La réalisatrice et ex-actrice de porno Ovidie dénonce dans "Là où les putains n'existent pas", un documentaire programmé sur Arte mardi soir, des dérives dans la politique de l'Etat suédois pour "éradiquer la prostitution". Le 11 juillet 2013, Eva-Marree, est tuée par le père de ses deux nourrissons de 37 coups de couteau, dans les bureaux des services sociaux suédois. Elle l'avait quitté quelques années plus tôt pour violences conjugales en emmenant les enfants avec elle, et entamé une brève activité de "travailleuse du sexe", selon la formule utilisée par Ovidie.
Cette dernière s'appuie sur ce fait divers pour mener un "réquisitoire" contre la politique suédoise en matière de lutte contre la prostitution. La Suède a été le premier pays "à sanctionner les clients de prostituées" en 1999 et "exporte son modèle", souligne Ovidie. La France a également interdit "l'achat d'actes sexuels" en avril 2016 à la suite de la Norvège, l'Islande et le Royaume-Uni.
"Cela en en dit long sur la conception de ce que doit être la maternité". "Le cas de Eva-Marree est emblématique du fait qu'en Suède, on préfère confier des enfants à un homme violent, toxicomane et assassin plutôt qu'à une pute, soi-disant au nom de la protection de l'enfance et du droit des femmes", accuse-t-elle. Les services sociaux sollicités par la réalisatrice ne lui "ont jamais répondu ni d'ailleurs aux avocats de la famille d'Eva-Marree", a-t-elle affirmé.
Sur "simple dénonciation", Eva-Marree s'était vue retirer la garde des petits âgés d'un et deux ans, par les services sociaux qui en confièrent la garde exclusive au père, dont ils avaient pourtant eux-mêmes reconnu le caractère violent, relate la réalisatrice dans le documentaire. "Je trouve que cela en dit long sur la conception de ce que doit être la maternité, la parentalité", ajoute-t-elle.
Un fait divers glaçant. Après l'échec de plusieurs recours en justice et l'abandon de son activité de prostituée, qui n'a duré que deux semaines, Eva-Marree était devenue l'une des porte-parole du syndicat suédois des travailleurs du sexe. La jeune femme de 27 ans avait finalement obtenu un droit de visite de ses enfants quand, au premier rendez-vous, son ex-compagnon l'a assassinée. Les parents d'Eva-Marree, eux-mêmes privés du droit de visite de leurs petits-enfants, ignorent tout de leur sort. Le père meurtrier, qui purge une peine de 18 ans de prison "lui, conserve son autorité parentale", s'indigne Ovidie.