Gérard, cinq années dans les pas de Depardieu
Par Mathieu Sapin, éditions Dargaud
Résumé de l'éditeur : Mathieu Sapin rencontre Gérard Depardieu en 2012. Il l'accompagne en Azerbaïdjan à l'occasion du tournage, pour Arte, d'un documentaire sur les traces d'Alexandre Dumas. Une relation unique se noue entre les deux artistes. Dès lors, Gérard Depardieu va inviter Mathieu Sapin à partager son univers, ses pensées (philosophiques ou triviales), ses coups de gueule, que ce soit lors de tournages, au Portugal ou aux quatre coins de l'Europe, d'un voyage exceptionnel en Russie ou, tout simplement, d'un repas dans la cuisine de son hôtel particulier parisien.
Notre avis : Une fois encore, Mathieu Sapin parvient à nous plonger dans un univers inconnu ! Après l'Elysée il y a 2 ans, place maintenant au quotidien de notre Depardieu national. Le dessinateur est invité à le suivre alors que Gégé tourne un documentaire culinaire entre l'Azerbaïdjan, la Bavière, le Portugal et la Russie. On aurait pu craindre une nouvelle caricature de cet acteur désormais si souvent moqué, mais il n'en est rien. Après une première rencontre avec un Gérard en slip dans son hôtel particulier, une vraie complicité va se nouer entre les deux hommes (Tintin d'un côté et le capitaine Haddock de l'autre d'après les surnoms qu'ils se sont donnés). On va découvrir un personnage drôle, tendre, cultivé, bien loin des clichés qui lui collent à la peau. Mention spéciale pour la scène dans le sauna d'un ancien général de l'armée russe...
Gus Tome 4 : Happy Clem
Par Christophe Blain, éditions Dargaud
Résumé de l'éditeur : Après l'énorme succès de Quai d'Orsay, Christophe Blain revient vers le personnage qui lui a permis de réinventer le western, genre qu'il affectionne par-dessus tout. Cet album s'attarde plus particulièrement sur Clem, un outlaw au grand coeur ; un mélange d'aventure et de comédie sentimentale servi par le dessin virtuose de Blain.
Notre avis : Quel plaisir de retrouver notre cowboy, huit ans après le tome 3 ! Ce fut long... L'auteur s'étant notamment concentré sur sa série Quai d'Orsay vendu à un demi million d'exemplaires... Et là où Blain est malin (remarquez ça rime !), c'est que notre Gus ouvre la BD pendant une dizaine de pages, avant de quasi disparaître, l'intrigue se concentrant sur un autre personnage, Clem, son ancien compagnon de braquage. Quelle frustration excitante ! Heureusement, le scénario conserve toute l’ironie et l'humour qui ont fait le succès de la série... Le dessin lui aussi est toujours autant ciselé, dynamique, nous offrant un nouveau western moderne exemplaire.
Monet, nomade de la lumière
Par Efa et Rubio Salva, éditions Le Lombard
Résumé de l'éditeur : Du Salon des Refusés au mouvement des Impressionnistes, de jeune peintre désargenté à grand bourgeois tutoyant les huiles, du mari à l'amant... la vie de Claude Monet fut pour le moins plurielle. Chef de file, à son coeur défendant, d'un mouvement qui bouleversa la vision de la peinture au XIXe siècle, l'homme n'est finalement resté fidèle qu'à une seule quête : celle de la lumière absolue, qui viendrait éclairer toute son oeuvre de sa perfection. Salva Rubio et Ricard Efa nous racontent aujourd'hui les aléas de cette recherche, dont Monet paya le prix autant qu'il l'encaissa, à travers un somptueux roman graphique.
Notre avis : Voilà une bande dessinée à mettre entre les mains des enfants (et des adultes) pour leur faire découvrir la naissance de l'impressionnisme ! Un beau voyage dans "l'esprit" de Claude Monet (et sa bande), boudé au départ par les expositions les plus prestigieuses. On y découvre aussi comment sont nées les toiles que l'on aime tant admirer aujourd'hui, comment elles se sont dessinées, construites, peintes... Un récit chronologie, un peu classique, mais efficace. Et magnifiquement porté par un dessin au pinceau qui respecte "l'esprit" du peintre. Certaines toiles y sont d'ailleurs reproduites avec une troublante ressemblance !
Salud
Par Nadar et Philippe Thirault, éditions Futuropolis
Résumé de l'éditeur : Salud ! Santé ! Comme un voeu de bonne grâce à partager. Comme un doux cri nostalgique et déçu aussi… Un homme tombe amoureux d’une femme. Il est jeune, elle est mûre. Il est français, elle est espagnole. Antoine est fougueux, Iria est raisonnable. Il est alcoolique, elle sera malheureuse. Les amants joyeux et hardis vont se disputer, jusqu’au point de non-retour, à perdre la raison, l’amour et les repères construits ensemble. Antoine, aculé par les dettes et sa violence, se perdra. Marié à une riche espagnole avec qui il a monté un restaurant, il a possédé des millions de pesetas, à ne plus savoir comment les dépenser. Mais, étranger sous la dictature franquiste, ne comprenant pas cette société surveillée qui vit dans la peur de la police, il se dispute avec sa femme et sa belle-famille. Se réfugiant dans l’alcool, il perd pied, devient violent. De retour en France, il n’aura plus rien. L’alcool lui aura fait perdre son salut, et sera un réconfort pour soigner sa blessure. De cette époque faste, Antoine ne gardera qu’une relique : une valise de luxe, aujourd’hui sale, déchirée, défoncée. Et ses souvenirs
Notre avis : On revit les dernières années de l'Espagne sous Franco, à travers le destin d'un salaud, Antoine. Il est alcoolique, violent (ça va souvent ensemble), arrogant aussi, et se moque bien de la dureté du régime tant que ça ne l'impacte pas... Rassurez-vous, il va le payer ! Mais ce qui est le plus intéressant, c'est cette plongée quasi documentaire dans l'Espagne franquiste ! Portée par un dessin couleurs pastels (qui nous fait forcément penser aux seventies), on apprécie d'autant plus l'album lorsque l'on découvre qu'il est inspiré d'une histoire vraie (l'auteur aurait rencontré le fameux Antoine dans un bar). Un sujet original pour un album marquant.
