L'INFO. François Hollande a confirmé jeudi son hostilité à toute loi d'amnistie, même sociale. "On ne peut pas condamner ce qui s'est passé au Trocadéro ou ailleurs, et dire ensuite c'est normal que pour d'autres conflits on détruise. Il n'y a aucun conflit qui justifie qu'on détruise", s'est justifié le chef de l'Etat, lors de la deuxième conférence de presse de son mandat. Il rejoint ainsi la position du gouvernement, notamment exprimée fin avril par Alain Vidalies.
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"La position du gouvernement dans ce débat sera non, nous ne sommes pas favorables à cette amnistie, ni à aucune autre", avait martelé le ministre des Relations avec le Parlement. Mais le chef de l’État a tout de même mis un peu d'eau dans le vin jeudi. Il s'est en effet dit prêt à examiner au cas par cas certaines situations "exceptionnelles". Suffisant ? Pas vraiment, juge-t-on à la gauche de la gauche. On vous décortique ce débat qui divise jusque dans les rangs du PS.
Que prévoit cette mesure exactement ? Cette proposition de loi du Front de gauche prévoit d'amnistier certains syndicats et manifestants jugés coupables de délits lors de mouvements sociaux. Endommager un local, dégrader les biens de son entreprise, l'occuper ou la diffamer… Toutes les peines liées à ces délits commis par le passé par certains syndicats seront levées si la proposition est adoptée. C'est le cas par exemple de six salariés de Continental Amiens, qui avaient saccagé la sous-préfecture de Compiègne en 2009, et furent condamnés à 4.000 euros d’amendes.
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A-t-elle des chances d'être adoptée ? Le Sénat avait adopté la proposition de justesse, le 1er mars dernier. Mais l'Assemblée l'a renvoyée en Commission, pour que le texte y soit retravaillé. Les députés, excepté 95 députés de gauche, dont 80 socialistes, ont jugé trop flous les critères d'amnistie, craignant que certains délits trop importants soient graciés. François Hollande ayant exprimé son hostilité à la proposition, il y a peu de chance qu'elle voit le jour sous sa forme actuelle. "Le moins que l'on puisse dire c'est que la rédaction n'était pas parfaite et qu'il y avait lieu à un travail en commission", a déclaré le chef de l’État jeudi.
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François Hollande l'enterre-t-il vraiment ? "Il est exact que Jean-Luc Mélenchon était venu me présenter un certain nombre de situations (concernant certains syndicalistes, ndlr) que nous pourrons regarder, pas nécessairement dans une loi d'amnistie d'ailleurs", a-t-il déclaré jeudi. Et d'ajouter, sans plus de précision : "Il y a nécessité de regarder plus précisément cette question et de ne pas rentrer dans la logique de l'amnistie, il faut donc qu'il y ait des cas exceptionnels, un certain nombre peuvent l'être d'ailleurs". Il reste donc deux options. Soit le nouveau texte, issu de la Commission, trouve le soutien du chef de l’État et de la majorité des socialistes et pourra être adopté à l'Assemblée. Soit les députés l'enterrent purement et simplement, et le chef de l’État pourra décider lui-même d'amnistier au cas par cas certains syndicalistes.
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La gauche de la gauche convaincue ? "Vraiment, quelle journée pourrie", a réagi Jean-Luc Mélenchon, jeudi sur Europe1. Le Co-président du Front de gauche assure ne pas comprendre comment François Hollande "peut dire qu'il est contre une loi d'amnistie parce qu'elle aurait un caractère, en quelque sorte, quasi monarchique, une espèce de mise entre parenthèse de la loi, et l'instant d'après qu'il est prêt à faire une amnistie pour certains cas". Mais l'ancien candidat à la présidentielle est tout de même prêt à prendre François Hollande au pied de la lettre.
"Je vais aller le voir. Je vais me ramener avec ma pile de cas et lui demander si mon camarade d'Alès mérite cinq ans d'inéligibilité pour avoir jeté un œuf sur une grille", avance-t-il. Et d'enchaîner : "je vais aller lui demander s'il trouve normal que ma camarade de la CGT Eure-et-Loire soit condamnée à 12.000 euros d'amende pour avoir mis des autocollants. On ne cesse de mettre, d'une manière absolument insupportable, sur le même plan les saccages et les pillages de voyous à la Concorde, ou bien des exaltés hostiles aux mariage pour tous, avec des hommes et des femmes qui mettent en péril leur carrière et leur vie professionnelle et familiale pour défendre le travail de leurs camarades".