Savez-vous qu’un Français se cache derrière les classiques Le Pont de la rivière Kwaï et La planète des singes ? C’est en effet l’écrivain Pierre Boulle qui est l’auteur de ces deux romans, à l’origine de deux énormes succès hollywoodiens. Le romancier, mort en 1994 à l’âge de 81 ans, reste pourtant largement méconnu en France. Bernard Werber, invité dimanche dans l’émission La Voix est livre sur Europe 1, lui a rendu un vibrant hommage.
"C’est comme si, en France, on ne savait pas que cet auteur existe"
"Quand Pierre Boulle est mort, j'ai voulu faire une nécrologie dans le magazine où je travaillais à l'époque. Je leur ai dit que c'est lui qui a écrit La planète des singes, alors qu'ils pensaient que c'était un film américain et ne savait pas que ça venait d'un auteur français", a raconté l’auteur de la saga des Fourmis. "C'est aussi lui qui a fait Le pont de la rivière Kwaï. Il est mort à Paris et j'ai vu qu'il n'y avait pratiquement aucune nécrologie sur lui. C'est comme si, en France, on ne savait pas que cet auteur existe. Il est connu qu’aux Etats-Unis, et dans le reste du monde il nous revient en tant que produit américain", a déploré Bernard Werber.
"C'est quand même dommage qu'il y ait cet ostracisme envers tout ce qui ressemble de près ou de loin à la science-fiction. Je pense que Pierre Boulle, dans 150 ans, aura encore du sens", a-t-il assuré.
"Il y a de l’ostracisme envers tout ce qui ressemble à de la science-fiction"
Plus largement, l’écrivain a déploré le traitement de la science-fiction en France. "Après Jules Verne, on a décidé que la science-fiction était un truc anglo-saxon et que nous, les Français, on devait rester dans l'introspection. Quand j'étais journaliste scientifique, j'ai pu me rendre compte que souvent, les journalistes venant de facs littéraires, on leur a formaté la tête pour leur dire que tout ce qui ressemble de près ou de loin à du fantastique ou de la science-fiction n'est pas de la vraie littérature. On dit que c'est de la littérature pour les jeunes, avec tout ce que ça sous-entend comme un côté péjoratif", s’est désolé Bernard Werber.
"On a considéré qu'on a perdu cette bataille. Il y a très peu de représentations de la science-fiction française, qui est exsangue et qui est un petit ghetto qui malheureusement n'arrive pas à être visible. J'aurais aimé être un bateau qui ouvre un peu le chemin pour qu'il y ait réellement une nouvelle génération d'auteurs de fantastique, de science-fiction, d'imaginaire. Mais c'est vraiment difficile parce que toutes les portes sont fermées depuis très longtemps."