C'était l'un des évènements les plus attendus de cette saison culturelle. Salvador Dalí, surtout connu pour ses toiles surréalistes des années 30, a attiré en moyenne 7.000 visiteurs par jour. "Pour répondre à l'enthousiasme du public", l'exposition a laissé ses portes ouvertes en continu depuis vendredi. Il ne vous reste que quelques heures pour découvrir l'oeuvre de l'artiste à Paris, avant que l'exposition ne soit présentée au Museo Nacional Centro de Arte Reina Sofia de Madrid.
Tour à tour recroquevillé dans un gros œuf symbolisant le souvenir qu’il disait avoir de la vie intra-utérine, fixant le spectateur de ses gros yeux exorbités sur un écran où on l’écoute évoquer son rapport aux médias, vous provoquant, vous ou sa mère ou le monde entier au détour d’un tableau intitulé Parfois je crache par plaisir sur le portrait de ma mère, 1929…C’est peu dire que Dalí se sent chez lui dans la galerie 1 du centre Georges Pompidou.
Découvrez ici le diaporama de l'exposition.
Salvador Dalí agace, titille, provoque, dérange, dégoûte, horrifie, ou enthousiasme, et tout cela en même temps. C’est là son génie et sa perpétuelle quête. Puisant dans les images prégnantes de son enfance - du tableau de Millet L'Angélus, accroché dans son école aux paysages de Figueres, sa ville natale, sa patrie - ou dans ses obsessions, il tripote et façonne cette prodigieuse matière première pour en faire des objets loufoques et merveilleux.
Qu’y a-t-il de commun entre sa Charrette fantôme, tout petit tableau à l’incroyable perspective qui fait dire à un visiteur "attendez donc que je mette mes lunettes", et son installation à la chaussure entourée d’une machine de rêve officiellement nommée Objet surréaliste à fonctionnement symbolique – Le soulier de Gala 1932-1973, ou encore la multitude de ses œuvres éphémères ? Il y a, de toute évidence, cette jouissance amusée à introduire un grain de sable dans les rouages. Rien qui soit lisse, ou paisible. A l’image de cet homme obsessionnel, phobique, fasciné, passionné, séducteur, égocentrique, mégalomane et complexe, à l’image de sa folie de créateur excentrique.
Diane Shenouda revient sur l'exposition foisonnante consacrée à cet artiste total :
Trente-trois ans après la grande rétrospective que lui avait déjà consacrée le centre Pompidou, Dali fait ainsi son grand retour à travers plus de 120 tableaux, dessins, objets, projets films et documents d’archives. L’exposition suit les méandres de son œuvre à travers des sections "chrono-thématiques" : Du surréalisme (tournant majeur de sa carrière) à l’invention de la méthode "paranoïaque-critique", des explorations scientifiques au "peintre théâtral" comme il se plaisait à dire, l’artiste "divin" et "génial" (là encore il s’agit d’une auto proclamation) déroule sa puissance créatrice.
Par l’œuf de l’entrée, le spectateur s’introduit dans l’univers dalinien, "étrange et pénétrant" comme un rêve, s’installe dans son esthétique du mou et du comestible, tantôt rêve souvent cauchemar. Le visiteur y voit se déployer ses angoisses et ses désirs profonds, tout le vocabulaire freudien déversé puis déformé, réinterprété par le maître. On est au bord de l’angoisse, ou tout près de l’éclat de rire (Cannibalisme des objets, avec écrasement simultané d’un violoncelle, 1932 ou encore Bureaucrate moyen atmosphérocéphale, dans l’attitude de traire du lait d’une harpe crânienne, vers 1933) mais l’on est fasciné.
Dalí, ses gros yeux et sa moustache en forme de touche finale n’ont décidément pas fini de nous chatouiller. C’est qu'il n’a sans doute pas fini de revendiquer : "Je réclame une vie dans l’au-delà avec persistance de la mémoire. Je veux bien renoncer aux béatitudes éternelles pourvu que dans l’éternité je me souvienne de tout !" a-t-il exigé un jour. En partenariat avec l'INA, Europe1.fr vous propose de retrouver les petites phrases cultes et kitsch du maître du surréalisme sur notre page spéciale Dites-le avec Dali.
Dalí, jusqu'au 25 Mars 2013 au Centre Georges Pompidou à Paris. Un évènement Europe 1.