La scène aura marqué le cinéma français. Mais elle a aussi brisé la vie d'une femme. En décembre 1972, Le dernier tango à Paris sort sur les écrans. Le public découvre avec stupeur une scène de viol : Marlon Brando, allongé sur Maria Schneider, mime une sodomie.
Un tournage cauchemardesque. Une scène qui n'était pas prévue dans le scénario et que le réalisateur, Bernardo Bertolucci, a décidé de rajouter sans prévenir l'actrice. "Sa vie entière a été résumé à une seule scène, d’un seul film", raconte Vanessa Schneider, invitée d'Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, sur Europe 1. La journaliste politique, grand reporter au journal Le Monde dresse un portrait de sa cousine dans Tu t'appelais Maria Schneider.
"Le tournage a été un cauchemar pour elle", assure l'écrivaine. "Elle avait 19 ans, elle était mineure car la majorité était à 21 ans à l'époque. Marlon Brando avait trente ans de plus qu'elle". "Dès qu'elle se plaignait, le réalisateur lui faisait comprendre qu'elle avait déjà bien de la chance d'être là. Il la considérait comme une moins que rien".
"Des pellicules de film brûlées". Jusqu'à cette fameuse scène de sodomie, que Bernardo Bertolucci cache sciemment à la jeune actrice. "Il n'a été contraint de s'excuser qu'au moment du mouvement MeToo, plus de quarante ans après le tournage", explique Vanessa Schneider. Jusqu'alors Bernado Bertolucci revendiquait d'avoir menti à Maria, de l’avoir mise dans une situation où il provoquerait sa stupeur, sa terreur en demandant à Brando de l’agresser physiquement, de lui sauter dessus avec cette fameuse motte de beurre", affirme Vanessa Schneider. "Il voulait qu’elle soit surprise, qu’elle hurle pour avoir les réactions les plus véridiques possibles".
Au moment de sa sortie, Le dernier tango à Paris fait scandale. "Il a été interdit au moins de 18 ans en France, les pellicules ont été brûlées en Italie, il a été interdit dans plein de pays dans le monde", poursuit la journaliste. "Ça a été un objet de scandale planétaire. Tout cela a complètement dépassé Maria qui avait subi la violence de ce qui s'était passé sur le plateau. Toutes ces réactions l'ont anéantie".
Un film tabou. La suite de la vie de Maria Schneider sera faite de dépressions, de hontes et de drogue. "Dans la famille, on ne pouvait pas parler de ce film", rapporte Vanessa Schneider. "Il l'avait fait tellement souffrir que c'était tabou. Elle avait d'ailleurs donné des consignes très précises pour ses funérailles : que le nom du film ne soit pas prononcé".
C'est cette histoire de gloire salie que Vanessa Schneider a voulu raconter. Comme une manière de réhabiliter sa cousine... et de faire changer la honte de camp.