Les 7 boules de cristal, 13e album des aventures de Tintin, les lecteurs l'ont découvert en 1943 et 1944, en noir et blanc dans les pages du Soir, en Belgique, puis en couleur deux ans plus tard. La suite, Le Temple du Soleil est parue juste après la Seconde Guerre mondiale, entre 1946 et 1948, toujours sous forme de strips quotidiens. Ce sont ces deux albums que le lecteur peut désormais redécouvrir chez Casterman. Le premier volume est paru en mars dernier. Cette fois, le spécialiste Philippe Goddin, après un gros travail de documentation, dévoile, outre des commentaires approfondis sur l'œuvre d'Hergé, 140 vignettes inédites dans le volume 2 de La malédiction de Rascar Capac.
Des images disparues à redécouvrir. Dans cet ouvrage cartonné, version intégrale du Temple du Soleil, on passe de 62 pages de l'album complet, publié en 1949, à 75 planches au format à l'italienne. "Cette version est bien la plus aboutie", assure Philippe Goddin au micro d'Europe 1. "La version d'origine, c'est celle-là. Hergé est parti en totale liberté. On sent bien qu'il n'a pas compté ses pages." Cette nouvelle édition renferme donc des images originales qui n'avaient pas trouvé leur place dans le format imposé de l'époque, "et des dessins plus fouillés", explique Philippe Goddin. Sur les pages de gauche, le spécialiste apporte son éclairage passionnant sur des extraits, ou des précisions historiques utiles à l'histoire.
Alors que Tintin et le capitaine Haddock sont en Amérique du Sud, sur les traces du professeur Tournesol, c'est avec l'aide de Zorrino, un jeune indien quechua, qu'ils entreprennent de traverser la cordillère des Andes. Parmi les images inédites, trois vignettes attirent l'attention : Le Capitaine Haddock n'a pas la résistance de Tintin. Comme l'a repéré Le Figaro, il y essaye la coca, pour garder le rythme…
On savait déjà qu'il aimait le whisky… Sur ces trois vignettes, on voit le capitaine Haddock en pleine ascension. Mais le périple s'avère pénible à cause du mal des montagne. On connaissait le penchant du capitaine pour l'alcool, mais on apprend cette fois qu'il apprécie d'autres "petits remontants".
Poussé par Zorrino, qui lui vante les mérites de la coca : "Coca, señor… Indiens mâcher coca… Eux jamais fatigués, jamais mal des montagnes… Toi essayer, señor…", il n'hésite pas à toucher à la drogue.
Il faut dire que le capitaine Haddock traine un peu la patte derrière le jeune reporter, particulièrement infatigable. Et puis, comme le précise Philippe Goddin, mâcher des feuilles de coca n'est pas considéré comme une drogue au Pérou, mais bien comme un remède au mal des montagnes.
Le capitaine Haddock, sous un nouveau jour. "Dans cette version originale, Hergé se laisse vraiment aller", explique Philippe Goddin. "Il va ajouter des nuances au personnage important qu'est le capitaine Haddock. Au détour d'une page, on le voit très impressionné par la présence d'une tête de mort. Une image qui a disparue dans la version publiée en 1949, mais qui montre le capitaine Haddock plus sensible qu'à l'ordinaire", souligne le spécialiste. "Une autre découverte : dans les souterrains qui vont les mener au Temple du Soleil, Tintin et le capitaine vont marcher sur de l'or. On découvre alors un capitaine Haddock cupide, qui se remplit les poches et qui va ensuite devoir abandonner les pièces, à regret."
La Malédiction de Rascar Capac, tome 2, par Hergé. Recherche et commentaires, Philippe Goddin, Éditions Casterman.