Il a peint ou dessiné un peu partout, tout au long de sa courte vie. Si l’on prend l’histoire à l’envers, et que l’on remonte la ligne ininterrompue de ses dessins, Keith Haring est mort à 31 ans, le 16 février 1990 à New York, des suites du Sida, laissant derrière lui une carrière fulgurante et engagée.
Le Musée d’Art Moderne, avec le Centquatre (qui prolongera la rétrospective en proposant les oeuvres grands formats de l'artiste) ouvre ses portes du 19 avril au 18 août 2013 sur les œuvres remarquables de Keith Haring. L’exposition The Political Line , à travers plus de 250 œuvres réparties par grands thèmes (Rébellion : musique et lumière noire, Keith Haring et LA II ; Capitalisme, Religion, racisme …) qui sont pour Keith Haring, autant de lignes de front.
Car ce qui force l’admiration, c’est d'abord la profusion d'œuvres. Keith Haring dessine sur tout ce qui l’inspire : de la bâche vinyle, des paravents, des vases en fibre de verre ou en terre cuite, avec un stylo feutre, à l’encre, au marqueur, à l’acrylique ou à la craie. C’est en 1980 qu’il commence à dessiner sur les panneaux noirs qui recouvrent les emplacements publicitaires laissés vacants dans le métro de New York ce que l'on appelle ses "subway drawings".
Interdisciplinarité
Au centre de son travail, on perçoit toujours son engagement aux côtés d’autres communautés d’artistes : Noirs, latinos ou blancs, homos ou hétéros, hommes ou femmes, issus aussi bien des milieux de la danse (hip-hop, breakdance) , du mouvement graffiti, que de la musique. Cette rencontre interdisciplinaire se trouve véritablement au cœur d’une dynamique qui a forgé et structuré toute son oeuvre.
Fou de musique, il fréquente les clubs et intègre cet univers à son art. Il fréquente Madonna, Jean-Michel Basquiat, Andy Warhol ou encore Maripol, artiste créatrice de mode et réalisatrice qui consacre aujourd'hui à l'artiste et son travail une web série documentaire en 6 épisodes.
Le travail de Keith Haring filmé par Maripol :
L’art de la rue
Les années 70/80 marquent parmi les artistes une volonté d’inventer une contre-culture, un art alternatif, accessible à tous, qui s’oppose à l’art "commercial". Un art de rue, un art "gratuit" d’une certaine manière, car souvent éphémère. A cette époque, New York gronde de voir exploser le renouveau. Le trait de Keith Haring investit l’espace public. Tout au long de sa vie il reste d’ailleurs en contact avec cette idée : innombrables sont les fresques qu’il a réalisées en extérieur pour des écoles ou des hôpitaux, toujours de manière très vivante. Sur ses œuvres les couleurs explosent, le trait crée du mouvement, les dessins clignotent ou s’animent malgré la 2D.
Il ne donne pas de titre à la plupart de ses oeuvres, comme pour mieux laisser le spectateur libre de les interpréter. Les figures de son enfance (issues du storyboard : celle du chien, celle du bébé) traversent tout l’œuvre, changent de rôles et deviennent des symboles, son langage. Keith Haring aime l’immédiateté et travaille sans croquis, sans notes. Sans filet.
L’engagementA une époque où seuls les blancs avaient accès à la reconnaissance des musées ou des galeries, sa recherche de la mixité était déjà un acte politique, et certainement aussi la preuve d’une intuition de génie. Keith, qui commence à connaître la notoriété, ouvre les portes des galeries à d’autres artistes, danseurs, DJ. Il fréquente assidûment les clubs et y fait descendre son travail (comme par exemple au Paradise Garage, très célèbre discothèque de NY). Keith Haring le visionnaire avait senti d’où viendrait le danger : écocide, menace nucléaire, l’homme dévoré par la télévision, il s’engage sans retenue. Il combat activement le racisme, milite contre l’apartheid et toute forme d’oppression, lutte contre l’illettrisme, la drogue et le sida. Il meurt en 1990 laissant une œuvre foisonnante et toujours vivante.
EN IMAGES - Keith Haring, The Political Line.
Keith Haring, the Political Line du 19 avril au 18 août au Musée d’Art Moderne de la ville de Paris avec Europe 1 ; Le 104/Centquatre accueille les grands formats.