La déclaration. "Dans nos magasins, on va temporiser, on va différer cette hausse", a promis le PDG d'E.Leclerc, mardi sur i-Télé. En une seule phrase, Michel-Edouard Leclerc est entré en révolte fiscale en expliquant que l'enseigne de grande distribution allait répercuter de manière "différée" sur ses clients la hausse de la TVA au 1er janvier. La majorité n’a pas tardé à répliquer, le ministre délégué à l'Agroalimentaire Guillaume Garot dénonçant sur France 3 "un coup de pub". Alors Edouard Leclerc fait-il vraiment un cadeau à ses clients ?
Le contexte. Avant de démêler le vrai du faux, rappelons qu’à compter du 1er janvier 2014, les nouveaux taux de TVA vont entrer en application. Le taux réduit restera inchangé à 5,5%, le taux intermédiaire passera de 7 à 10% et le taux maximum passera de 19,6 à 20%.
Oui, le gouvernement n’a pas tenu toutes ses promesses. Pour justifier son attaque médiatique, le patron du groupe Leclerc souligne que "le gouvernement avait promis, mais il n'a pas tenu sa promesse, qu'il y aurait une baisse sur l'alimentaire et la consommation courante des produits de première nécessité. (…) Il ne l'a pas fait, il n'y a que la hausse". Sur ce point-là, il a raison : pour compenser la hausse des autres taux, le taux réduit de TVA devait passer de 5,5 à %. Sauf que la majorité est revenu sur ses projets le 17 octobre. Pas de baisse sur les produits de première nécessité, mais pas de hausse non plus.
Mais l’effort de Leclerc est très limité. "Michel-Edouard Leclerc joue au Père Noël avec l’argent des Français", a ironisé le député PS Thomas Thevenoud, avant de préciser : "il oublie de dire que le taux de TVA ne bougera pas pour les produits de première nécessité qui représentent l’essentiel du chiffre d’affaires des enseignes du groupe". Ce député n’a pas tort : l’alimentaire, dont le taux de TVA ne changera pas, représente la première source de revenus pour les grandes surfaces. Selon une étude AC Nielsen de 2007, l’alimentation représente 66% du chiffre d’affaires des supermarchés, et 51,8% pour les hypermarchés. Des chiffres qui ne tiennent même pas compte des boissons, puisque l’étude ne fait pas de distinction entre les boissons classiques et celles alcoolisées, taxées à hauteur de 20% à partir du 1er janvier 2014.
En clair, Leclerc ne va repousser la hausse de la TVA que sur un tiers des produits qu’il vend (alcool, textile, droguerie, équipements, loisirs). Et l’effort qu’il consent ne s’élève qu’à 0,4 point, puisqu’il s’agit des produits passant de 19,6 à 20% de TVA. Quant aux produits dont le changement de TVA va réellement se faire ressentir, passant de 7 à 10%, Leclerc ne les vend pas puisqu’il s’agit principalement de prestations de services et de la restauration. Pas sûr qu’il aurait pris sur lui une telle hausse de 3%.
Un effort mais jusqu’à quand ? Dernier détail, et pas des moindres : Edouard Leclerc n’a pas précisé jusqu’à quand il ferait un effort. On ignore en effet quand il appliquera la hausse des taux de la TVA. Dès lors, ses promesses n’engagent que ceux qui y croient.