Jérôme Bourreau-Guggenheim a été baptisé le premier martyr d’Hadopi (Haute Autorité pour la Diffusion des œuvres et la Protection des droits sur Internet). Le jeune homme de 31 ans a été licencié de TF1 il y a quelques mois, où il était responsable du pôle innovation web, pour avoir envoyé un mail à sa députée Françoise de Panafieu. Il y exprimait sa position sur la loi Hadopi, opposée à celle de la première chaîne. Il revient sur le devant de la scène médiatique avec l’ouvrage collectifLa bataille Hadopi qui sort jeudi et qui réunit 40 auteurs.
Pourquoi avez-vous contribué à La bataille Hadopi ?
J’ai répondu à l’invitation de Christian Paul [député socialiste, ndlr] qui est à l’initiative de ce livre, parce que j’ai été séduit par l’idée de participer à un ouvrage collectif autour de la loi Hadopi. Je suis un citoyen actif. Je crois qu’il y a des idées à défendre surtout dans ce domaine dans lequel j’évolue professionnellement.
Que pensez-vous d'Hadopi 2 ?
C’est une loi très dangereuse. Elle menace les internautes de trois ans de prison ferme et de 300.000 euros d’amende sans qu’il y ait nécessairement une procédure contradictoire. Et elle ne règle absolument aucun problème. On a perdu du temps et le financement de la création se pose toujours. Cette loi donne également un signe très négatif à l’ensemble des citoyens en leur faisant comprendre qu’ils sont responsables de leur connexion. Cela créé un sentiment d’insécurité permanente sur Internet qui est très néfaste pour l’économie numérique d’une manière générale.
Hadopi 2 a été adopté, pourquoi poursuivez-vous le débat ?
Hadopi 2 est passé, mais c’est une victoire sans gloire pour le gouvernement. Je pense que c’est vraiment le début de quelque chose. Hadopi n’est absolument pas la fin d’un processus législatif.
Vous avez acquis une certaine notoriété suite à votre licenciement de TF1. Vous participez maintenant à cet ouvrage, avez ouvert un blog et êtes une cheville ouvrière de l'initiative Banana République*. Après quoi courez-vous ?
Je mène une réflexion sur la question d’Hadopi et des libertés numériques depuis longtemps. C’est un domaine qui me concerne et dans lequel j’évolue professionnellement. J’essaie d’éclairer les internautes qui veulent bien me lire sur mon blog, comme j’ai essayé d’éclairer ma députée en février. Et Banana République était une façon simple d’offrir la parole aux internautes pour qu’ils expriment leur désaccord [sur la candidature de Jean Sarkozy à la présidence de l’Epad ndlr]. Je pense qu’Internet va de plus en plus occuper un rôle majeur dans la démocratie.
Où en sont les plaintes que vous avez déposées aux prud'hommes et au pénal ?
La procédure aux Prud'hommes est engagée. Après une réunion de conciliation qui n’a pas abouti, on s’achemine vers une audience qui devrait avoir lieu en juillet 2010. J’ai aussi décidé d'attaquer TF1 [devant le tribunal de grande instance de Nanterre pour discrimination en raison des opinions politiques, ndlr]. Et je n’ai pas de nouvelles du parquet depuis le 31 août.
Avez-vous retrouvé du travail ?
Je suis en train de monter ma propre boîte : une société de production de séries sur internet. Elle me donnera l’occasion de montrer qu’il y a un modèle économique sur internet, qu’on arrive à vivre en diffusant gratuitement sur Internet.
*Cette initiative est née sur Twitter pendant la polémique sur la candidature de Jean Sarkozy à la tête de l’Epad. Elle a donné lieu à un site internet et des flash mobs. Son nom fait référence aux républiques bananières.