleine forme".

Neymar, "un joueur exceptionnel" malgré "quelques excès"

Interrogé au sujet du génie Brésilien Neymar, Noël Le Graët a avant tout tenu à mettre en avant le talent du n°10 du PSG. "Regardez un peu la qualité du joueur. C'est un joueur exceptionnel, il est fabuleux et il apporte au championnat. Bon, il a des excès, comme l'autre jour, quand il n'est pas en grosse forme et qu'il ne réussit pas tout. Il conteste peut être un peu trop mais tout le monde doit quand même admettre que ce joueur apporte au championnat, qu'il est agréable à regarder. C'est vraiment l'un des meilleurs techniciens sur notre territoire."

"Pas emballé au début" sur le VAR, mais désormais convaincu

"Au début, je dois dire que je n'étais pas emballé. Ça ne faisait pas partie des objectifs importants de la Fédération. Aujourd'hui, même si ça n'est pas parfait - le temps entre l'hésitation et la décision finale est un peu long - ça s'arrange quand même. Le VAR arrête moins les matches, ce qui me plaît mieux", juge Noël Le Graët. "Il y aura toujours des erreurs d'arbitrage", a-t-il également expliqué. "En tout cas, moi j'aime bien quand l'arbitre reste maître du jeu, quand il décide s'il doit vérifier une action qu'il n'a pas bien vue, mais je n'aime pas les matches qui s'arrêtent sans arrêt", a-t-il ajouté avant de conclure : "Tout le monde a pris ses marques aujourd'hui, l'arbitre sur le terrain et ceux qui contrôlent, et je crois qu'aujourd'hui, si c'était à refaire, tout le monde le ferait."