Lundi prochain, c’est la rentrée, et son cortège de pleurs et de séparations douloureuses. C’est surtout vrai pour les enfants qui entrent pour la première fois à l’école, en petite section de maternelle. Mais bien souvent, les parents qui accompagnent, pour la première fois là encore, leur progéniture à l’école n’en mènent pas large. Hélène Romano, docteur en psychologie, auteur notamment de l’Abécédaire de la survie en milieu scolaire, livre quelques clés pour que tous les membres de la petite famille vivent au mieux cet instant fatidique.
Avant : anticipez !
La rentrée, c’est lundi, mais dans la tête des parents, c’est sans doute beaucoup plus tôt. Et ça tombe bien, mieux vaut en effet se préparer quelques jours à l’avance. "Il ne faut pas hésiter – quand ça n’a pas pu être fait fin juin ou début juillet – à se rendre sur les lieux quelques jours avant la rentrée", explique Hélène Romano. "On peut y aller seul d’abord, pour trouver des choses positives à dire à son enfant, lui en parler. Puis y aller avec le futur élève, le familiariser avec l’entourage de l’établissement, trouver des points de repères, une boulangerie, un arrêt de bus. Toutes choses qui permettent à l’enfant d’anticiper les choses", poursuit la pédopsychiatre.
Et surtout, surtout, il convient d’éviter de transmettre son éventuel stress à sa chère petite tête blonde. "Soyez le plus serein, le plus détendu possible, ne vous mettez pas de pression", conseille Hélène Romano. "Il faut se rappeler que l’école maternelle, c’est un temps de plaisir, de découverte sociale, des premiers apprentissages. C’est un temps très positif pour l’enfant."
" Il faut éviter de projeter son propre vécu sur son enfant "
Et si l’école est un mauvais souvenir pour les parents, il faut travailler sur soi. "Les parents qui ont un vécu scolaire compliqué ont tendance à aller à la rentrée à reculons. Mais il faut éviter de projeter son propre vécu sur son enfant. Si on est stressé, il faut mettre des mots sur ses angoisses, se demander pourquoi on ne se sent pas bien en se souvenant de l’école, ne pas se mentir à soi-même. Cela demande un vrai travail d’introspection", admet la psychologue.
Enfin, la rentrée, ça veut dire que l’enfant grandit. "Pour le parent, une première rentrée scolaire peut avoir une résonnance de deuil. Cela montre que son bébé n’est justement plus un bébé, qu’il passe de la petite enfance à l’enfance, qu’il a moins besoin de nous", confirme Hélène Romano. Mais promis, c’est une bonne nouvelle. "Le temps de rentrée est un temps positif. Cela montre que l’enfant grandit, il faut lui montrer que vous êtes fiers de lui, mais aussi lui rappeler que vous serez là pour lui."
Pendant : partez (vite) !
Mais ce que les parents redoutent le plus pour la rentrée, c’est sans aucun doute la séparation. Le moment, potentiellement déchirant, où il faut laisser son enfant dans la classe. "En maternelle, tout est mis en place pour faciliter la séparation. Et bien souvent, les instituteurs doivent plus souvent gérer les parents que les enfants", sourit Hélène Romano. "L’idéal, c’est de se préparer la veille à la séparation, que le parent puisse se représenter ce moment, pour se préparer aux émotions qu’il pourra ressentir. Car c’est évidemment normal de ressentir des émotions. Une séparation, c’est un moment difficile, parfois violent. Je serais plus inquiète face à un parent qui n’en aurait rien à faire", assure la pédopsychiatre.
" Ce qu'il faut éviter, c'est d'être un parent chewing-gum' "
Et autant ne pas faire durer le supplice. "Il faut se préparer psychologiquement et se dire qu’on ne reste pas plus d’un quart d’heure. Car plus on reste, plus c’est difficile de partir", rappelle Hélène Romano. "Ce qu’il faut éviter, c’est d’être un ‘parent chewing-gum’, qui fait mine de partir, mais s’arrête sur la pas de la porte, jette un dernier regard ou lance une dernière parole qui relance la machine à pleurs", image la psychologue.
Enfin, il ne faut pas oublier de préparer son enfant à la séparation. "Le mieux est de lui dire que ce jour-là, on peut venir avec lui, qu’on visite la classe, qu’on fait un bisou ensuite, on s’en va, au travail ou faire des activités. C’est très important pour l’enfant de comprendre que papa et maman ont une vie sans lui. Lui dire qu’on ne l’abandonne pas, qu’on va le retrouver à la fin de la journée, et lui dire que l’école, c’est son lieu à lui", conclut celle qui fut aussi directrice de l’ouvrage collectif Pour une école du bien-être.
Après : profitez !
La séparation passée, inutile de ressasser. "Il faut essayer de ne pas y penser 15 fois dans la journée, éviter surtout d’appeler l’école pour savoir comment ça se passe. Se dire que s’il se passe quoi que ce soit - et il n’y a pas de raison qu’il se passe quoi que ce soit - l’école appellera", édicte Hélène Romano. "L’école est un milieu institutionnel avec plusieurs adultes. Il faut prendre soin de soi pour être disponible le soir."
" On a tout à fait le droit d'être soulagé "
C’est trop difficile ? Pensez au doudou… pour vous. "Oui, le parent peut aussi avoir un doudou. Il peut dire à l’enfant qu’on emporte un petit bout de lui, un porte-clé, un mouchoir. Une chose qui fera office d’objet transitionnel qu’on garde évidement secret, pour soi."
Et puis le parent a aussi le droit de prendre du plaisir. "On a tout à fait le droit d’être soulagé", confirme la docteur en psychologie. "De se dire qu’un peu de liberté, de tranquillité, ça fait du bien. Un bon parent, c’est celui qui laisse son enfant grandir, prendre de l’autonomie. On n’est pas condamné par son enfant."
Nos conseils à retenir :
- Avant : anticipez, reconnaissez les lieux, n’hésitez pas à rencontrer le personnel de l’école et l’institutrice. Et préparez-vous psychologiquement, vous et votre enfant, à la séparation.
- Pendant : ne vous attardez pas. Restez un quart d’heure tout au plus, et évitez d’être le "parent chewing-gum", qui n’arrive pas à partir.
- Après : profitez ! Essayez de faire confiance à l’établissement, de ne pas trop penser à votre enfant. Les retrouvailles, une fois la journée terminée, n’en seront que meilleures.