Le ministre de la culture Frank Riester a adopté une position claire dans le débat qui entoure le nouveau film de Roman Polanski, visé par une nouvelle accusation d'agression sexuelle.
Faut-il, comme certains le défendent encore, séparer l'homme de l'artiste ? Pas pour le ministre de la culture. "Une oeuvre, si grande soit-elle, n'excuse pas les éventuelles fautes de son auteur", a ainsi estimé ce jeudi Franck Riester, alors que le réalisateur Roman Polanski est visé par une nouvelle accusation de viol, qui embarrasse le cinéma français.
"Le talent n'est pas une circonstance atténuante ; le génie, pas une garantie d'impunité", a souligné Franck Riester - sans jamais nommer le réalisateur franco-polonais - tout en mettant en garde contre le "tribunal de l'opinion", à l'occasion des Assises de la parité et de la diversité au cinéma jeudi 14 novembre à Paris.
Il a insisté sur les particularités des métiers du septième art "où le corps et l'intime sont très souvent en jeu, où de jeunes talents ont des envies de réussite, et des personnes en profitent. Où il ne faut pas confondre aura et emprise", tout en assurant de son souci de protéger "la liberté de créer".
Un nouveau film et un débat relancé
La sortie mercredi 13 novembre en salles de "J'accuse", la reconstitution de l'affaire Dreyfus par Polanski, a été mouvementée, avec l'annulation d'une avant-première mardi à cause d'un blocage de féministes et une promotion perturbée (interviews annulées ou non diffusées). Un hashtag #BoycottPolanski est également apparu sur les réseaux sociaux.
Quelques jours avant la sortie du film "J'accuse", la photographe Valentine Monnier avait révélé au Parisien avoir été "rouée de coups" et violée par Roman Polanski en 1975 à l'âge de dix-huit ans, en Suisse. Une accusation contestée "avec la plus grande fermeté" par l'avocat du cinéaste. Cette nouvelle affaire survient alors que Roman Polanski, artiste multi-récompensé (Oscar, Palme d'or à Cannes, Grand prix à la Mostra de Venise...) a été accusé d'agressions sexuelles par d'autres femmes ces dernières années, pour des faits prescrits.
Dans ce contexte, plusieurs membres du gouvernement, dont sa porte-parole Sibeth Ndiaye et Marlène Schiappa, chargée de l'Égalité femmes-hommes, ont dit qu'ils refuseraient à titre personnel d'aller voir le film, Grand prix à la Mostra de Venise, sans appeler à le boycotter.
Frédéric Mitterrand défend Polanski
L'ancien ministre de la culture Frédéric Mitterrand a quant à lui tenu des propos à l'opposé de son successeur et pris la défense du réalisateur. Invité de la matinale de Bernard Poirette, dimanche sur Europe 1, il a réagi à la nouvelle accusation qui vise Polanski : "Je n'y crois pas", répond-il simplement. Plusieurs témoins ont pourtant confirmé la version de Valentine Monnier au Parisien. "Il y a deux témoignages, mais on ne sait pas qui c’est, on ne connaît pas leur nom", défend néanmoins le neveu de François Mitterrand.
En 2009, déjà, Frédéric Mitterrand avait pris la défense de Roman Polanski sur notre antenne. Il avait alors jugé "absolument épouvantable" l'arrestation du cinéaste en Suisse, concernant sa condamnation aux États-Unis pour rapports sexuels illégaux avec une jeune fille de 13 ans en 1977. "Elle n’avait plus vraiment de sens puisqu’il avait été pardonné par la victime", réaffirme-t-il sur Europe 1. Un argument que la justice goûte peu : en raison de cette affaire, Roman Polanski ne reste libre de circuler que dans trois pays, la France, la Pologne et la Suisse.