Ils rêvaient d’Espagne-Argentine, les amateurs de football devront se contenter de Russie-Croatie. Le quatrième et dernier quart de finale de la Coupe du monde, qui oppose deux outsiders à Sotchi à 20h, est l’affiche la moins alléchante à ce stade de la compétition. Malgré des phases de poule enthousiasmantes, la Russie (contre l’Espagne) et la Croatie (contre le Danemark) ont participé aux pires matches des huitièmes de finale, se qualifiant toutes deux sans impressionner aux tirs au but. Pourtant, il serait dommage de négliger cette rencontre. Voilà pourquoi.
Parce que ça ne peut pas être pire qu’en huitièmes. C’est peu dire qu’on s’est grandement ennuyé lors des premiers matches à élimination directe de la Russie et de la Croatie. Difficile de blâmer la Sbornaya, pas favorite contre l’Espagne et qui a logiquement opté pour une tactique très défensive. Un choix pénible à regarder mais payant puisque les Russes se sont qualifiés aux tirs au but. En revanche, la Croatie, brillante en phase de poules, notamment contre l’Argentine (victoire 3-0), a déçu face au Danemark. Les Vatreni ont semblé épuisés et à court d’idées face au bloc scandinave, malgré un début de match en fanfare.
On n’imagine pas les deux équipes reproduire un tel match en quarts de finale. D’abord car l’affiche est plus ouverte. La Russie peut espérer battre la Croatie plus qu’elle ne pouvait imaginer un jour éliminer l’Espagne et ce faisant, elle devrait jouer moins défensif et miser sur ses qualités de vitesse. La Croatie ne trouvera donc pas un bloc aussi uni en face d’elle et devrait être en mesure de jouer dans la profondeur comme elle aime le faire.
Parce qu’à domicile, la Russie peut se transcender. Si on leur avait dit avant le début du Mondial que les Russes iraient jusqu’en quarts de finale (au moins) en éliminant l’Espagne, nul doute que les joueurs et l’entraîneur auraient signé avec empressement. Leur victoire en huitièmes de finale, marquée par une grande solidarité défensive, peut leur donner confiance et les libérer de la pression des matches à élimination. Portés par leur public, les Russes auront à cœur d’imiter l’Uruguay, l’Italie, l’Angleterre, l’Allemagne, l’Argentine et la France, tous vainqueurs d’une Coupe du monde à domicile. Et pour y arriver, pourquoi pas mettre un peu de folie ?
Parce que Luka Modric reste un artiste. Certes, la Croatie a déçu en huitièmes de finale. Mais les joueurs sont les mêmes que ceux qui avaient ravi les fans de foot lors de leurs trois matches de poule. Dans une Coupe du monde assez fermée, les Vatreni ont montré qu’il y a encore de la place pour un jeu de passes léché et désireux d’aller vite vers le but. Au cœur de cette philosophie, Luka Modric est le genre de joueur capable de faire basculer un match du bon côté. S’il retrouve sa faculté à jouer dans les espaces et ose un peu plus prendre sa chance de loin, le génie du Real Madrid peut emballer la rencontre. D’autant plus que le fait d’être passé tout proche de l’élimination peut provoquer un électrochoc chez les Croates et les pousser à ne pas reproduire les mêmes erreurs.
Parce que le vainqueur peut croire à une finale. Quoi de plus motivant pour les joueurs qu’une finale de Coupe du monde ? Pour y arriver, il faut bien sûr gagner samedi et réitérer en demi-finale mercredi. Mais la Russie et la Croatie ont l’avantage d’être placées dans la partie de tableau la plus faible. Au prochain tour, le gagnant affrontera le vainqueur du match Suède-Angleterre (samedi à 16h), un adversaire abordable dans tous les cas de figure. Le chemin menant à la finale est donc très ouvert et personne n’aura envie de laisser passer cette chance (peut-être) unique.
Parce que la Coupe du monde est presque finie et que vous n’avez pas envie de rater un seul match. Et oui ! On a beau ne pas avoir envie d’y croire, être persuadé que le match d’ouverture a eu lieu la semaine dernière et chercher par tous les moyens à prolonger l’ivresse (footballistique), la réalité nous rattrape : la Coupe du monde se termine dans huit jours. Pire, après ce Russie-Croatie, il ne restera que quatre matches (les deux demies, le match pour la troisième place et la finale, le 15 juillet). Alors si vous aimez le foot, au diable la météo estivale et les expos du moment, ne ratez sous aucun prétexte les dernières rencontres. Y compris Russie-Croatie donc.