Affaire du «tueur de DRH» : le parquet requiert la réclusion criminelle à perpétuité contre Gabriel Fortin

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avec AFP , modifié à
Une peine de réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, a été requise mardi lors du procès en appel de Gabriel Fortin, rejugé pour trois assassinats et une tentative d'assassinat en janvier 2021.

Le parquet a requis mardi une peine de réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une période de sûreté de 22 ans, à l'encontre de Gabriel Fortin, surnommé le "tueur de DRH", invoquant son "extrême dangerosité" et le "risque évident de récidive". L'ex-ingénieur se caractérise par "une absence totale d'empathie envers les victimes", une "dangerosité criminologique" et un "refus catégorique de toute démarche de soins". "Nous sommes face à une paranoïa de combat, la plus dangereuse", a souligné l'avocat général dans sa plaidoirie. Celle-ci s'est déroulée devant un box vide, l'accusé refusant depuis le début de son procès d'assister aux débats.

L'homme de 49 ans est rejugé depuis le 13 mai par la cour d'assises de l'Isère pour une équipée sanglante en janvier 2021 au cours de laquelle il avait abattu de sang-froid trois personnes et manqué une quatrième. Trois de ces victimes avaient été associées à ses licenciements dans le passé et une quatrième travaillait dans une agence Pôle emploi de Valence qu'il avait fréquentée. Son passage à l'acte avait été précédé d'une minutieuse préparation.

Des débats devant un box vide

L'avocat général a noté que l'une des deux expertises psychiatriques conduites sur l'accusé avait fait état d'une altération de son discernement au moment des faits, mais a demandé à la cour "que celle-ci n'entraîne aucune minoration de la peine" comme cela avait été le cas lors du premier procès, tenu à Valence en juin 2023. Gabriel Fortin avait déjà été condamné à la prison à perpétuité, assortie d'une peine de sûreté maximum de 22 ans. Les jurés avaient retenu que des troubles psychiques avaient altéré son discernement, sans pour autant appliquer de diminution de peine. Les parties civiles espèrent un verdict similaire à l'issue du procès en appel.

La quasi-totalité des débats des deux dernières semaines s'est pourtant déroulée devant un box vide, l'accusé refusant catégoriquement de s'expliquer et même de comparaître devant la cour. Tous les efforts de la présidente pour le convaincre puis pour le contraindre par la force de rester dans la salle sont restés vains. L'intéressé a multiplié les esclandres pour s'y soustraire, se contentant d'affirmer qu'il laissait le soin à ses avocats de le représenter, n'ayant pour sa part "rien à dire". Il était toujours absent mardi pour la dernière journée de son procès.

Cette attitude de défi a exaspéré certaines des parties civiles qui ont fustigé sa "lâcheté", tandis que d'autres s'en accommodaient, faisant valoir qu'elle avait d'une certaine manière permis des débats plus sereins. Se succédant à la barre tout au long de la journée de lundi, les avocats des victimes, familles, collègues mais aussi entreprises - les assassinats s'étant produits sur des lieux de travail ou à proximité - ont dépeint dans leurs plaidoiries un homme "très dangereux", "en pleine possession de ses moyens", usant de "la haine pour carburant" afin de mener à bien une "vengeance froide et implacable".

 

Un profil à la "dangerosité incurable"

Non seulement Gabriel Fortin n'a pas expliqué et encore moins regretté son geste, mais il refuse de se soumettre à des soins, ce qui le rend encore plus dangereux, ont argué les avocats des parties civiles, exposant le traumatisme et la "peur" toujours vivaces des victimes et de leurs proches. Selon eux, le fait qu'une nouvelle expertise psychiatrique présentée au début du procès ait conclu que Fortin souffrait d'un "trouble de la personnalité paranoïaque" et que son discernement était "atténué" au moment de ses crimes ne change rien à l'affaire.

"L'altération (du discernement) est à la marge. Il était à même de choisir de s'arrêter. Il disposait de son libre arbitre", a argué Me Alexandre Farelly. Selon lui, "il s'agit d'une affaire de vengeance narcissique" et la dangerosité de Fortin apparaît "incurable". "Son silence n'est que la revendication de ses assassinats. La société doit se protéger. Nous demandons, sans haine ni faiblesse, de mettre ce personnage à l'écart de la société de manière définitive et irrévocable", a plaidé de son côté Me Laurence Buisson, avocate de Bertrand Meichel, seule des quatre personnes visées ayant réussi à lui échapper.