L'œuvre de la résurrection. Huit ans après l’attentat du Bataclan qui a fait 90 morts, Joffrey, rescapé, sort ce vendredi 24 novembre un album rock "Back to Life" (retour à la vie). Publié sous son nom de scène Republic of the Void (République du vide), cette œuvre musicale sonne comme une seconde vie pour son compositeur. Âgé de 24 ans en 2015, Joffrey - prénom d'emprunt qu'il donne après avoir livré sa vraie identité et la preuve qu'il fut partie civile au procès des attentats - se trouvait au Bataclan le soir du 13 novembre avec un ami guitariste.
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Un projet de thérapie
Faisant partie d'un groupe, le rescapé a tout arrêté durant plusieurs années, s'enfonçant dans le "déni" autour du Bataclan. Aujourd’hui, à 32 ans, il réalise qu'il était "toujours absent pendant les repas de famille, avec quelque chose dans le bide, toujours un non-dit". Néanmoins, un autre évènement le pousse à reprendre la plume et le médiator : "l'attentat de Samuel Paty", ce professeur d'histoire assassiné le 16 octobre 2020 à Conflans-Sainte-Honorine dans les Yvelines, par un terroriste.
L'ouverture du procès des attentats du 13-Novembre le 8 septembre 2021, lui apporte également un second souffle dans sa démarche, "ça a aussi été salvateur de prendre la parole au procès, de faire la musique", ajoute-t-il. "Faire l’album, me dire que j'allais me battre avec ça, m’a aidé. Ça m’a donné un objectif quotidien pour me lever et m’enregistrer à la guitare", affirme Joffrey au micro d'Europe 1.
Le rockeur a imaginé ce projet musical comme une thérapie, lui permettant d’affronter cette idée persistante que "ça ne s’arrêtera jamais". À travers dix morceaux engagés, Joffrey a pu extérioriser ses émotions. Une chanson rend ainsi hommage directement au professeur assassiné et une seconde, un single intitulé "Et la liberté...vaincra", reprend la lettre de Joffrey lue aux assaillants au tribunal, lors du procès des attentats du 13-Novembre.
À ces cris pour exorciser la peur, se mêlent des riffs de guitare tantôt festifs, tantôt énervés. Il est d'ailleurs l'unique titre chanté en anglais. Sur la même lignée, le rescapé a fait le choix de mettre en avant sa musique, au détriment du visuel, préférant ne pas montrer son visage : "ça fait des années que je vogue entre paranoïa et lucidité. Je suis jeune papa, je préfère me protéger, on a tué des gens pour moins que ça".