L'œuvre du plasticien britannique Anish Kapoor, installée dans les jardins du château de Versailles, a été vandalisée pour la seconde fois dimanche, avec des inscriptions royalistes et antisémites.
Anish Kapoor veut que son "Dirty Corner" garde les stigmates de ce dernier déferlement de haine. L'œuvre du plasticien britannique d'origine indienne, installée dans les jardins du château de Versailles, avait déjà reçu en juin des jets de peinture jaune. Dimanche, elle a été vandalisée pour la seconde fois, à coup d'inscriptions antisémites. L'artiste a confié au Figaro vouloir laisser ces inscriptions insultantes aux yeux de tous.
Ne rien retirer de ces insultes. Anish Kapoor a confié sa stupéfaction à l'annonce de cette nouvelle détérioration, évoquant des "gestes qui ont monté en puissance, de plus en plus destructeurs et haineux".
Après réflexion, et en consultation avec le Domaine royal de Versailles et la ministre de la Culture, Fleur Pellerin, l'artiste a décidé de laisser son œuvre en l'état. Il s'est dit "convaincu qu'il ne faut rien retirer de ces insultes, de ces mots propres à l'antisémitisme que l'on voudrait aussitôt oublier". Anish Kapoor estime même que ces "mots infamants" font désormais "partie de [son] œuvre" qui "restera donc ainsi, (…) et se montrera ainsi aux visiteurs et aux touristes de Versailles." Même chose pour les musées qui l'accueilleront pas la suite. Le sculpteur "défie désormais les musées du monde de la montrer telle quelle, porteuse de la haine qu'elle a attirée. C'est le défi de l'art".
"Mes racines sont multiples. Je suis Irakien et juif par ma mère, hindou par mon père, Britannique par ma culture, ma vie, ma pratique. Et soudain, on me ramène à une catégorie", a déploré l'artiste, qui dénonce "une attaque violente contre l'esprit humain et la culture".
Une enquête en cours. Anish Kapoor s'étonne aussi que de tels actes aient été possibles. "La police de Versailles qui s'est aussitôt rendue sur les lieux devra déterminer s'il y a eu des complicités internes", précise-t-il. L'œuvre, un tunnel d'acier rouillé de 60 m de long qui s'ouvre en direction du château par une sorte de trompe, a été recouverte d'inscriptions à la peinture blanche : "La reine sacrifiée, deux fois outragée", "SS Sacrifice Sanglant", "le deuxième VIOL de la Nation par l'activisme JUIF DEVIANT" ou encore "Juifs tradis et Kabbalistes: ce taré vous met en danger".
L'Elysée condamne ces actes. La ministre de la Culture, Fleur Pellerin, qui s'est déplacé à Versailles, a réagi sur Twitter en dénonçant "la stupidité et la violence contre la culture". Ces dégradations ont aussi fait réagir au sommet de l'Etat. Le président de la République a ainsi "fermement" dénoncé cet acte et "fait part de toute sa solidarité à Anish Kapoor" avant de "réaffirmer son attachement indéfectible à la liberté de création", dans un communiqué publié par l’Elysée.