Parmi les nombreuses mesures prévues par la loi Hamon, il en est une qui était plus que symbolique, un véritable marqueur de gauche : l’obligation pour un patron d’informer les salariés lorsqu’il souhaite vendre l’entreprise. Un droit à l’information préalable censé permettre dans certains cas aux salariés de se porter candidat au rachat de leur propre société. Sauf que le patronat était vent debout et a convaincu le gouvernement de faire marche arrière sur ce dossier au nom du pragmatisme.
La loi Hamon, une belle idée jugée inapplicable. Depuis l'entrée en vigueur de la loi Hamon sur l'économie sociale et solidaire, en novembre dernier, les entreprises de moins de 250 salariés ont l'obligation d'informer leur personnel de tout projet de cession deux mois à l'avance. "Pourquoi ce droit d'information existe ? Un, pour que les salariés sachent que leur entreprise est à vendre. Deux, pour qu'ils puissent être, le cas échéant, repreneurs de leur propre entreprise", argumentait Benoit Hamon sur Europe 1.
Son texte était à peine adopté en novembre 2014 qu’il était pourtant déjà menacé : le gouvernement confiait dans la foulée à la députée Fanny Dombre-Coste le soin de mener une mission d’évaluation, dont le compte-rendu est à retrouver en fin d'article.
Un examen qui permet à Bercy d’affirmer que, finalement, cette loi est inapplicable. L’argument est le même que celui invoqué par les organisations patronales : cette obligation d’information menacerait les projets de vente. Car si le chef d'entreprise n'informait pas correctement ses salariés dans les délais prévus, la sanction pouvait être très lourde avec une vente qui pouvait être purement et simplement annulée.
L’esprit de la loi demeure, les sanctions disparaissent. Pour ne pas donner l’impression de se renier, le gouvernement ne va pas aller jusqu’à annuler ce dispositif. Mais l’ajustement prévu ressemble fort à un enterrement en rase campagne: l'entreprise qui ne respecte pas ce droit à l’information ne risquera plus au maximum qu'une amende. Une modification qui sera intégrée dans la loi Macron, par amendement, lors de son passage au Sénat le 7 avril prochain.
Un allègement décidé pour répondre à l’inquiétude des chefs d’entreprises, comme l’a reconnu Carole Delga, secrétaire d'Etat au commerce, au micro d'Europe 1 : "nous entendons leurs remarques sur un environnement juridique toujours plus complexe. Un juge pouvait pendant un an ou deux après la cession, casser cette cession. Donc cela n’était pas bon pour l’économie, pas un signal favorable pour le repreneur. Nous voulons qu’il y ai une avancée sociale pour les salariées mais que cette avancée ne soit pas vécue comme une menace par les chefs d’entreprises", a-t-elle argumenté.
Le compte pénibilité, prochain reniement ? Ces assouplissements à la loi Hamon constituent donc une petite victoire pour le patronat, mais ce dernier ne compte pas s’arrêter là : il est déjà à l’œuvre pour obtenir une réforme du compte pénibilité, dont la mise en application est jugée trop complexe.
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