Censée faire repasser son déficit sous la barre des 3% du PIB depuis 2013, la France est encore loin du compte. Paris a donc obtenu vendredi, et ce pour la deuxième fois, un nouveau délai pour respecter ces règles de bonne gouvernance budgétaire. Sauf que Bruxelles a cette fois-ci accompagné ce nouveau calendrier d’objectifs plus ambitieux en termes d’économies. Un tour de vis supplémentaire que conteste le gouvernement français : en visite à Bruxelles, Emmanuel Macron a martelé lundi que la France respectera ses objectifs mais n’ira pas plus loin. Pas sûr que ce message porte.
Un nouveau calendrier mais aussi de nouvelles économies. Pour éviter un dérapage des dépenses publiques comme l’a connu la Grèce, les pays de la zone euro ont conclu un Pacte de stabilité : chacun s’engage à ne pas dépasser les 3% de déficit et les 60% de dette publique. Sauf que la France n’a jamais respecté ces objectifs : son déficit public était censé passer sous les 3% en 2013, puis ce fut 2015. Paris n’étant pas au rendez-vous une nouvelle fois, l’échéance a été repoussée à 2017.
Mais du côté de Bruxelles, on commence à perdre patience : Paris n’a jamais joué le jeu et a, en raison de son poids politique, évité toute sanction là où d’autres pays plus petits ont respecté scrupuleusement le Pacte de stabilité. Si la Commission européenne a accordé à la France un nouveau délai, elle a donc néanmoins décidé de la sanctionner d’une autre manière : en revoyant à la hausse les objectifs de réduction des déficits.
Un nouvel effort estimé à 30 milliards. Dit autrement, la France va devoir faire des économies plus importantes que prévues. Pour arriver à ramener son déficit public à 3% du PIB en 2017, la France devait réaliser 50 milliards d’économies en trois ans, selon les calculs du gouvernement. Mais avec les objectifs plus exigeants édictés par Bruxelles, le gouvernement estime que cela revient à réaliser 30 milliards d’économies supplémentaires. Un cran de plus dans l’austérité que la France refuse et elle l’a fait savoir en envoyant lundi son ministre de l’Economie à Bruxelles.
Un tour de vis supplémentaire "pas raisonnable". En marge d'une réunion avec ses homologues européens, Emmanuel Macron l’a promis : "la France mettra en oeuvre les 50 milliards d'économies et atteindra 3% de déficit en 2017". Avant de préciser que Paris n’ira pas plus loin, contrairement à ce que réclame Bruxelles.
Pour justifier ce refus, la France estime que le nouveau plan concocté par la Commission européenne "n'est pas raisonnable macro-économiquement" car "cela cassera la croissance". En clair, Paris accepte le nouveau calendrier mais refuse de réaliser de nouvelles économies par rapport à ce qui était prévu pour ne pas tuer dans l’oeuf la timide relance qui s’annonce. Un argument tout à fait recevable, sauf qu’il vient d’un Etat qui n’est pas vraiment exemplaire dans sa gestion budgétaire.
Paris lance une opération lobbying compliquée. Si la France souhaite faire évoluer les positions de la Commission européenne, il va lui falloir trouver des alliés. Paris a donc commencé à discuter avec ses voisins et espère redistribuer les cartes le 10 mars, date de la prochaine réunion des ministres des Finances européens.
Sauf que la tâche s’annonce ardue car la France a de moins en moins de soutien : d’abord parce qu'elle n’a jamais respecté le Pacte de stabilité, ce qui irrite les pays du Nord, et qu’elle n’a jamais été sanctionnée, ce qui énerve les "petits" Etats de l’UE qui n’ont pas eu droit à une telle indulgence. Quant à ses alliés traditionnels, les Etats du Sud, une bonne partie d’entre eux se sont vu infliger une sévère cure d’austérité : ces pays sont donc de moins en moins enclins à soutenir Paris dans sa croisade. La France a une semaine pour faire jouer sa diplomatie. Ou trouver de nouvelles sources d’économies.