Le romancier Jean-Paul Dubois a reçu lundi le prix Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires du monde francophone, pour "Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon" (L'Olivier), roman bouleversant et nostalgique sur le bonheur perdu.
Déjà couronné par le prix Femina en 2004 pour Une vie française, le Toulousain Jean-Paul Dubois, 69 ans, a récidivé lundi avec le prix Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires du monde francophone, pour Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon.
Écrivain discret et populaire, il a construit depuis une trentaine d'années une oeuvre qui séduit par sa délicatesse et sa profonde humanité. "Tout arrive! C'est adorable…", a déclaré Jean-Paul Dubois, toujours en lice pour un autre prix convoité : le Goncourt des lycéens qui sera décerné le 14 novembre. "C'est assez irréel", a-t-il ajouté. "Si les romans de Jean-Paul Dubois étaient traduits de l'anglais, il aurait en France un statut comparable à ceux de John Irving ou de William Boyd", dit de lui Bernard Pivot, le président de l'académie Goncourt.
Toujours en lice pour le Goncourt des lycéens
Le 22ème titre de l'écrivain, publié chez L'Olivier (256 pages, 19 euros) raconte l'histoire d'un homme, Paul Hansen, qui croupit depuis deux ans dans une prison de Bordeaux (qui, comme son nom ne l'indique pas, se trouve au Québec!) quand le lecteur le rencontre. Paul Hansen, le narrateur, va nous raconter comment il en est arrivé à partager une cellule avec un Hells Angel, formidable personnage, effrayant et touchant, qui ne rêve que d'"ouvrir en deux" ceux qui ne lui reviennent pas mais est terrorisé par les souris ou les ciseaux du coiffeur. Paul Hansen est un type bien, doux et bienveillant. Le lecteur apprendra à la fin du roman pourquoi un tel homme est en prison. Entre temps, remonteront à la surface des souvenirs d'un bonheur anéanti. Ce que raconte Jean-Paul Dubois (une constance dans la plupart de ses livres), c'est l'histoire d'un monde en train de disparaître pour être remplacé par un autre dominé par l'injustice et le mépris.
Pour tenir, Paul Hansen parle avec ses morts : sa compagne Winona, une femme irlando-algonquine, pilote d'hydravion, son père, pasteur danois, austère et tolérant (une gageure), fidèle à son poste même après avoir perdu la foi, sa mère libertaire qui n'hésitera pas à programmer un film porno dans son cinéma même si elle est "la femme du pasteur", sa petite chienne Nouk, personnage essentiel du roman (le plus beau d'entre tous, selon de nombreux critiques).
Les lecteurs habitués à lire Jean-Paul Dubois retrouveront les ingrédients habituels de son oeuvre : le prénom fétiche Paul, un dentiste, un accident, le goût des détails techniques indiqués avec exactitude comme la NSU Ro80, voiture révolutionnaire au moteur rotatif, l'orgue Hammond B3, l'hydravion Beaver… ou les techniques d'entretien d'une piscine.
Le Renaudot a lui été octroyé dans la foulée à Sylvain Tesson pour La panthère des neiges (Gallimard).