S’il souhaite respecter son engagement de ne pas dépasser 3% de déficit en 2013, le gouvernement va devoir trouver un peu plus de 30 milliards supplémentaires pour boucler son budget. A priori, en l’absence de croissance, la méthode est simple : il suffit soit d’augmenter les recettes, c’est-à-dire les impôts, soit de baisser les dépenses.
Aucune de ces pistes n’étant politiquement facile à vendre, le gouvernement envisage de recourir à une autre technique : le gel du barème des impôts. Une manière indirecte d’augmenter la fiscalité sans le dire et qui rapporte beaucoup. "La désindexation du barème par rapport à l'inflation sera maintenue l'an prochain", a ainsi confirmé vendredi une source proche du dossier, tout en précisant que les ultimes arbitrages doivent être rendus d'ici une quinzaine de jours par Matignon et l'Elysée.
Un principe : ne pas prendre en compte l’inflation
En apparence complexe, "la désindexation du barème (fiscal) par rapport à l'inflation" désigne un mécanisme très simple et aux conséquences bien concrètes. Chaque année, le coût de la vie quotidienne évolue avec l’inflation. Pour en tenir compte, le barème des impôts est donc revu annuellement en fonction de l’évolution des prix.
Ainsi, là où un contribuable ne devenait imposable qu’à partir de 5.852 euros de revenus nets en 2008, la barrière était fixée à 5.875 l’année suivante. Chaque année, le barème augmente donc avec la légère hausse des revenus.
Une conséquence : plus d’impôts récoltés
En gelant ce barème, les ménages français dont les revenus vont mécaniquement augmenter risquent donc de devenir imposables ou de passer à la tranche fiscale supérieure. Pour ceux dont les revenus stagnent, la facture sera la même que l'année précédente alors qu'ils auraient payé moins avec l'indexation.
Sans aucune augmentation du taux d’imposition, les sommes récoltées par le Fisc vont donc grossir. Cette "désindexation" cache une "hausse généralisée de l'impôt sur le revenu", confirme Vincent Drezet, le secrétaire national de Solidaires Finances publiques, avant d’ajouter : "c'est un moyen discret, mais réel, d'augmenter l'impôt pour l'ensemble de contribuables imposables".
Une manière détournée de récolter 1,7 milliard
Simple modification mathématique, le gel du barème des impôts peut rapporter gros. Le ministère de l'Économie estime qu’il peut permettre de récolter 1,7 milliard d’euros supplémentaires pour la seule année 2012.
Politiquement, la mesure est aussi avantageuse. Non seulement le gouvernement ne peut pas être accusé d’augmenter les impôts, mais en plus il ne fait que respecter une décision prise par l’équipe Fillon en novembre dernier pour les années 2012 et 2013. Le candidat Hollande avait pourtant dénoncé en avril dernier une telle mesure, estimant que "c'est ce qu'il y a de plus injuste".
Néanmoins, "la mesure a déjà été votée par l'ancienne majorité, et sa suppression ne figure pas en tant que telle dans les 60 engagements de Hollande... c'est assez tentant pour Bercy de la maintenir", reconnaît ainsi un fin connaisseur du dossier.