Avant chaque combat, ses adversaires s'enduisent le visage de vaseline. Nong Rose, de son côté, applique délicatement son rouge à lèvres et réajuste sa brassière. Quelques touches de féminité avant de monter sur le ring et de martyriser, à coups de poings, de genoux et de pieds, les boxeurs qui lui font face.
Première en France. Cette femme, née dans un corps d'homme, est une star de la boxe thaïlandaise dans son pays. Samedi soir, celle qu'on surnomme "the dangerous Ladyboy" deviendra la première boxeuse transgenre à combattre contre un homme en France. Ce sera au stade Pierre de Coubertin, dans le 16ème arrondissement de Paris, face au champion de France de la discipline, Akrim Hamidi.
Coachée par son oncle. "J'ai commencé la boxe thaï à l'âge de 8 ans", raconte à Europe 1 ce petit gabarit (1,60 m pour 54 kilos). "Mon oncle est un ancien boxeur et comme il me trouvait trop efféminée, comme j'allais devenir un "ladyboy" selon lui, il m'a obligée à me battre contre d'autres garçons."
Cela n'a pas empêché celui qu'on surnommait "Rot" de changer de nom à l'adolescence pour devenir Rose. "Dans ma tête et dans mon corps, je savais depuis très jeune que je n'étais pas vraiment un garçon", explique la championne au Magazine L'Équipe. "J'ai choisi un surnom sans équivalent masculin. Je suis une rose, mais une rose qui pique et peut empoisonner."
Cinquante-deux victoires. Si le coaching viril de l'oncle n'a pas découragé la jeune femme, il lui a tout de même servi à se hisser parmi les meilleurs de sa catégorie. Depuis qu'elle combat chez les professionnels, Nong Rose affiche 52 victoires pour 8 défaites. En juin dernier, le "dangerous ladyboy" est devenue la première personne transgenre à boxer sur le ring du Rajadamnern Stadium, mythique salle de Bangkok. Une victoire. Face à elle, les garçons tombent comme des mouches. "Elle cogne avec trop de puissance et de précision", a reconnu l'un de ses adversaires malheureux en Thaïlande.
Une "démonstration de tolérance". Il est d'ailleurs parfois difficile pour Nong Rose de trouver quelqu'un contre qui combattre. Les boxeurs craignent les railleries en cas de défaite. Pas Akrim Hamidi, qui l'affrontera samedi soir. Le champion de France a immédiatement accepté la proposition de Guillaume Kerner, le promoteur, pour qui ce combat est l'occasion de changer l'image de la boxe. "C'est aussi une démonstration de tolérance de la part de notre sport, souvent catégorisé", explique-t-il. "[On dit souvent qu']en boxe, ce sont des gens un peu primaires, machos. On fait la démonstration que ce qu'on regarde, c'est d'abord les valeurs humaines plutôt que les apparences ou les appartenances."
Karaoké. Pour mener à bien sa carrière, Nong Rose a dû arrêter de prendre des hormones. Mais elle compte bien se faire opérer et terminer sa transformation dès qu'elle raccrochera les gants. Avant, peut-être, de s'adonner à sa deuxième passion en ouvrant un karaoké.