La Tête haute, avec Catherine Deneuve et Benoît Magimel, fera l'ouverture du 68e Festival de Cannes, mercredi. Ce film de l'actrice et réalisatrice française Emmanuelle Bercot, qui sort dans les salles ce même mercredi, rompt avec les habitudes de Cannes. Si le choix du film d'ouverture se portait jusque-là davantage sur de grosses productions hollywoodiennes, sur des films glamour ou populaires, Thierry Frémaux a opté cette fois pour un long-métrage social, cru et réaliste qui parlera au grand public. La Tête haute "dit des choses importantes sur la société d'aujourd'hui, dans la tradition d'un cinéma moderne, pleinement engagé sur les questions sociales", a en effet jugé le délégué général du Festival, en charge de la sélection.
Entre Mommy et Polisse. Un peu de Mommy (le film de Xavier Dolan) pour la violence incontrôlable du personnage principal et pour le trio de tête, un peu de Polisse (le film de Maïwenn, dont Emmanuelle Bercot a cosigné le scénario) pour le milieu social, La Tête haute est un film résolument actuel. Malony, garçon en souffrance, impulsif, se jette à la gorge de son premier éducateur ou retourne les bureaux de ses interlocuteurs lorsqu'ils se montrent un peu trop directs. Le film raconte le parcours chaotique de cette graine de voleur de voitures en mal de repères, entre une juge pour enfant et un éducateur. Ces deux professionnels, attentifs et profondément humains vont suivre l'adolescent de ses 6 ans à ses 18 ans, sous les yeux de sa mère défaillante, et tenter de le remettre dans le droit chemin.
Enquête de terrain. Emmanuelle Bercot a réalisé une longue enquête de terrain, avant le tournage. La juge et l'éducateur, personnages clés du film, la réalisatrice les a observés en plein travail. Ces professionnels, véritables "héros", décrit-elle, encadrent et guident les jeunes sans se décourager, "avec une patience, un dévouement et une foi dans leur métier" qui ont forcé son admiration. La Tête haute met un coup de projecteur sur "tout le travail éducatif méconnu qui est fait autour de ces jeunes exclus", explique Emmanuelle Bercot. Pour ajouter au réalisme, le film a été tourné dans un vrai centre éducatif fermé et entre les murs d'une prison pour mineurs. Le plus crédible ? On est saisi par le découragement au fil des entretiens du héros avec ses tuteurs. Tandis que la juge et l'éducateur se battent, le spectateur est assailli par le sentiment que rien ne parviendra à briser le cercle vicieux de l'autodestruction.
Un film d'auteur et un film d'acteurs. Si le film a demandé un travail de reportage à la réalisatrice, c'est la fiction qui l'emporte. Rod Paradot, petit blond teigneux et écorché vif, embarque le spectateur dans son errance. La qualité de La Tête haute repose d'ailleurs en partie sur la performance des quatre acteurs principaux. Aux côtés du jeune héros, Sara Forestier, affublée d'un dentier, joue une mère, trop jeune, trop copine et parfaitement dépassée. Catherine Deneuve, maternelle et charismatique, devient, au fil des rendez-vous dans son bureau avec l'enfant ses proches et son éducateur, l'un des piliers rassurant du film. Quand à Benoît Magimel, il donne une juste épaisseur à son rôle d'éducateur, lui-même ex-délinquant, qui peine à trouver la bonne distance avec le gamin dont il a la charge. Le film, cru et touchant, ne manque pas de rythme et renoue avec l'un des sujets de prédilection d'Emmanuelle Bercot, l'adolescence.
Invitée de la matinale lundi matin, Catherine Deneuve s'est confiée au micro d'Europe 1. L'actrice de 71 ans, pour jouer la juge du film, est allée suivre des audiences dans un tribunal, pour s'imprégner.
Deneuve : "Je me fous de ce que l'on dira de...par Europe1fr