Près de vingt ans après Le Huitième jour, qui avait connu un grand succès populaire à sa sortie, Jaco van Dormael revient avec Le Tout Nouveau Testament, un film en forme de conte, délirant et philosophique. A l'affiche, Benoît Poelvoorde, Catherine Deneuve, François Damiens, Yolande Moreau et la jeune Pili Groyne y incarnent des personnages bibliques revisités. Ea, la fille de Dieu, qui mène l'histoire, se rebelle contre son père et part en quête de six nouveaux disciples. Le Tout Nouveau Testament, sur les écrans français mercredi, avec Europe 1, convoque un étonnant mélange de références et d'associations d'idées.
Relecture biblique.Le Tout Nouveau Testament entreprend de relire le texte saint, mais à la façon de son réalisateur excentrique, Jaco van Dormael, qui a expliqué "s'intéresser aux religions comme aux belles histoires". Avec son coscénariste, Thomas Gunzig, ils ont imaginé un Dieu "salaud" qui aurait eu une fille cachée, Ea. L'histoire est ainsi racontée comme un conte, du point de vue de cette petite fille de dix ans (parfois, le procédé de la voix-off pèse d'ailleurs un peu). On assiste ainsi à quelques scènes miraculeuses, comme celle de la fille de Dieu, narratrice de l'histoire, marchant sur les eaux au côté d'un clochard sous les yeux impuissants de son père. Benoît Poelvoorde, en Dieu exaspéré, dément aussi devant un prêtre avoir dit ce qu'on lui fait dire depuis des siècles.
Dieu minable et tyrannique. Dans Le Tout Nouveau Testament, Dieu est irascible, méchant, boit de la bière et traine en peignoir dans son appartement bruxellois. Il pianote, enfermé à double tour dans son bureau, sur un vieil ordinateur et décide –toujours avec un petit rire sardonique- du sort des pauvres Terriens. Benoît Poelvoorde excelle en Dieu minable, sadique et tyrannique à souhait. L'acteur a confié sur Europe 1 être lui-même croyant. L'acteur belge, qui pense "qu'on a tous Dieu en nous", se voit surtout comme "un humaniste" et confie avoir la "foi en quelque chose de plus grand" que l'existence humaine, très courte et très mesquine à ses yeux.
Galerie de personnages loufoques. Le réalisateur semble s'amuser des interdits moraux. Catherine Deneuve apparait dans une sorte de remake de Max mon amour sous les traits d'une femme amoureuse… d'un gorille. Elle accueille ainsi son mari, nue dans le lit conjugal auprès du grand singe protecteur. Jaco van Dormael joue aussi la rencontre entre le sacré et le trivial. Yolande Moreau, qui incarne la femme de Dieu, est notamment présentée, sur les talons de son divin de mari, comme une femme mutique, toujours penchée sur son aspirateur, en ménagère acharnée.
Réalisateur rêveur. Tout s'éclaire d'un nouveau jour lorsqu'on découvre la manière dont Jaco van Dormael a trouvé l'inspiration. "Avec l'âge, je travaille beaucoup en rêvant. Je me couche en pensant à un passage précis du film, ou à un moment du découpage, et le matin, je me réveille avec la scène. C'est une économie de travail assez étonnante", a-t-il plaisanté. Résultat ? Le film est moins la comédie attendue qu'une fable poétique et hallucinée.