C’est une tendance en plein essor en France : les hôtels se nichent de plus en plus souvent place au cœur nos monuments historiques. A l’occasion de la 31 ème édition des Journées Européennes du Patrimoine, samedi 20 et dimanche 21 septembre, Europe1.fr s’est penché sur ce phénomène. Ou comment "vivre une expérience" qui va plus loin que la simple visite d’un lieu.
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Une mode récente. Si dormir dans un lieu du patrimoine est possible depuis les années 70, cette tendance, caractéristique de l’engouement des Français pour les lieux de la culture et du Patrimoine, a le vent en poupe depuis près de ans. Bien qu’aucune étude précise n’ait été publiée pour le moment sur les hôtels patrimoine - des chiffres sont attendus pour 2015 -, les professionnels du tourisme comme Philippe Maud’hui d’Atout France, l’agence de développement du tourisme de la France, confirment ce phénomène devant les demandes croissantes de ce type d’hébergements et la multitude des projets d’exploitation.
L’exemple espagnol. L’Espagne a été pionnière en terme d’Hôtel-Patrimoine. En 1928, le roi Alfonse XIII ouvre le premier Parador dans la Sierra de Gredos pour promouvoir le tourisme de luxe en Espagne. Le concept s’étend alors à tous les édifices historiques du royaume : forteresses, couvents, monastères... Franco prendra la relève et fera des Paradores sa fierté nationale. Voilà comment aujourd’hui dormir à l’Alhambra de Grenade est un privilège qui ne coûte que 70 euros la chambre double. Il est là le plus des Paradores : du luxe à bas prix. Un concept qui a même séduit le Général de Gaulle, qui, en visite officielle en Espagne en 1970, a logé dans de Saint Jacques de Compostelle et a confié : "Si nous avions la même chose en France, ce serait bien".
Pléthore de monuments historiques, mais... La France compte 44.000 monuments historiques. Contrairement à d’autres pays, l’Etat a décidé de tout conserver sans limite de temps et de tout restaurer, classer. Et surtout d’en inscrire des nouveaux. Si bien que la liste des édifices du Moyen Age au XIXe siècle s’alourdit avec ceux du XXe siècle, du patrimoine industriel et urbain, les jardins, les maisons des Illustres…Mais l’Etat et les collectivités qui sont propriétaires de la moitié de ces monuments historiques - l’autre moitié appartient à des particuliers -, se retrouvent dans l’incapacité de les entretenir et de développer une activité culturelle et touristique, dans un second temps.
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Objectif réhabilitation. Alors que les Paradores espagnols sont la propriété de l’Etat, en France c’est le privé qui s’est lancé dans la création de ces Hôtels. En louant ces lieux d’exception sur une longue durée (baux emphytéotiques), l’Etat et les collectivités permettent ainsi à des organismes ou des chaînes de les exploiter et d’y développer une activité touristique et hôtelière. Le but : créer une vraie destination touristique, et si possible internationale. Mais tout en gardant un droit de regard sur le projet afin que ni l’âme du lieu, ni son architecture ne soient entravées. Les retombées culturelles et financières pour la région en sont que plus bénéfiques. Olivier Gourio, directeur de l’enseigne Hôtels et Patrimoine, annonce un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros par Hôtel. 90% du CA bénéficie à l’économie locale, 900 000 euros destinés aux salaires locaux, 900 000 autres aux petits fournisseurs locaux.
Où trouve-t-on les hôtels-patrimoine en France ? Ils sont surtout concentrés dans les grandes régions touristiques : l’Ile de France, la Vallée de la Loire et la Provence. Les grands sites du patrimoine s’y mettent notamment, comme le château de Versailles, le Domaine de Chambord, le château de Fontainebleau ou encore l’Abbatiale de Saint-Savin dont les projets sont à l’étude ou déjà en cours de travaux.
Quelques exemples. Certaines chaînes hôtelières ont déjà sauvé des édifices à l’abandon. Intercontinental a ouvert l’année dernière à Marseille un 5 étoiles avec vue sur le vieux port dans l’ancien Hôtel-Dieu, qui était en désuétude depuis des années. A Lyon, l’ouverture l’Hôtel-Dieu est prévue en 2016. Chez ses concurrents, la chaîne Radisson Blu s’est attaquée au Palais de justice de Nantes pour en faire un Hôtel 4 étoiles. La salle des pas perdus s’est alors transformée en lobby luxueux. Et d’autres chaînes sont actuellement sur des projets comme Marriott pour la réhabilitation du commissariat central à Strasbourg ou la prison Saint-Anne à Avignon.
Des "Paradores à la française". L’enseigne Hôtels et Patrimoine s’est, elle, inspirée des Espagnols en développant les "Paradores à la française", en misant sur des prix raisonnables (80 euros la nuit). Son directeur Olivier Gourio a pour objectif de faire de chaque lieu une destination touristique. Sa règle : du standing, un site remarquable et une activité culturelle. Le groupe compte actuellement 4 Hôtels-patrimoine : Le château fort de Sedan dans les Ardennes, le couvent royal de Saint-Maximin dans le Var, l’Abbaye-Ecole de Sorèze et l’Abbaye de Saint-Savin, classée au patrimoine mondial par l’Unesco et qui ouvrira ses portes à l’automne 2015.
L’enseigne Hôtels et Patrimoine n’est pas seule sur le marché la réhabilitation des monuments historiques en hôtel : Les Hôtels Particuliers, Châteaux et Hôtels Collections, Relais et Châteaux … ont investi eux aussi depuis des années des lieux du patrimoine avec des modèles économiques et un positionnement touristique qui leur sont propres.