Alors que l'attaque d'un fourgon pénitentiaire a permis la libération d'un détenu connu notamment pour trafic de stupéfiants mardi 14 mai, le sénateur Les Républicains Etienne Blanc était invité sur Europe 1 ce mercredi. Il est à l'origine d'un rapport accablant du Sénat, qui dénonce le manque de moyens de la lutte contre le trafic de drogue.
Un rapport de 600 pages, que le Sénat a rendu public ce mardi, décrit la France comme submergée par le narcotrafic. Cette publication intervient alors qu'un convoi pénitentiaire a été attaqué à la voiture bélier dans l'Eure, et fait au moins deux morts parmi les agents de surveillance, pour libérer le détenu transporté. Mohamed Amra , alias La Mouche, s'avère justement être un acteur du narcotrafic.
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Pour Etienne Blanc, sénateur LR du Rhône et rapporteur de la commission d'enquête sénatoriale sur le trafic de drogue , cette affaire "est très révélatrice du dérapage que nous connaissons actuellement et de l'importance considérable des narcotrafiquants dans notre pays, de leur influence et des actions d'une violence inouïe auxquelles ils se livrent régulièrement, des moyens illimités dont ils disposent".
"On a l'impression que nous sommes totalement débordés"
Selon lui, le trafic de stupéfiants génère entre trois et six milliards d'euros de chiffre d'affaires. Le sénateur ajoute que l'ampleur du narcotrafic se mesure aussi aujourd'hui grâce aux énormes quantités saisies. "Aujourd'hui, une saisie de cinq tonnes, ça n'étonne plus", lâche Etienne Blanc. "Dans le golfe de Guinée, on a eu une saisie de dix tonnes et demie et l'augmentation de la production en Amérique du Sud est là. L'augmentation des produits en Afrique du Nord et du cannabis est là aussi", poursuit-il.
Le sénateur admet : "On a l'impression que nous sommes totalement débordés". Et surenchérit : "Les narcotrafiquants, aujourd'hui, peuvent financer, corrompre, acheter, blanchir. Ils sont en train de constituer dans notre pays une espèce de place forte qui sera extrêmement difficile de détruire".
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Alors que le rapport sénatorial publié ce mardi estime que la lutte contre le narcotrafic a été trop longtemps négligée, Etienne Blanc affirme qu'il faut donner plus de moyens aux forces de l'ordre. Mais également s'aider des nouvelles technologies, dont l'intelligence artificielle. Par exemple, explique-t-il, "lorsqu'on va rentrer dans un réseau de communication qui est un réseau crypté, on va avoir des milliers de conversations. Pour les éplucher, pour les comprendre, pour aller à l'essentiel, il faut des moyens nouveaux. C'est l'intelligence artificielle qui va reprendre des mots, qui va permettre de trouver les communications".
Les opérations "Place nette", insuffisantes ?
Si Etienne Blanc est assez critique de l'opération "Place nette XXL ", mise en place par le gouvernement il y a quelques mois, il estime que "c'est une opération d'ordre public". Pour lui, cela permet de débarrasser certains quartiers de leur point de deal. "Elles ne sont pas inutiles ces opérations, mais elles n'ont du sens que si elles permettent aussi de remonter des filières", nuance-t-il toutefois.
C'est sur ce point qu'il y a à redire selon le sénateur républicain. "Nous apercevons d'abord qu'on est très mal renseigné", avoue-t-il. "Combien de procédures judiciaires ont été ouvertes après les opérations 'Place nette' de Marseille ou d'ailleurs ? Quel a été ensuite le sort réservé à ceux qui ont été traduits devant des juridictions lors des opérations qui sont un peu récents ?"
"On ne peut pas se contenter de cela", assène Etienne Blanc. "Ce n'est pas inutile, il faut le dire, mais ça n'est pas suffisant pour lutter contre le trafic".