Les Gueules Rouges
Par Jean-Michel Dupont et Eddy Vaccaro, éditions Glenat
Résumé de l'éditeur : Été 1905. En tournée dans toute l’Europe, le cirque de Buffalo Bill s’arrête à Valenciennes. Un événement considérable pour la population locale et l’occasion pour Gervais, un gamin qui travaille au fond de la mine, d’élargir son horizon. De sa rencontre poignante avec des Sioux du cirque va naître une terrible erreur judiciaire quand ses amis indiens sont accusés d’un meurtre sauvage...
Notre avis : Une belle plongée dans le monde des mineurs du nord au début du 20e siècle. On y découvre comment cette société s'organisait, souvent dans la pauvreté mais avec solidarité. L'arrivée des indiens du cirque Buffalo Bill va chambouler cet équilibre, et offrir au lecteur une BD passionnante entre chronique sociale et western. Le scénario est riche, mais c'est surtout le dessin qui marque. Eddy Vaccaro a utilisé de l'aquarelle, offrant des ambiances qui s'adaptent à chaque scène, notamment dans le noir oppressant de la suie des mines de charbon.
Guirlanda
Par Jerry Kramsky et Lorenzo Mattotti, éditions Casterman
Résumé de l'éditeur : Récit épique aux frontières du réel, Guirlanda évoque tour à tour les croyances religieuses, la tragédie grecque, les mystères de la maternité, ou encore la crise de la connaissance. Cette déambulation jouissive sur la mystérieuse terre des Guirs est magnifiée par un dessin à la plume d’une grande finesse. Libéré par la naïveté apparente de l’intrigue, Lorenzo Mattotti donne libre cours à ses envies graphiques, multipliant les personnages baroques et les longues improvisations muettes qui invitent à une contemplation silencieuse.
Notre avis : Voilà une BD déroutante dans tous les sens du terme ! Il est déjà quasi impossible de la résumer. Disons que c'est une odyssée poétique, drôle mais sombre, avec des personnes qui nous rappellent les Moumines. On y découvre aussi des références à Moebius. Mais il faut en fait accepter de se laisser porter par la lecture, se laisser aller à une sorte de rêve hypnotique qui dure 384 pages et qui pourtant paraît court. A découvrir, vraiment !
Katanga
Par Sylvain Vallée et Fabien Nury, éditions Dargaud
Résumé de l'éditeur : En 1960, après quatre-vingts ans passés sous la domination coloniale belge, le Congo proclame son indépendance ; moins de deux semaines après, la riche province minière du Katanga fait sécession. Le Congo et le Katanga entrent immédiatement en guerre ; au coeur du conflit : la possession des territoires miniers. De nombreux massacres et exodes de civils s'ensuivent. L'ONU impose alors sa médiation et l'envoi de Casques bleus sur place... Dans le même temps, une horde d'ignobles mercenaires est recrutée pour aller libérer les exploitations minières occupées... Et un domestique noir, Charlie, tord le cou au destin en mettant la main sur un trésor inestimable : 30 millions de dollars de diamants... ce qui fait de lui le Noir le plus recherché du Katanga.
Notre avis : Quel plaisir de retrouver le duo Vallée/Nury (à qui on devait déjà notamment la formidable série Il Etait Une Fois en France). Ils s’intéressent maintenant à l'histoire post coloniale du Congo. Une nouvelle fois, le récit est mené à un rythme effréné, les personnages sont crédibles (inspirés de faits réels) mais hauts en couleurs et terriblement cyniques. Et le dessin de Sylvain Vallée nous plonge avec brio dans l'ambiance de l'époque. Une recette qui a fait le succès des auteurs, et qui continue de fonctionner. Jouissif.
America
Par Nine Antico, éditions Glenat
Résumé de l'éditeur : Ça y est, Pauline fait officiellement partie de la catégorie "larguée". Seulement, la fameuse dépression post-rupture qu’on lui a promis tarde à arriver. En attendant, Pauline s’ennuie ferme. D’autant que c’est le mois d’août à Paris. Tous les bons copains sont partis, il ne reste plus que ceux de seconde zone avec qui partager son malheur. Pauline en a marre, elle a besoin de changer d’air. Sur un coup de tête, elle décide de partir pour les États-Unis. Entre fantasmes et réalité, de New York à San Francisco, Pauline voyage dans les villes qu’elle a rêvées, s’ouvre au monde... mais continue de se faire des films.
Notre avis : Les lectrices (et lecteurs) de Nine Antico auront plaisir à retrouver Pauline. Après l'avoir suivi dans ses vacances entre filles (Girls Don't Cry) et dans ses soirées (Tonight), notre héroïne "girl next door" part cette fois sur les routes américaines pour se changer les idées après sa rupture. Elle est toujours aussi maladroite, et donc toujours aussi drôle. On aime aussi la représentation de l'Amérique par l'auteure, qui manie toujours à merveille les couleurs vives et chaudes. Nine Antico aimerait maintenant s'atteler à raconter l'histoire de François Truffaut. On a hâte.