La déclaration. La question de l’assurance-chômage "doit être reposée". La phrase a été lancée lundi, à la City de Londres, par Manuel Valls. Il s'agit de la première fois que le chef du gouvernement émet en public l'hypothèse d'une modification du régime d’indemnisation des chômeurs. Soucieux de "vendre" la France auprès de ses partenaires européens, le Premier ministre risque de susciter l'ire de toute une partie des syndicats hexagonaux.
"En Grande-Bretagne et en Allemagne, le temps partiel a permis de préserver l’emploi et de repartir de manière plus forte quand la croissance est revenue. Nous, en France, avons fait le choix d’un chômage très important et très bien indemnisé. C’est dans le dialogue avec ceux qui recherchent un emploi que l’on peut améliorer la situation. Cela s’appelle réformer le marché du travail", a déclaré Manuel Valls lundi, devant des hommes d'affaire britannique français. "Des dizaines de milliers d’emplois ne sont pas pourvus. On doit inciter davantage au retour à l’emploi", a-t-il renchéri.
>> Comment fonctionne l'assurance chômage ? Comment pourrait-elle être réformée ? Une réforme est-elle vraiment possible à court-terme ? Éléments de réponse.
Le système actuel. Lorsqu'un salarié perd son emploi (licenciement, rupture conventionnel du contrat de travail), il est indemnisé par l'Assurance chômage. Pour une journée travaillée lorsqu'il avait un emploi, le chômeur a le droit à une journée d'allocation chômage, et cela pendant une durée maximum de deux ans, et de trois ans pour les plus de 50 ans.
L'allocation représente 57% du salaire, si le salaire était supérieur à 2042 euros brut par mois. S'il était inférieur, le chômeur peut toucher jusqu'à 75% de son ancien salaire. Quoi qu'il arrive, l'allocation ne peut pas dépasser les 6.624 euros brut.
Un système avantageux. Contrairement à de nombreux autres pays, l'allocation chômage n'est pas dégressive. Si un chômeur a le droit à deux ans d'indemnisation par exemple, il percevra le même montant pendant ces deux ans. Un cadre au chômage peut ainsi toucher plus de 6.000 euros par mois pendant deux ans.
D'où la volonté de certains, notamment le Medef, de vouloir réformer le système. L'idée : instaurer un système dégressif. Le chômeur gagnerait ainsi 57% de son salaire les premiers mois, puis ce pourcentage diminuerait ensuite par palier.
À quand une réforme ? Mais un changement de système "n'est pas dans les tuyaux, que les choses soient claires", assure pour sa part Jean-Claude Mailly, le patron de FO. "La nouvelle convention d'assurances chômage a été signée au printemps dernier et elle est valable deux ans", poursuit le syndicaliste. Et d'asséner : "quand on a cinq millions de chômeurs, on ne peut pas dire que l'objectif est, d'une manière ou d'une autre, de réduire l'indemnisation. J'aimerai mieux que le gouvernement se batte pour un programme de relance plutôt que de prendre des postures sur un sujet qui n'est pas d'actualité".
Selon le ministère du Travail, contacté par Europe1, il n'y a en effet aucun projet de ce type dans les tiroirs. Un ministre assure même que le sujet n'a jamais été abordé en Conseil des ministres. Selon les informations du Monde, le gouvernement pourrait toutefois profiter de la prochaine renégociation de la convention Unedic, en 2016, pour aborder la question. Un délai confirmé mercredi par Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, interrogé sur Erope1 : "Un chantier est ouvert" entre "partenaires sociaux".
"Je peux imaginer que des discussions vont porter sur l'ensemble, à la fois la durée, les indemnités, les questions liées à l'ensemble de l'équilibre entre indemnités versées et nombre de chômeurs. Il faut qu'il y ait des objectifs très clairs: c'est faciliter la reprise, traiter de manière spécifique les chômeurs de longue durée, car c'est un vrai sujet", a-t-il indiqué.