Depuis 30 ans, elle est la voix de la SNCF, une tessiture qui ne change pas malgré l'horloge qui tourne et les tableaux des départs qui défilent. Simone Hérault donne de la voix pour annoncer les voies et les retards, le temps et les trains qui passent.
Invitée samedi de l'émission Qui Vive ? consacrée au temps, elle s'est lancée dans la lecture de la sonore et poétique Ballade des pendules de Gilbert Lafaille, à la demande de Raphael Enthoven... après l'émission.
Ballade des pendules de Gilbert Lafaille
A la lueur d'un applique
Un chinois un peu myope
Sur son boulier magique
Fait les comptes de l'échoppe.
Dans son arrière-boutique
Une Anglaise démoniaque
Glisse un peu d'arsenic
Sur la colle des enveloppes.
L'ailier-droit, magnifique
Sous la pluie, dans les flaques
Marque un but héroïque
Mais le P.U.C. contre-attaque !
Et au théâtre antique
En public mais sans claque
Des cabots dramatiques
Loupent la fin d'Andromaque !
Et chacun dans sa bulle
Minuscule, gesticule
Et partout les pendules
Marquent un temps différent.
Penché sur le zodiaque
Un indien ascétique
Voit les signes prophétiques
Du temps qui se détraque.
Accoudé près d'un bock
Un raté pathétique
Se moque d'un alcoolique
Qui débloque sur l'époque.
Un ancien grand comique
Dans une boîte à la mode
Croise un homme politique,
Très loin, aux Antipodes.
Et le vieux porc-épic
Solitaire équivoque
Fait de l’œil à la bique
Qui reluque le phoque.
Et chacun dans sa bulle
Minuscule, gesticule
Et partout les pendules
Marquent un temps différent.
A l'hôpital public
Un interne astigmate
Opère la cataracte
D'un opticien presbyte.
Dans la brousse en Afrique
Un moustique nyctalope
Pique un lion flegmatique
Qui croque une antilope.
Des savants soviétiques
Fabriquent un télescope
Pour voir en Amérique
L'usine de microscopes.
Et derrière la vitrine
L'acrobate qui culbute
Jamais ne catapulte
Le lapin qui patine.
Et chacun dans sa bulle
Minuscule, gesticule,
Et partout les pendules
Marquent un temps différent.
Dans une boîte à musique
Rendez-vous interlope
Un sadique misanthrope
Drague une garce diabolique.
Au fond d'une banque opaque
L'employé noir astique
Le télex laconique
Qui annonce un grand krach.
Alité en clinique
Souffrant de l'humérus
Un psychiatre psychotique
Emboîte des poupées russes.
Et dans sa cage au cirque
Au milieu des baraques
Un vieux macaque mastique
Un papier bleu qui craque.
Et chacun dans sa bulle
Minuscule, gesticule
Et partout les pendules
Marquent un temps différent.