Didier Deschamps est devenu mardi le troisième technicien à mener l'équipe de France en finale de la Coupe du monde. Avant lui, seuls Aimé Jacquet, en 1998, et Raymond Domenech, en 2006, avaient réussi cet exploit. Une finale de Coupe du monde, que la France va disputer dimanche contre la Croatie, est-ce un match que l'on prépare différemment des autres ?
"Sur le terrain, non, il n'y a pas de différence dans l'approche du match", confie Raymond Domenech, sélectionneur des Bleus entre 2004 et 2010, et consultant pour Europe 1. "On essaye de ne pas charger les entraînements."
Plus que l'approche technique ou tactique du match, qui diffère assez peu d'une rencontre lambda, il s'agit de préparer mentalement les hommes à ce grand rendez-vous. "Il faut essayer de ne pas faire naître le stress chez les joueurs, car la finale, c'est le moment suprême", souligne l'ancien technicien. "On s'est tous battus pour ce moment-là, il n'y aura pas d'étape suivante. Et il faut insister sur le fait que c'est merveilleux de jouer ce type de match."
" Il faut conserver une protection maximale "
Si Aimé Jacquet avait conduit les Bleus à la victoire, contre le Brésil (3-0), Raymond Domenech n'avait pas eu cette chance, les Bleus étant battus par l'Italie à l'issue de la séance des tirs au but, après un match étouffant marqué par l'exclusion de Zinédine Zidane (1-1 a.p., 5-3 aux t.a.b.). Douze ans plus tard, est-ce qu'il a des regrets sur la façon dont les choses se sont passées ?
"Oui, il y avait eu plein de petits détails désagréables dans l'avant-match, des joueurs qui organisaient leur voyage post-Mondial, des coups de téléphone… On avait quitté la Coupe du monde avant la finale." Et si c'était à refaire, Raymond Domenech 'interviendrait", afin de laisser moins de liberté à ses joueurs. "Il faut conserver une protection maximale", estime-t-il.
" Ils ont le vaccin de l'Euro "
Préserver les joueurs des diversions, pour ne pas dire des tentations, du monde extérieur, Didier Deschamps et son staff semblent s'en être chargés. Et, surtout, selon Raymond Domenech, les Bleus de 2018 ont un avantage important sur ceux de 2018.
"Eux, ils ont le vaccin de l'Euro (2016). Un match qu'ils pouvaient gagner (la finale face au Portugal, perdue 1-0 après prolongation). Nous, à l'époque, nous n'avions pas cette expérience-là (les Bleus, alors sous la houlette de Laurent Blanc, avaient été éliminés en quarts de finale de l'Euro 2014, ndlr). Didier, il l'a, cette expérience. Les joueurs (dont six étaient déjà titulaires au Stade de France face au Portugal) ont rappelé le précédent de l'Euro 2016 après la demi-finale gagnée contre la Belgique et c'est ce qui m'a plu. C'est la finale qui est le match à gagner. Le football est le seul sport où le finaliste est considéré comme un perdant, à la différence d'une course aux Jeux olympiques, par exemple."
Ne rien changer dans l'approche du match, tout en ayant conscience de son importance, et ne penser ni à l'avant ni à l'après : tel est le secret de la réussite selon Raymond Domenech. Aux joueurs de Didier Deschamps de l'appliquer désormais.
"On n'a rien fait". À les écouter, les joueurs des Bleus restent focalisés sur leur mission finale. "On reste concentré et on ne va pas se mettre de pression", a insisté Samuel Umtiti jeudi. "On a fait de belles choses, mais il faut quand même redescendre sur terre et se dire qu'on a une finale très importante. On sait très bien que c'est un des matches les plus importants de notre carrière." Lui aussi interrogé sur l'approche de la finale, Paul Pogba a évoqué un autre ressort : "Nous, on reste comme on est, comme au début de la compétition : 'l'équipe où on a des doutes', 'l'équipe qui ne joue pas ensemble'... On garde ces messages qu'on a reçus au début de la compétition, ce sera notre force pendant la finale. On n'est pas le favori, on n'a rien fait. On veut chercher quelque chose et on va tout faire pour."