L'INFO. Le gouvernement veut "clarifier" et "rendre plus efficace" le statut d'auto-entrepreneur. L'Inspection générale des Finances et l'Inspection générale des Affaires sociales ont remis mercredi un rapport sur le sujet à Sylvia Pinel. Et la ministre du Commerce et de l'Artisanat a annoncé quelques mesures à la presse, dont une limitation dans le temps du régime. On vous résume tout.
Un statut déjà très décrié. Ce régime permet aux salariés, chômeurs, retraités ou étudiants de développer une activité à titre principal ou complémentaire pour accroître leurs revenus, avec des démarches simplifiées et un régime fiscal avantageux. Il est régulièrement accusé de créer une concurrence déloyale, notamment par les artisans qui eux, doivent payer davantage d'impôts. Près de 900.000 auto-entrepreneurs étaient administrativement actifs fin février 2013. Et leur bilan est contrasté. Près de la moitié ne dégagent pas de chiffre d'affaires, et 90% de l'autre moitié réalisent un chiffre d'affaires inférieur au Smic, précise le ministère de l'Artisanat, du Commerce et du Tourisme. Le rapport remis à la ministre souligne par ailleurs que 56% des entreprises créées ces quatre dernières années se font sous ce régime. Ce sont donc autant de concurrents aux artisans, et autant d'entreprises qui payent peu d'impôts, sans pour autant avoir les qualifications requises pour réaliser du chiffre d'affaires.
>> À lire aussi : auto-entreprise, l'ombre du travail au noir
Instaurer un délai de cinq ans maximum. Pour résoudre ces problèmes, le gouvernement entend limiter le statut, et mieux accompagner ceux qui en ont recours pour qu'ils se dirigent vers d'autres activités. Un auto-entrepreneur qui choisi ce régime pour son "activité principale" ne pourra ainsi bientôt plus garder son statut indéfiniment, a annoncé le gouvernement mercredi. Interrogée sur la fourchette de temps envisagée Sylvia Pinel a répondu "de un à cinq ans". "Mais, bien sûr, c'est à affiner. C'est pour cela que je ne veux pas m'avancer sur un délai", a-t-elle ajouté. Matignon a toutefois précisé dans l'après-midi que ce serait "plutôt deux à trois ans", selon Les Echos.
Que se passera-t-il une fois ce délai écoulé ? "Il s'agira de permettre à des jeunes chefs d'entreprises qui se lancent dans cette dynamique d'être accompagnés, de ne pas être laissés seuls dans la nature comme c'est le cas aujourd'hui", répond la ministre sans plus de précision. Cette dernière a toutefois fait la distinction entre les auto-entrepreneurs qui choisissent ce statut pour une "activité principale" et ceux qui le choisissent pour une "activité secondaire". Ces derniers ne seront pas concernés par la limite de temps… ni par "l'accompagnement" promis.
>> Les critiques. Cette promesse de limitation n'a pas rassuré les artisans, qui déplorent des "mesurettes". "La seule solution aurait été d'exclure les métiers de l'artisanat du statut d'autoentrepreneur. Ou alors, d'obliger les autoentrepreneurs à s'inscrire à une chambre des métiers, que celle-ci vérifie les qualifications des autoentrepreneurs. Et que les règles fiscales et sociales soient harmonisées", a ainsi réagi Alain Griset, président de l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA), dans une interview au Monde. "C'est un discours ambigu. D'un côté, on reconnaît l'importance du statut d'auto-entrepreneur. Et de l'autre, on met un effet guillotine avec la limitation dans le temps", a renchéri, pour sa part, François Hurel, fondateur de l'Union des auto-entrepreneurs, dans Les Echos.
Assurer d'avantage la sécurité. Le gouvernement compte par ailleurs assurer un contrôle des qualifications des auto-entrepreneurs, et va les obliger à souscrire une d'assurance professionnelle, nécessaire dans le cas de certaines professions pour des raisons de sécurité et de santé des entrepreneurs et de leurs clients.
>> Les critiques. Pour les artisans, ces annonces sont encore trop floues. "Aucune mesure ne prouve que cela va effectivement se réaliser. Personne ne va contrôler. Car aucun système de contrôle n'existe", dénonce ainsi Alain Griset dans Le Monde.
Combattre le travail dissimulé. Sylvia Pinel préconise également l'obligation de présenter une attestation du dernier employeur. L'idée? Eviter les détournements du statut effectué par certains employeurs, qui poussent leurs anciens employés à adopter le régime pour réduire leurs charges patronales. Ils leur délèguent ainsi les mêmes missions, sans s'acquitter des charges.
>> Les critiques. Là encore, aucune précision n'est apportée par la ministre sur le type de sanction et de contrôle à mettre en place pour éviter les détournements, une fois que l'auto-entrepreneur s'est déclaré. "L'auto-entreprise augmente le travail dissimulé. Auparavant, quand quelqu'un faisait du travail dissimulé et était contrôlé, il était sanctionné", regrette Alain Griset, président de l'Assemblée permanente des chambres de métiers et de l'artisanat. Et d'enchaîner qu'aujourd'hui, l'auto-entrepreneur, "peut toujours dire qu'il avait l'intention de déclarer ce travail (fait pour un ancien employeur ndlr.), puisque celui-ci est déclaré à postériori."