"Il faut indiquer le cap, dans les trois ans, d'interdiction d'utilisation du diesel dans les grandes villes." Le sénateur écologiste Jean-Vincent Placé n'est pas passé par quatre chemins pour formuler ses exigences au sujet de la grande conférence environnementale, qui s'ouvre vendredi.
Le président du groupe Europe-Ecologie-Les Verts au Sénat, invité d'Europe1, a emboîté le pas au socialiste Jean-Marie Le Guen, qui avait impulsé le débat mercredi, en proposant sur son blog d'interdire les véhicules diesel dans Paris. "Le danger que font peser les particules fines sur la santé de nos concitoyens n'est plus une hypothèse mais une vérité scientifique. Je propose d'avancer vers l'interdiction de circuler aux véhicules diesel dans la capitale", avait écrit le médecin et député de Paris.
"Nous ouvrons la discussion. C'était une erreur d'encourager les Français à s'équiper en moteur diesel", a embrayé la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine, vendredi, également sur Europe1. Mais qu'ont-ils tous contre ce carburant?
LES ARGUMENTS DES ANTI-DIESEL
Un carburant "cancérogène certain." Les moteurs diesels émettent des particules fines à l'origine de quelque 42.000 morts prématurées par an, selon le ministère de l’Écologie. Auxquelles il faut ajouter un gaz, le dioxyde d'azote, responsable de maladies respiratoires et cardio-vasculaires.
Cerise sur le capot : le diesel a été classé en juin comme "cancérogène certain" par le Circ, l'agence pour le cancer de l'Organisation mondiale de la santé (OMS). Et en plus du cancer du poumon, le Circ a prouvé que les gaz d'échappement engendrent également un risque de cancer de la vessie.
Les Français perdent des années de vie. Aucune des neuf grandes villes Françaises ne respecte les plafonds de pollution de l'Organisation mondiale (OMS) de la santé. Un constat loin d'être anodin, compte tenu du fait que "l'espérance de vie sur 30 ans augmenterait de 3,6 à 7,5 par mois, selon la ville", si les normes de l'OMS étaient respectées, selon l'Institut national de veille sanitaire cité par Libération.
Coûteux pour les finances publiques. Les écologistes ont fait le calcul: selon eux, le coût de l'utilisation du diesel, si l'on ajoute le manque à gagner du fait d'une détaxe partielle, les décès prématurés, les journées d'hôpital, les absences au travail et l'importation du gazole, dépasse par an les 40 milliards d'euros.
L'industrie pétrolière française pénalisée. En marge de ce problème, le gazole défavorise également les raffineries de pétrole françaises. Ces dernières, mal équipées pour fabriquer des carburants diesel, souffrent de la concurrence internationale et dépensent des fortunes pour importer le diesel d'autres pays. Ce qui risque de coûter cher à l'emploi en France.
L'Union française des industries pétrolières (Ufip) s'est d'ailleurs dite favorable vendredi à une réduction des avantages fiscaux du diesel par rapport à l'essence. "Nous souhaitons qu'on rééquilibre la fiscalité de façon à stopper le déséquilibre de la demande qui est pénalisant pour nos industries", a ainsi réclamé Jean-Louis Schilansky, président de l'organisation.
Un élément que peuvent utiliser les écologistes. Un argument de taille que peuvent également brandir ceux-qui veulent prouver que le pétrole ne crée par forcément des emplois. Et qui militent pour des investissements massifs dans une filière énergie renouvelable Made in France.
LES ARGUMENTS DES PRO-DIESEL
Le diesel, meilleur que l'essence pour le climat. Malgré les attaques, le diesel reste privilégié par les consommateurs. A ce jour, 60% du parc automobile français est en effet constitué de voitures roulant au diesel. Elle représente même 71% des ventes! Réputé meilleur pour le climat que le moteur à essence en générant moins de CO2, le diesel a connu un succès remarquable en France, grâce à une politique fiscale avantageuse. Ce qui l'a rendu bien plus attractif pour les portemonnaies.
Le supprimer serait dangereux pour la filière auto. Pour l'heure, le gouvernement s'est bien gardé de rendre un avis tranché. Car le sujet est ultrasensible. Les constructeurs automobiles français, le malade PSA en tête, bénéficient à plein du diesel. "Le supprimer aurait des conséquences très importantes sur l'emploi", prévient-on chez la marque au lion. La fin du diesel risque fort de faire caler les efforts du gouvernement pour élaguer le plan de 8.000 suppressions de postes prévu dans le groupe et relancer une filière en panne.
» Lire aussi : plan auto, qu'a-t-il sous le capot?