Fragilité professionnelle : comment parler de ses problèmes personnels au travail ?

L'une des clés pour évoquer ses difficultés personnelles au travail est de rester factuel, sans donner trop de détails. © Geralt / Pixabay / Europe 1
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Certaines difficultés de la vie privée peuvent avoir des répercussions sur notre activité professionnelle. Et il n’est pas toujours facile de trouver les mots pour en parler.

Près d’un salarié sur quatre est en situation de "fragilité professionnelle", selon une étude dévoilée mercredi par Malakoff Médéric. Parmi les raisons évoquées par les salariés : les problèmes financiers (14%), les difficultés à concilier vie personnelle et professionnelle, une situation d'aidant (9%) ou encore une maladie grave/un deuil récent (8%) qui ont des conséquences sur notre travail. "Il y a de moins en moins de frontières [...] entre les fragilités dites personnelles et professionnelles", commente Christophe Scherrer, directeur général délégué de Malakoff Médéric. Comment réagir lorsque de nos problèmes personnels impactent notre travail ? Comment (et à qui) en parler ? Voici quelques conseils.

Identifier les interlocuteurs

La première étape est peut-être d’abord de trouver les bonnes personnes à qui en parler. Si votre vie privée impacte la qualité de votre travail, votre manager doit bien entendu être au courant. Mais vous pouvez également vous rapprocher des ressources humaines, de la médecine du travail, du CE ou des organisations syndicales, pour voir si l’entreprise ne prévoit pas déjà des réponses pour votre situation. Le groupe Casino, par exemple, fait de la mise en relation avec des associations pour trouver des aidants familiaux. Et certaines entreprises proposent parfois des ateliers, comme des séances de yoga ou de sophrologie, qui peuvent vous aider à faire face à vos problèmes. N’hésitez pas, non plus, à demander autour de vous si certains collègues ont déjà connu des situations similaires, pour voir quelle réponse leur a été apportée.

Ne pas rentrer dans les détails

Rien ne vous oblige, toutefois, de trop en dire, ni d’en parler à tout le monde. Certains détails peuvent être douloureux à révéler à des collègues ou à un manager desquels nous ne sommes pas proches, d’autres peuvent relever du secret médical, d’autres encore peuvent susciter l’incompréhension : si une rupture amoureuse vous bouleverse et entrave votre travail, votre mal-être risque d’être perçu comme un "caprice" par d’autres collègues qui ne réagissent pas comme vous en pareille situation.

" L’important est d’être suffisamment clair avec son discours "

Avant d’en parler, il est donc d’abord conseillé de faire un petit travail sur soi. "L’important est d’être suffisamment clair avec son discours. Il s’agit d’accepter, en amont, le fait que ce qui nous arrive dans notre vie privée va changer durablement, et profondément, notre vie. Cela aide à ne pas être dans l’émotion, dans le pathos. Cela nous aide à nous concentrer sur le factuel", conseille Sophie Maretto, coache professionnelle et cofondatrice du cabinet Les Ecklaireurs, une société qui aide les salariés touchées par des maladies évolutives.

Co-construire une solution avec son manager

Être factuel sans entrer dans les détails est en effet une bonne porte d’entrée pour évoquer nos problèmes au travail, surtout lorsque l’on s’adresse à son supérieur. Pour cela, il est d’abord important de trouver le bon moment : ne déboulez pas à l’improviste ou alors que la personne semble débordée. Prenez rendez-vous, précisez bien qu’il vous faut un endroit calme pour en parler seul à seul.

L’idée est ensuite de parler de sa situation, ses besoins, et non de ses émotions. Il s’agit de privilégier le "je" au "tu", de ne pas charger son manager de trop de responsabilités, ce qui risque de le braquer. "Si vous êtes malade, dites que pour vous soigner, vous avez besoin que l’on réorganise votre mission, vos horaires, votre lieu de travail. Et vous n’êtes pas obligé de donner des détails sur votre maladie pour cela. Après une rupture amoureuse, dites qu’un problème personnel affecte vos capacités cognitives et que vous vous sentez amoindri", suggère Sophie Maretto.

" On ne va pas se mentir, les managers aiment bien quand la solution vient d’eux "

Et la coache professionnelle de poursuivre : "Proposez des pistes à votre employeur : on pourrait peut-être décaler la réunion matinale un peu plus tard ? Je pourrais peut-être prendre quelques jours de congés ? Je pourrais peut-être rapporter un peu de nourriture de la cantine chez moi (pour aider un proche malade, par exemple) ? Demandez-lui son avis : ‘j’ai pensé à ça mais tu as peut-être une meilleure idée’. On ne va pas se mentir, les managers aiment bien quand la solution vient d’eux. Le travail doit se faire ensemble, dans une dynamique de co-construction, au cas par cas".

Ne pas oublier le reste de l’équipe, sans en faire trop

N’oubliez pas, également, d’évoquer avec votre manager la question du reste de l’équipe. Car à chaque aménagement de votre mission, chaque fois que vous vous absenterez pour régler vos problèmes personnels, vos collègues risquent d’être concernés. En France, 40% des arrêts maladies longue durée ne sont pas remplacés. Il s’agira alors pour l’entreprise de trouver une solution pour sensibiliser le reste des collaborateurs à votre situation, sans leur en dire trop non plus. Un travail délicat qui demande souvent l’aide d’un interlocuteur extérieur (coach, médecin du travail, RH etc.).

Enfin, une fois que votre demande de réaménagement a été acceptée, essayez de vous y tenir. Si vous culpabilisez et continuez à vous surcharger de travail, vous risquez d’empirer votre situation. "Quand cela concerne des personnes engagées dans l’entreprise qui ont le souci de continuer à travailler malgré les difficultés, on est dans le profil type du burn-out", prévient la coache Isabelle Le Bouëtté, citée par Courriers Cadre. D’où l’importance d’accepter sa situation de mal-être, pour mieux la surmonter.

Les trois informations à retenir 

Avant d'en parler à votre manager, renseignez-vous sur ce que peut déjà vous proposer votre entreprise (CE, médecine du travail, RH...)

Choisissez le bon moment pour parler à votre supérieur, et co-construisez une réponse ensemble

Soyez factuel sans donner de détails, ne vous laissez pas emporter par vos émotions, parlez de vos besoins