C'était il y a 34 ans, presque jour pour jour. Le 8 juillet 1982, en demi-finale de Coupe du monde, l'équipe de France des Platini, Giresse ou Trésor est au sommet de son art. Mais dans ce match mythique contre la RFA, un autre Bleu, moins connu que ses partenaires, va passer à la postérité. Il s'agit bien sûr de Patrick Battiston, défenseur lancé dans une folle chevauchée vers le but allemand en seconde période. Le reste fait partie depuis des décennies déjà de la mythologie sportive française. L'agression de Schumacher, le gardien allemand, et Battiston, K.O. sur sa civière, suivi par Platini. Comme un signe annonciateur de la défaite cuisante qu'allaient subir les Bleus ce jour-là, au terme d'une séance de tirs aux buts terrible.
Un coup de fil à Platini. C'est donc peu dire que Patrick Battiston a forcément vécu la victoire française contre l'Allemagne en demi-finale de l'Euro jeudi soir d'une manière particulière. Interviewé au micro d'Europe 1, l'ancien latéral a pourtant d'abord confié avoir vibré devant le match comme n'importe quel autre supporter : "J'ai vécu le match avec un peu de stress en première mi-temps, même si l'équipe de France avait bien débuté pendant 5 minutes. Ensuite, on a retrouvé cette équipe allemande très solide et très calme. La deuxième mi-temps a été plus tranquille et sereine avec une équipe de France en maîtrise qui nous a rendu nous-mêmes plus sereins." Pourtant, l'avant-match de Patrick Battiston ne ressemblait pas à celui des autres fans des Bleus. Quand vous échangiez vos pronostics et vos impressions avec vos amis ou votre famille, lui discutait avec… Michel Platini : "On s'est téléphoné hier avec Michel hier matin", a poursuivi Battiston. "On n'a pas refait le match des anciens, on avait envie de voir un bon match et de voir l'équipe de France gagner."
Ironie et humour. Les deux anciens internationaux ont donc été comblés. Et d'après Battiston, cette victoire doit beaucoup à Hugo Lloris, impérial hier soir : "Il a fallu un très grand gardien. On souligne à juste titre les deux jolis buts et la performance exceptionnelle de Griezmann, mais je crois que Lloris a été exceptionnel aussi pendant toute la rencontre." Une analyse purement sportive, dénuée de toute amertume ou sentiment de revanche. Sauf peut-être lorsque le latéral de métier évoque le penalty sifflé au profit des Bleus jeudi soir. Avec humour et ironie : "Schweinsteinger fait une faute délibérée. Il est en retard, il met la main dans l'idée de montrer qu'il a été bousculé, mais c'est délibéré. C'est une très bonne décision de l'arbitre. Pour une fois dans un France-Allemagne, dans une grande compétition en demi-finale, il y a une bonne décision de l'arbitre (en 1982, Schumacher n'avait pas reçu de carton malgré son agression, ndlr) !"
"Tu es vengé". Les supporters français et les proches de Battiston, eux, ont la rancune plus tenace. Car l'ancien joueur des Girondins de Bordeaux l'a confié, toujours avec le sourire : "J'ai reçu quelques messages sur mon téléphone hier soir disant : "Tu es vengé." (rires) Je pense que c'est resté dans la mémoire des supporters les plus anciens, non pas forcément ce qui m'est arrivé mais la déception d'avoir perdu aux tirs aux buts après avoir mené 3-1. Pour les plus jeunes en revanche, ce n'est que l'histoire." Mais le champion d'Europe 84 oublie bien vite le passé, car pour lui comme pour l'équipe de France, seul compte l'avenir désormais. Avec un rendez-vous bien précis : cette finale, qu'il faudra disputer contre le Portugal dimanche : "Quand la finale arrive, on ne pense plus à la fatigue. Effectivement, il faut récupérer, mais une fois sur la pelouse, on ne pense plus qu'à soulever le trophée et faire un tour d'honneur sur le terrain. Une journée de récupération de plus (les Portugais se sont qualifiés 24 heure avant la France, ndlr) c'est très important, mais tout doit être mis en place pour que les Bleus soient dans les meilleures dispositions."