Impossible de passer à côté de ce foisonnement de couleurs dans les rues souvent austères de Moscou ! Le jaune du maillot de la Colombie et du Brésil, le vert mexicain ou encore le bleu ciel et blanc des Argentins ont envahi la capitale russe, devenue le temps de la Coupe du monde la résidence secondaire de milliers de Sud-Américains. Sur la place Rouge, dans le métro, et même pendant Danemark-France, leur ferveur et leur sens de la fête émerveillent touristes et habitants, séduits. Immersion au cœur de cette ambiance "caliente" qui attend l'équipe de France demain samedi à Kazan, lors du huitième de finale contre l'Argentine (16h).
En famille, entre amis ou en couple
Combien sont-ils, exactement, ces fans à avoir traversé l'Atlantique pour suivre leur équipe nationale ? Les chiffres communiqués par la Fifa donnent le vertige : fin janvier, 186.000 billets avaient été achetés depuis l'Argentine, 154.000 depuis le Mexique ou encore 140.000 depuis le Brésil, soit environ dix fois plus que le contingent alloué aux fans de l'équipe de France (17.000, selon la Fédération française de foot). Le tout sans compter les (très) nombreux expatriés venus aussi bien d'Europe que d'Amérique du nord, ainsi que ceux qui ont pu se procurer des billets sur le marché noir…
En famille, entre amis ou en couple, ils n'ont pas hésité à débourser plusieurs milliers d'euros (3.000 euros par personne en moyenne pour une semaine, selon plusieurs fans interrogés) pour supporter leur équipe. "Pour nous c’est normal de venir en famille. Ça ne concerne pas que les Mexicains, mais toute l’Amérique latine. C’est une grande fête !", explique tout sourire Aracely, venue une semaine en Russie depuis la ville de Chihuahua, au nord du Mexique. Avec son mari Juan, leur fils, ainsi que sa sœur et son beau-frère, cette jeune Mexicaine a d'abord fait le voyage jusqu'à Rostov, pour voir le match de la "Tri" contre la Corée du Sud, avant de faire escale à Moscou.
"On est allés voir France-Danemark parce que le petit est fan de Pogba. Il portait même le maillot de la France !", raconte Aracely dans un français parfait. A peine a-t-elle le temps de finir sa phrase qu'une jeune Russe, puis deux Argentins réclament une photo, amusés par cette famille mexicaine dont tous les membres sont vêtus de vert de la tête au pied. Demande acceptée de bon cœur, avec un "Mexico" (prononcez Mé-ri-co) par-ci et un petit mot gentil par-là. Pour l'auteur de ces lignes, ce sera "Allez les Bleus" !
Sur la place Rouge, Aracely et sa famille enchaînent les photos avec touristes et supporters. Ici, avec des Argentins. #MEX#CoupeDuMonde2018pic.twitter.com/1VpCKFOZhn
— Julien Ricotta (@julienricotta) 28 juin 2018
Une passion et une joie communicatives
La ferveur de ces milliers de fans sud-américains rayonne dans les rues de Moscou, pourtant déjà baignée par un grand et beau soleil. Partout, dans le métro, dans les bars, ou aux abords des sites touristiques de la capitale russe, ils communiquent leur bonne humeur. "J’aime voyager, j’aime le football et j’aime mon pays. Pour moi, c’est normal d’être là !", explique Juan, un jeune Colombien venu de Bogota, accompagné de sa petite amie et d'un drapeau de son pays qui ne le quitte jamais.
Le cliché du supporter de foot, crâne rasé, bière à la main et quasiment exclusivement masculin, en prend un sacré coup. Même les policiers russes, pourtant réputés placides, ne peuvent s'empêcher de sourire (un peu) devant ces hordes de fans colorés et bruyants qui tranchent avec l'architecture encore très "soviétique" de Moscou.
Didier, un supporter français qui assiste à sa septième Coupe du monde, n'y va pas par quatre chemins. "Les Sud-Américains, c'est un autre monde. Ils ont une fibre patriotique qu’on n’a pas forcément en France. Les Péruviens étaient très, très nombreux à Ekaterinbourg (où avait lieu le deuxième match de poule des Bleus). C'était vraiment impressionnant", s'extasie-t-il, croisé quelques minutes après la (triste) rencontre contre le Danemark.
Quand Moscou se transforme en Rio
René a lui aussi assisté au match nul de l'équipe de France (0-0), mardi. Mais dès le lendemain, ce jeune avocat brésilien n'avait qu'une idée en tête : trouver un billet pour la dernière rencontre du premier tour de SON équipe, la Seleçao, contre la Serbie mercredi soir. Il est prêt à mettre le prix, assure-t-il, t-shirt "auriverde" sur le dos. "Pour moi, c’est normal de venir supporter le Brésil. Ce n'est que de la passion. Je les suis et je les suivrai partout dans le monde", poursuit-il. On ne saura jamais s'il a pu décrocher le précieux sésame…
Déjà dans le métro, les Brésiliens étaient bien chauds. #BRA#BRASER@Europe1@Europe1Sportpic.twitter.com/a8EcFVBzTc
— Julien Ricotta (@julienricotta) 27 juin 2018
Ce jour-là, comme lui, des milliers (voire des dizaines de milliers) de fans du Brésil ont transformé Moscou en une "petite" Rio de Janeiro à l'approche du match. Les sifflets, les tambours et bien évidemment les maillots de la Seleçao, pour la plupart floqués du n°10 de Neymar, s'affichent fièrement aux abords du stade. Le coup d'envoi approche et l'impression visuelle se confirme à l'intérieur de l'Otkrytie Arena : on y voit que du jaune.
L'hymne brésilien, repris par environ les trois quarts du public dans un vacarme à vous faire frissonner, donne le ton de la soirée. Dans les gradins, comme sur le terrain, la Serbie résiste mais finira pas s'incliner (2-0). Place désormais au huitième de finale contre le Mexique (ça promet !) avec, pour tous ces fidèles, la même idée en tête : ramener la Coupe du monde sur le continent, sevré de victoire depuis le sacre du Brésil en 2002. En tribunes, l'Amérique du sud a en tout cas déjà gagné haut la main.